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12 janvier 2018 5 12 /01 /janvier /2018 22:37


Première lecture  1S 3, 3b-10.19 ; Psaume 39 ; Deuxième lecture 1 Co 6, 13b-15a.17-20 ; Evangile Jean 1, 35-42


Nous célébrons en ce dimanche le deuxième dimanche du temps ordinaire année liturgique B. la liturgie de ce dimanche nous offre de méditer sur le mystère de la vocation. Samuel dans la première lecture tout comme les premiers apôtres dans l’Evangile de ce jour sont tous appelés à adhérer au projet salvifique de Dieu qui ne cesse de nous appeler encore aujourd’hui à être à sa suite pour demeurer en lui. Chacun d’eux se fait aider dans le discernement afin de répondre positivement à leur vocation, don gratuit de Dieu qui veut nous associer à sa mission rédemptrice de l’humanité.


Le jeune Samuel alors qu’il est au service du prêtre Eli entend trois fois de suite la voix de Dieu l’appelant. Son maitre va l’aider à répondre à l’appel de Dieu afin d’être disponible à son projet pour lui. Dans la vocation, Dieu est toujours le premier à prendre l’initiative pour venir à notre rencontre. « Ce n’est pas d’une volonté humaine qu’est jamais venue une prophétie, c’est poussé par l’Esprit Saint que des hommes ont parlé de la part de Dieu. » 2 Pierre 1, 21.

Personne ne s’appelle. Dieu est le premier à prendre l’initiative pour  appeler par le nom propre. Il attend une réponse libre de ceux qu’il appelle. Mais la réponse implique un discernent. C’est le rôle que va jouer le prêtre Eli dans la vocation du jeune Samuel qui n’était pas encore habilité à distinguer la voix de Dieu de celle de son maitre. Dans tout cheminement vocationnel, dans toute décision à prendre, dans tout choix de vie, le discernement est une clé maitresse pour pouvoir faire un choix qui correspond à la volonté de Dieu. Après avoir discerné, il est capital de se rendre disponible et de s’engager pour correspondre aux attentes de Dieu à notre égard. C’est toujours une histoire personnelle, faite des réponses quotidiennes aux sollicitations incessantes et souvent imprévues de Dieu: « parle Seigneur ton serviteur écoute ».


L’engagement au service de Dieu qui appelle implique un don total de tout son être. C’est pourquoi Saint Paul exhorte les Corinthiens à fuir toute pratique qui pourrait souiller leur corps. En effet, par leur consécration, ils sont devenus le Temple de l’Esprit Saint, la demeure de Dieu. Or Dieu ne saurait prendre plaisir à résider dans ce qui est souillé. Il est en effet le Dieu Saint. Nous devons donc lui réserver un accueil digne à travers notre manière de traiter notre corps qui est membre du Christ. Car « notre corps n’est pas fait pour l’impureté, il est pour le Seigneur Jésus, et le Seigneur est pour le corps. » Ce corps est le lieu où Dieu doit manifester sa gloire. Nous sommes donc appelés à avoir un regard positif sur notre corps contrairement à certaines théories qui font de celui-ci la prison de l’âme, lui donnant ainsi une connotation négative.


L’expérience de la vocation comme don de Dieu trouve également son écho dans l’Evangile de ce jour. Jean Baptiste après avoir présenté à ses disciples, Jésus-Christ comme étant « l’Agneau de Dieu », s’incline et s’efface humblement afin que ceux qui aillent à la suite de ce dernier. L’expérience du « venez et voyez » proposée à ses deux disciples curieux de savoir sa demeure, sera fondamentale pour commencer un chemin nouveau dans l’Alliance Nouvelle. Cette rencontre fondamentale avec le Fils de Dieu qu’ils ont longtemps désiré et attendu, marquera pour toujours ces deux disciples qui aussitôt deviendront à leur suite des missionnaires parce que bouleversés positivement par sa présence. André en effet va aller partager la joie de sa rencontre du Messie à son frère Pierre qui, à son tour va se hâter à rejoindre le Seigneur et  Jean se souviendra du moindre détail de ce jour particulier.


La vocation, initiative de Dieu dans son amour insondable et réponse de l’homme dans sa totale liberté, nous met toujours en mouvement. Dieu nous appelle à être avec lui, à faire à lui, à cheminer avec lui vers la Vie en abondance. Son appel est une bonne nouvelle pour notre humanité. Cette joie de sa rencontre doit être partagée avec tout homme et les hommes. D’où l’ouverture à la mission et au service de tous. Etre avec le Christ, c’est être un missionnaire de la bonne nouvelle non pas seulement en parole mais aussi et surtout à travers le témoignage de vie qui doit refléter notre appartenance au Christ dans la radicalité évangélique. 


Merci Seigneur pour tant d’hommes et de femmes que tu appelles à être avec toi. Accorde-nous de savoir toujours répondre positivement avec empressement et enthousiasmes aux multiples appels de l’Esprit. Ainsi, nous aurons la joie d’être avec toi et d’aller communiquer à tous les hommes nos frères l’expérience et la joie de ta rencontre. Toi le vivant pour les siècles des siècles. Amen.

Père Bernard DOURWE, Rcj

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6 janvier 2018 6 06 /01 /janvier /2018 23:10

  Nativité du Seigneur 

« Un enfant nous est né, un fils nous est donné ; l’insigne du pouvoir est sur son épaule ; on l’appelle Messager de Dieu ».

 Après quatre dimanches de préparation, nous sommes joyeux de célébrer en ce jour solennel, jour de fête et de joie, la Nativité de Notre Seigneur Jésus-Christ. Le ciel et la terre chantent gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime. Le mystère longtemps annoncé, attendu et préparé se réalise devant nos yeux. Le Verbe fait chair habite parmi nous. Les textes liturgiques proposés à notre méditation sont extraits pour la première lecture du livre d’Is 52,7-10. Le psaume est le Ps 97, la deuxième lecture est celle de la Lettre aux Hébreux 1, 1-6 et l’Evangile est celui de Jn 1, 1-18. 

Nous avons pris des jours, des semaines pour nous préparer spirituellement à l’accueil du Fils de Dieu à travers des recollections, des neuvaines, des dévotions variées. Nous sommes passés par des exercices de mortifications, d’ascèses en cherchant à nous convertir afin que le Verbe de Dieu nous trouve disposé à l’accueillir. Notre joie est donc grande aujourd’hui. Car notre rédempteur est parmi nous. Noel, loin d’être la fête des tout-petits ou des enfants, loin d’être une fête profane qui se limiterait aux questions de nourriture, de boisson, de vêtement, ou de réjouissances populaires et désordonnées est la célébration du grand mystère de notre Salut. Notre salut devient une réalité. Car Dieu est désormais présent au milieu de nous. Et sa présence ne saurait nous laisser indifférents.

C’est pourquoi dans la première Lecture extraite du Livre d’Isaïe, Israël exulte de joie pour le messager de Dieu qui parcourt les montagnes pour annoncer la paix et la Bonne Nouvelle du salut. Après de nombreuses déceptions humaines et la ruine d’Israël, Dieu lui-même vient consoler son peuple et lui apporter la joie. Lui le Dieu d’amour manifeste son salut à toutes les nations. Personne ne saurait être épargné de cet amour incommensurable. Avec le Seigneur c’est toujours la joie. Point de place ne doivent être cédés à la tristesse, au découragement, au désespoir. 

Par la naissance de Jésus-Christ, la Lettre aux hébreux, nous révèle que Dieu commence les temps nouveaux. Après le temps de la longue attente, de la préparation, des promesses et de conversion, voici le temps de la grâce où Dieu nous comble grâce après grâce. Autrefois, il parlait par les prophètes sous des formes fragmentaires et variées. Maintenant en Jésus-Christ, son Fils unique, Dieu s’est fait l’un de nous. Il l’a établi héritier de toutes choses, lui qui est au-dessus de toute la création et les créatures visibles et invisibles. Au-delà de nos attentes, à notre grande surprise, Dieu s’est fait proche de nous afin que nous soyons proches de lui. Par l’incarnation du Verbe, les hommes ne sont plus abandonnés à eux-mêmes, aux forces ténébreuses et à la damnation. 

Saint Jean dans son prologue, nous offre de contempler le Verbe qui se fait chair afin de demeurer parmi nous. Le Verbe qui était au commencement et par qui tout a été fait vient illuminer nos ténèbres. Car il est la lumière véritable qui conduit les hommes à la lumière. Jean Baptiste lui rend témoignage en le reconnaissant comme le sauveur de tous les hommes qui nous offre la grâce de connaitre Dieu. 

Célébrer la naissance de Jésus c’est donc célébrer la victoire de la lumière sur la vie, c’est célébrer notre salut. C’est prendre conscience de notre vocation de fils de lumière pour ensuite communiquer la lumière à l’humanité qui aime bien rejeter les œuvres de lumière au profit des œuvres ténébreuses. Ainsi, Noel ne saurait avoir de sens si nous continuons à mener une existence de ténèbres, si nous continuons à être des obstacles à la vie des autres. A cause de notre foi en Jésus Verbe incarné, Fils de Dieu et lumière du monde, nous devons nous mettre en mouvement pour la rédemption de tout homme et de tout l’homme. Noel aura donc un sens dans ma vie si je cesse d’être complice des injustices sociales au profit d’une lutte incessante pour la justice pour tous ; si le pauvre, l’orphelin, la veuve, l’étranger, l’affamé, l’assoiffé, trouvent place dans ma vie. Jésus ne nait pas aujourd’hui dans des lieux lointains, ni de façon spéculative. Il nait dans le concret de nos vies. Sa naissance doit avoir des répercussions sur tout notre être, sur notre façon de parler, de penser, d’agir. 

En cette solennité de la Nativité de notre Seigneur Jésus-Christ, tournons-nous donc vers Dieu notre Père afin qu’il nous fasse grâce d’accueillir son Fils dans nos vies.

Père, toi qui as merveilleusement créé l’homme et plus merveilleusement encore rétabli dans sa dignité, fais-nous participer à la divinité de ton Fils, puisqu’il a voulu prendre notre humanité. Lui qui règne'

Père Bernard Dourwe, Rcj.

 

 

 

 

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6 janvier 2018 6 06 /01 /janvier /2018 23:03

Fête de la Sainte Famille B

La Sainte Famille est le nom donné à la famille formée par Jésus de Nazareth et ses parents, Marie et Joseph. Elle est citée en exemple par l’Eglise pour toutes les familles. « Les bergers vinrent en hâte, et ils trouvèrent Marie et Joseph avec le nouveau-né couché dans une crèche ». La fête liturgique célébrant cette Sainte Famille de Nazareth fut instaurée par l’Eglise en 1893. Elle a lieu le dimanche qui suit le 25 décembre, entre la fête de Noël (25 décembre) et la solennité de Marie Mère de Dieu (1er janvier). A Noël, c’est le mystère d’un Dieu qui  se fait homme que l’on médite. Le dimanche qui suit immédiatement Noël, la liturgie invite à célébrer ce mystère dans sa réalité concrète et quasi quotidienne : Le Verbe se fait chair, il naît et vit dans une famille qui ressemble à toutes les autres. Et cette famille nous est donnée en exemple. Dieu peut venir habiter chez nous, au milieu de nous.

Les textes liturgiques proposées en ce jour sont extraits pour la première lecture du livre de la Genèse chapitre 15 verset 1 à 6 et chapitre 21, verset 1 à 3. Le psaume est le ps 104, la deuxième lecture est extraite de la lettre aux hébreux chapitre 11, verset 8 à 19 et l’Evangile nous provient de Luc chapitre 2 versets 22 à 40. Ce dimanche de la fête de la Sainte Famille nous garde dans l’esprit de Noël. C’est toujours le mystère de l’Incarnation du Fils de Dieu qui est devant nos yeux. Les textes des lectures et de l’Évangile de ce jour mettent en scène des personnes qui ont en commun une foi à toute épreuve dans la Parole de Dieu. Abraham et Sara dans la première et la seconde lecture sont enracinés dans une attente ouverte dont ils ne connaissent pas les contours de réalisation. Siméon et Anne, dans l’évangile touchent de leurs mains le salut de Dieu dans l’enfant que Marie et Joseph portent au temple.

Dans la première lecture, la question de la progéniture préoccupe Abraham qui, dans sa vieillesse n’a pas encore une descendance pour le remplacer. Mais Dieu éternellement fidèle comble son attente en lui donnant un Fils. Abraham et Sara après des épreuves sont consolés par la venue dans leur vieillesse d’Isaac, fils de la promesse qui fera désormais leur joie. Avec lui, débute la longue descendance des fils de l’Alliance, dont Jésus sera l’aboutissement et le sommet.

Dans un contexte où la progéniture est un signe concret de bénédiction, ne pas avoir d’enfant ou être stérile est considéré comme un abandon de Dieu ou une malédiction. Pourtant, par la foi, notre espérance doit être de toujours. Désormais, Abraham sera le père d’une lignée sans fin des enfants dans la foi. Confirmant ainsi la bénédiction promise par Dieu d’une génération aussi nombreuse que les Etoiles dans le ciel. Il ouvre ainsi la famille des enfants de Dieu grâce à son obéissance dans la foi.

La foi d’Abraham, digne d’éloge trouve échos également dans la deuxième lecture. La lettre aux hébreux nous présente Abraham comme notre père et modèle dans la foi. Grâce à sa foi, il a pris des chemins inconnus pour se mettre à la suite de Dieu sans savoir où il allait. Malgré les nuits de la foi, des longues attentes de la promesse, il été confiant en Dieu qui lui donnera une descendance. C’est par cette même foi qu’il va remporter l’épreuve du sacrifice de son fils Isaac. Et la récompense de cette vie totalement donnée à Dieu en toute confiance lui vaudra une bénédiction éternelle.

L’Evangile de ce jour nous offre de contempler la Sainte famille de Nazareth au temple. Cette famille qui ne se veut pas extraordinaire dans son vécu se rend au temple pour présenter le petit enfant Jésus à Dieu tel que prescrit par la loi. Ils ne se dérobent pas des prescriptions religieuses. En toute simplicité et dans leur pauvreté manifestée par l’offrande d’un couple de tourterelles, offrande réservée aux pauvres, Marie et Joseph offrent à Dieu ce qu’ils ont de meilleur et de précieux : Jésus petit enfant. Jésus est donc consacré en plénitude au Seigneur dès sa naissance et toute sa vie durant sera l’expression de cette consécration. Conduis par l’Esprit Saint, le vieux Siméon et la prophétesse Anne, prophétisent et rendent grâce à Dieu pour cet enfant lumière des nations, qui sera la cause de la chute et du relèvement de beaucoup en Israël, signe de division et gloire du peuple. 

 La célébration de la Sainte Famille a toute sa pertinence en ce monde qui connait de nombreuses crises familiales. De nombreuses familles sont désunies. On assiste à un nombre de plus en plus croissant des cas de divorces, au phénomène des familles monoparentales. L’éducation familiale est aujourd’hui hypothéquée par de nombreuses théories qui mettent en mal le bien-être familial. Nos familles ont plus que jamais besoin de s’inspirer de la Sainte Famille unie dans la foi, dans la fidélité à Dieu, dans la soumission à la volonté de Dieu et dans l’amour. Ensemble Abraham et Sara, Joseph et Marie dans la foi se rendent disponibles à l’accueil de la vie. Siméon et Anne ne peuvent que rendent témoignage des merveilles de Dieu qui fait don d’Isaac et Jésus. 

Jésus, bien qu’étant fils de Dieu ne conteste pas l’ordre établit. Il suit les lois humaines. Il est docile à ses parents. Au cœur de leur famille, ils accordent la priorité à Dieu même lorsque surviennent des épreuves. Le refus de la priorité à Dieu engendre aujourd’hui dans nos familles de nombreux conflits et tensions entre les membres. Nous ne savons plus faire confiance au Seigneur devant les situations impossibles et incompréhensibles, nous ne savons plus également être ensemble comme étant fils et filles d’un même Père. Pourtant notre unité véritable se réalise en Dieu. Tournons-nous donc vers le Seigneur pour lui présenter nos familles qui ont plus que besoin de lui aujourd’hui.

Seigneur nous te présentons nos différentes familles, à l’exemple d’Abraham et Sara, de la sainte famille de Jésus, Marie et Joseph, accorde-nous d’être unis, fidèle à ta volonté, docile entre nous et confiant en toute chose. Donne-nous de savoir nous tourner vers toi afin d’accueillir ta volonté dans nos vies. Ainsi nous aurons la joie d’être uni à toi le vivant qui vit et règne pour les siècles des siècles. Amen 

 Père Bernard Dourwe, Rcj

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6 janvier 2018 6 06 /01 /janvier /2018 22:56

 

Première lecture Is 60, 1-6, Ps 71 ; Deuxième lecture Ep 3, 2-3.5-6 ; Evangile Mt 2, 1-12

Le mystère de Noel nous offre de contempler l’Incarnation du Verbe au milieu des hommes. Le Verbe fait chair se veut la lumière de toutes les nations. Par sa venue, le salut est désormais universel. Célébrer l’Epiphanie c’est célébrer la manifestation du Seigneur à tous les hommes. Le Dieu d’Israël est également le Dieu des nations païennes. Tous, juifs et païens, croyants et non croyants, sont invités à reconnaitre en Jésus le Messie. L’Epiphanie nous invite à ouvrir les horizons. Ce n’est pas seulement aux juifs que le mystère de Dieu est offert. Il n’est pas seulement pour ceux qui se reconnaissent chrétiens. Il est pour toute l’humanité. Les mages venus de l’Orient pour rendre hommage au Nouveau-né couché dans la mangeoire en sont l’expression de cette universalité du salut.

Dans la première lecture, le prophète Isaïe annonce des jours meilleurs pour Israël et pour toutes les nations. Le retour de l’exil est une Bonne Nouvelle pour tous. Les peuples sont appelées à converger vers Jérusalem la ville Sainte pour rendre grâce au Seigneur, lui qui a délivré son peuple de l’exil. Le peuple des nations, qui vivait dans les ténèbres, a vu se lever une grande lumière, et sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi. Et cette lumière brille pour tous.

Saint Paul dans sa lettre aux Ephésiens souligne également cette universalité du salut qui s’offre à tous les hommes sans aucune autre condition que la foi en Jésus-Christ. Il est venu réconcilier en lui toute l’humanité pour ne faire qu’un seul corps. Sa révélation est l’œuvre de l’Esprit au cœur des croyants, par la prédication vivante de l’Evangile. 

Dans l’Evangile, les mages qui viennent rendre hommages au Seigneur sont les représentants de toutes les nations en attente de la Révélation qui ouvre les portes du Royaume de Dieu à tous les hommes. Ces mages, assoiffés de connaitre les mystères de Dieu se mettent en route à la recherche du sens de l’étoile qui brille différemment des autres. Ils sont convaincus que cette étoile est le signe de la naissance du Roi des juifs et ils ne peuvent pas manquer d’aller lui offrir leurs présents et se prosterner devant lui. Ils vont découvrir après de nombreux efforts que cette étoile particulière indiquait la naissance du Christ au milieu des hommes. Cette étoile nous invite toujours à suivre cet exemple d’obéissance et à nous soumettre, autant que nous le pouvons, à cette grâce qui attire tous les hommes vers le Christ. Dans cette recherche, nous devons tous nous entraider afin de parvenir au royaume de Dieu par la foi droite et les bonnes actions, et d’y resplendir comme des fils de lumière. 

Désormais tout homme est appelé à se laisser éclairer par le Fils de Dieu. La rencontre avec l’Evènement Jésus doit apporter des lumières nouvelles sur notre histoire et sur notre existence. C’est pourquoi les mages, après avoir rencontré et adoré Jésus sont appelés par l’ange à prendre un chemin nouveau. Il n’est plus question pour eux de retourner dans les pratiques païennes ou de reprendre les chemins anciens. Jésus petit enfant dans la crèche a changé leur vie. Avec eux, nous devons prendre un chemin nouveau éclairé par Jésus-Christ. 

Sur ce chemin nouveau, l’autre cesse d’être une menace comme pensait le roi Hérode. Celui-ci en effet est jaloux de savoir qu’un autre roi est né. La manifestation de Dieu aux hommes est considérée par lui comme une menace, une agression à son pouvoir. Et nous savons par la suite qu’il va ordonner le massacre des enfants innocents après que les mages aient pris un autre chemin. La soif du pouvoir va le fermer au projet rédempteur de Dieu. Pourtant, la venue de Dieu au milieu des siens doit être une joie débordante, une action de grâce qui nous appelle à sortir de nous-mêmes afin d’accueillir l’universel et d’aller vers l’autre pour admirer les merveilles de Dieu œuvrant dans notre histoire.

Ces païens venus de l’Orient reconnaissant à travers leurs offrandes la divinité, la royauté et l’immortalité de ce petit enfant entre les mains de sa mère. L’or en effet est l’offrande par excellence au roi, l’encens est réservé au culte à Dieu et la myrrhe est en vue de son ensevelissement. Plus qu’un geste banale d’offrande, les mages nous permettent de découvrir en Jésus le Dieu Eternel, Roi de l’univers qui vient apporter la lumière dans nos ténèbres et nous revêtir de notre dignité d’enfants de Dieu.

Jésus-Christ Vrai Dieu et Vrai homme continue à être dans notre vie cette lumière qui brille dans nos ténèbres et nous appelle à sortir de nos ténèbres pour accéder à son admiration lumière. Nous comprenons donc pourquoi notre vocation comme chrétien est d’être lumière du monde. Car le Dieu que nous suivons est la Lumière des nations. Confions nous donc au Seigneur afin qu’il illumine nos vies.

Seigneur toi la lumière des nations qui vient éclairer tout homme et tout l’homme, toi qui a guidé les mages jusqu’à toi, nous nous tournons vers toi pour te présenter nos ténèbres et nos obscurités afin que tu daignes nous conduire à la lumière véritable. Toi qui vis et règne avec le Père et l’Esprit Saint pour les siècles des siècles. Amen.

 

Père Bernard DOURWE, Rcj

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1 mai 2016 7 01 /05 /mai /2016 10:39

INTRODUCTION

L’histoire de l’Eglise Catholique du Cameroun est riche en expérience. Arrivé au Cameroun en 1890 avec les premiers missionnaires pallottins conduits par Vieter, l’Eglise catholique est déjà présente dans tout l’étendu territorial. Elle est repartie en Cinq provinces ecclésiastiques qui se décomposent en province ecclésiastique de Yaoundé constituée de l’archidiocèse de Yaoundé, les diocèses d’Obala, Bafia, Mbalmayo, Sangmelima, Ebolowa et Kribi. La province ecclésiastique de Douala constituée de l’archidiocèse de Douala, les diocèses d’Edéa, d’Eséka, de Nkongsamba et de Bafoussam. La province ecclésiastique de Garoua constituée de l’archidiocèse de Garoua, des diocèses de Maroua-Mokolo, de Ngaoundéré et de Yagoua. La province ecclésiastique de Bertoua constituée de l’archidiocèse de Bertoua, des diocèses de Batouri, de Yokadouma, de Doumé Abong-Mbang. Et la province ecclésiastique de Bamenda constituée de l’archidiocèse de Bamenda, des diocèses de Buea, de Kumbo et de Mamfe.

Pour la bonne marche de ces diocèses et du peuple de Dieu présent au Cameroun, plusieurs figures en qualité de préfets apostoliques, vicaires apostoliques, administrateurs apostoliques, évêques auxiliaires, évêques coadjuteur, évêques diocésains, archevêques et cardinal vont marquer l’histoire de l’Eglise du Cameroun. Parmi ces figures nous nous pencherons plus précisément sur la présentation biographique de Monseigneur Thomas Nkuissi, qui a été Evêque du diocèse de Nkongsamba.

Fondé le 14 septembre 1955, le diocèse de Nkongsamba a connu Monseigneur Paul Bouque comme premier évêque, Monseigneur Albert Ndongmo comme deuxième évêque et Monseigneur Thomas Nkuissi comme troisième évêque. Qui est Thomas Nkuissi ? Que pouvons-nous dire de sa vie ? Son parcours formatif ? Les différentes charges pastorales qu’il a réalisées comme prêtre et évêque ? Quelle est sa pensée théologique ? Quels témoignages les gens qui l’ont connu en font de lui ?

BIOGRAPHIE DE MONSEIGNEUR THOMAS NKUISSI

ENFANCE ET CURSUS ACADEMIQUE

1-Enfance et jeunesse

Thomas NKUISSI DJANKOU est né le 7 juillet 1928 à Nkongsamba de NKUISSI Alphonse et de MONTHE Josépha. Il nait malade et tout le monde est convaincu qu’il ne survivra pas. C’est pourquoi il sera baptisé le même jour de sa naissance.

Nous retenons de son enfance qu’il était spécial. Son neveu Gabriel DJANKOU NKUISSI de qui nous avons pu avoir plusieurs informations sur sa vie, nous fait comprendre que déjà enfant, Thomas Nkuissi posait trop de questions sur tout ce qu’il voyait ou entendait. Il agaçait tout le monde. Ses professeurs redoutaient le moment ou en classe il devait lever le doigt. Ceux qui le qualifiaient de turbulent savaient qu’il était très intelligent, mais aussi spécialement têtu[1].

2-Cursus académique

Thomas Nkuissi va mener les études primaires et secondaires dans la ville de Nkongsamba qui l’a vu naître. Il était très intelligent et va faire preuve d’une grande capacité dans les domaines de mathématique, linguistique, poésie et plutard dans les domaines de la théologie et du Droit canonique.

Pendant plusieurs années, il enseigna les mathématiques ce qui lui vaudra d’avoir cet esprit cartésien qui rendait ses prises de position ou ses pensées difficilement attaquables.

Il avait un amour particulier pour les langues. Elève au Séminaire, il fut toujours le meilleur en latin et en grec, nous confie son neveu. La limpidité de ses propos et de ses textes en sont largement inspirés. Prêtre en Angleterre, il domina très vite l’anglais. Evêque, il développa les langues nationales (fe’e fe’e et duala). Thomas a écrit plusieurs dizaines de poèmes aux inspirations et destinataires variés. Mais c’est Pour Jésus et Marie que l’essentiel est dirigé.

Comme théologien, sa connaissance des textes bibliques était solide. Il aimait écouter, lire et enseigner la parole de Dieu dont il disait que c’est la Parole de Dieu qui sauve.

Il va faire une spécialisation en Droit Canonique et sera titulaire d'un Doctorat en Droit Canonique obtenu à Lyon en France en 1961. Il sera donc un grand connaisseur des lois et textes de l’Eglise qu’il veillait à respecter dans ses prises de positions et ses actions, ne se laissant attaqués que par ceux qui n’en avait aucune notion.

II- CURSUS PRESBYTERAL ET EPISCOPAL

1-Cursus presbytéral

Thomas Nkuissi est ordonné prêtre le 29 juin 1958 à l’âge de 30 ans pour le compte du diocèse de Nkongsamba. De 1961-1964, il est professeur au Petit Séminaire St Michel de Melong. En 1964, il curé de Baressoumtou. La même année, il va fonder la paroisse de Fraouton qu’il va administrer pendant un an car en 1965-1966, il devient directeur Diocésain de l'Enseignement. Pendant ce temps, il est Directeur Rédacteur de l'Essor des Jeunes, qu’il assumera de 1963 à 1965. En 1967, Directeur du Séminaire Interdiocésain de Bafang. Il est de 1966 à 1970, Conseiller Ecclésiastique auprès des Sœurs diocésaines. De 1967 à 1973, il est chancelier de l'Evêché et Curé de Baressoumtou, Le 29 janvier 1973, alors qu’il avait 44 ans, il est promu par le Pape Paul VI, Administrateur apostolique en lieu et place de Mgr Georges Siyam qui assurait l’intérim de Mgr Ndongmo arrêté et mis en prison depuis le 16 août 1970 par Ahmadou Ahidjo président de la République unie du Cameroun[2].

2-Cursus épiscopal

Le 15 avril 1973, il est sacré à Rome Evêque auxiliaire du diocèse de Nkongsamba par Agnelo Cardinal Rossi, Préfet de la congrégation pour l’évangélisation des peuples et les principaux co-consécrateurs étaient l’archevêque Bernardin Gantin, secrétaire de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples et Monseigneur Denis Ngande, Evêque du diocèse de Bafoussam. Il nommé Evêque Titulaire du diocèse de Luperciana[3] par le pape Paul VI. Le 15 novembre 1978, alors qu’il a 50 ans, il est nommé Evêque de Nkongsamba qu’il va diriger pendant 14 ans. Il fut intronisé évêque par Mgr Jean Zoa, archevêque métropolitain, le 28 janvier 1979.

Dans sa pastorale, le nouvel évêque reste fidèle à l'esprit du Concile Vatican II, et met en place une pastorale de proximité qui a connu un énorme succès. Toujours très proche de ses fidèles, Mgr Thomas Nkuissi visite régulièrement son diocèse en vue de créer de nouvelles paroisses et de rapprocher l'évangile des fidèles. Un accent particulier est mis sur la formation des laïcs, l'inculturation trouve une place de choix avec la promulgation des langues liturgiques du diocèse. Mais il n’aura pas une tâche facile. Jean Paul Messina souligne, en effet, l’une des difficultés majeures qu’il va rencontrer :

Mgr Thomas Nkuissi hérite d’un diocèse éprouvé dans son âme et ébranlé dans ses structures. La déchéance de Mgr Albert Ndongmo a laissé des marques indélébiles. Il faudra un bon sursaut d’audace à son successeur pour surmonter la situation. Ce ne fut pas facile, tant les blessures mirent du temps à se cicatriser. En réalité, l’épiscopat de Mgr Thomas Nkuissi fut hanté de bout en bout par l’image de Mgr Albert Ndongmo. Tout était objet de comparaison, très souvent en faveur de celui qu’on appelle ici « évêque martyr ». [4]

Face aux nombreuses difficultés auxquelles il fera face, il va démissionner de sa charge épiscopale le 21 novembre 1992 à l’âge de 64 ans au grand désarroi du peuple de Dieu. Pour assurer la continuité, Rome nomme Mgr André Wouking alors évêque de Bafoussam, Administrateur Apostolique de 1993 à 1995.[5]

III- PENSEE ET THEOLOGIE

1-Pensée

Nous connaissons la pensée de Mgr Thomas Nkuissi grâce aux différents témoignages de ceux qui l’ont côtoyé. Son neveu Gabriel Djankou Nkuissi a été proche de lui et il nous livre quelques unes de ses pensées qu’il a pu recueillir.

« Notre passé a pu être ce qu’il a été sans nous. Notre avenir ne peut pas être ce qu’il doit être sans nous.

Ne pas faire les choses comme les autres, ce n’est pas une question de plus. Ce n’est pas une question de moins. C’est une question d’autrement. Nous devons faire les choses comme nous-mêmes. Mais bien.

Nous sommes arrivés à la conviction qu’il est de notre devoir, pour que le Message s’incarne dans notre peuple, de la transposer dans des récipients bien de chez nous. Pour ce faire, nous demandons que soit reconnu incontestable notre droit de prendre nos propres options à nos risques.

Les Eglises d’Afrique confinées à regarder les autres d’en bas, doivent travailler à regarder les Eglises des autres continents d’en face.

Ce qui reste de l’œuvre d’un homme, c’est la partie que Dieu a inspirée et bénie. Rien, ni les autres hommes, ni le temps, ni aucune autre institution ne pourra l’annihiler.

Il faut continuer à croire si on est dans la nécessité. Mais surtout ne pas cesser de croire lorsqu’on a le nécessaire. Pour chaque chose que vous savez bon et bien, faites la même si vous vous croyez seul. »

Thomas Nkuissi, écrivit en 1949 parlant de lui : « ce que vous voulez Jésus. Ce que vous voulez Marie. Vous savez tout. Vous ordonnez tout. Vous nous réservez le plus beau sort. Pour moi comment exactement vous servirais-je ? Je ne sais pas. Ce que je sais c’est que vous le savez. Ce que je sais, c’est que vous avez tracé la route et je n’ai qu’à me laisser conduire. Il y aura des tunnels longs et obscurs. Mais vous connaissez la route. Je crois, j’espère, je vous aime, Jésus Marie. »[6]

2-Théologie

Homme de caractère, Mgr Thomas Nkuissi aura une approche pastorale originale.

Anticolonialiste, le nouvel évêque de Nkongsamba avait résolument opté pour l’africanisation de l’Eglise. C’est pour cette raison qu’il accordait une attention particulière au développement du clergé autochtone. Et sa disponibilité à accueillir dans son diocèse les séminaristes jugés indésirables ailleurs avait créé des dissensions avec ses confrères évêques, qui récusaient cette manière de faire comme susceptible de mettre en difficulté la coresponsabilité épiscopale si nécessaire aux Eglises locales. Peu conformiste, l’homme ne manquait pas d’ambition pour son diocèse dont il entendait promouvoir l’évangélisation en jouissant de tous les droits et prérogatives dévolus à l’évêque. Et de fait, il impressionnait par sa liberté de ton et de jugement. Pour la formation de ses prêtres, il voulut fonder un grand séminaire pour son seul diocèse. C’eût été le premier du genre au Cameroun, car tous les autres grands séminaires avaient un statut régional ou provincial. Le projet ne fut pas approuvé par Rome et ne put donc pas aboutir.[7]

Voila un homme et un Evêque que la vie n’a pas épargné. Pas même sa propre famille. Qui a vécu un vrai martyr au service de notre Seigneur. Il a accepté sans broncher de faire ce qu’on lui commandait convaincu que Seul Dieu décide de ce qui arrive à chacun des hommes. Il préférait voir dans la méchanceté des hommes, les épreuves que Dieu lui donnait de subir et les acceptaient avec foi. Il aimait la vérité et la disait sans détour.

Ceux qui combattaient l’Evêque d’action avaient bien compris l’intellectuel Thomas Nkuissi. Il voulait que l’homme africain prenne son destin en main sur les plans religieux, économique et politique sur un pied d’égalité. Car disait-il « Dieu est bon. L’esprit du Seigneur remplit l’univers. Du moment que l’eau de pluie tombe du ciel, nous ne devons pas puiser dans les rigoles. »

IV- MALADIE ET MORT

Mgr Thomas Nkuissi ne se voyait pas et ne se voulait pas mourir ailleurs que dans la ville de Nkongsamba. Cette ville qu’il aimait tant. Dieu ne lui refusa pas ce vœu si fort. Car comme fils de Nkongsamba, Thomas Nkuissi pleurait de voir la ville dépérir et rêvait -que dire- priait pour sa renaissance prochaine.[8] Il va décéder à l’âge de 83 ans dans la nuit du 16 au 17 mars 2011 aux environs de 23 heures à l’hôpital régional de Nkongsamba. On savait le prélat malade, ces derniers temps. L'ancien Evêque s'est rendu à Yaoundé pour des soins, avant de retourner à Nkongsamba où il avait regagné sa maison de retraite.[9]

Mgr Thomas Nkuissi, 3ème évêque du diocèse de Nkongsamba, a été inhumé le vendredi 25 mars dans le caveau des évêques de la cathédrale de l’Immaculée Conception où reposent déjà Mes Seigneurs Paul Bouque et Albert Ndongmo, ses prédécesseurs. Dès le coup de 10h, les carillons de la cathédrale de la cité aux sept villages (c’est ce que signifie Nkongsamba en langue mbo) se sont mis à résonner de leurs plus beaux accents, indiquant ainsi le début des obsèques de l’évêque décédé. Alors s’ébranle à partir du presbytère de la paroisse cathédrale, un impressionnant cortège d’hommes d’Eglise : une douzaine d’évêques à la suite d’une trentaine de prêtres pour l’église où va se célébrer l’Eucharistie doublée des rites d’inhumation dans la pure tradition de l’Eglise catholique. La cathédrale était bondée. Des personnalités administratives et politiques en passant par les élites du Moungo dont Maximilien Nkoué Nkongo, ancien ministre des Postes et Télécommunications sont aux premières loges pour suivre une célébration qui va durer un peu plus de trois heures d’horloge. La messe est présidée par Monseigneur Antoine Ntalou, archevêque de Garoua, aux côtés de qui se trouve entre autres le cardinal Christian Tumi. L’absoute – rite pendant lequel l’âme du défunt est recommandée à Dieu – sera faite par Monseigneur Victor Tonyè Bakot, archevêque de Yaoundé.[10]

V- QUELQUES TEMOIGNAGES SUR LA VIE ET L’ŒUVRE DE

MGR THOMAS NKUISSI

  1. Témoignage du journaliste Félix TCHUISSE

Dans la parution du journal La Colombe Auréolée N° 139 de Mars 2011, le journaliste écrit : « Depuis sa démission (forcée ?) de ses fonctions d‘Evêque du Diocèse de Nkongsamba, Mgr Thomas Nkuissi avait tôt fait de retourner dans la vie civile. Le cours de sa vie n’avait rien perdu de son sens de piété et de foi en Christ, en l’Eglise Catholique en envers les hommes. D’année en année, Mgr Thomas Nkuissi a sur le plan apparent perdu l’allure qu’on lui savait. Pourtant, il est resté égal à lui-même. Du temps où il présidait encore aux destinés de l'Eglise dans le Diocèse couvrant les départements du Moungo, du Nkam, du Haut-Nkam et de la ville de Santchou dans le département de la Menoua, Mgr Thomas Nkuissi continuait à rouler à bord de sa Renault 4. Sa solide capacité à se détacher des choses terrestres ne le liaient pas indéfiniment aux voitures de luxe ou à tous ces apparats qui semblent conférer à l'homme sa valeur. Serait-ce cet élan qui l’a poussé à ne pas se servir de ses prérogatives pour agir dans des actions relevant de la compétence sacerdotale? ... Dans l'Arche de Nkongsamba, ses apparitions publiques en culotte, chaussé de gomme ou plus grave et très réguliers encore ses déplacements assis derrière un benskin, sans peut-être pour autant qu'il s'en rende compte, semait des doutes sur la capacité de l'Eglise à honorer ses valeurs. Etait-il évident pour un étranger de s'imaginer à sa vue qu'il avait marqué la vie du Diocèse de Nkongsamba et serré la main aux grands de ce monde de par sa position? Parti affirme-t-on de l'évêché à la limite les bras ballant, il aurait refusé de rentrer en possession du véhicule mis à sa disposition par L'église?... Mgr Nkuissi Thomas a le mérite d'avoir créé la quasi totalité des paroisses du Diocèse et aussi des congrégations religieuses. Sur les voies spirituelles de Mgr Ndongmo, Mgr Nkuissi Thomas a fait un temps qu'aucun temps ne saurait effacer si ce n'est le temps de Dieu ».[11]

  1. Témoignage de l’abbé Lucien de Ndogbassi et de l’abbé Michel Olivier Tiako

En tant que berger, on retient que l’évêque de Nkongsamba ne s’est pas démarqué du Concile Vatican II et préconise une pastorale de dite de proximité qui a porté des fruits. C’est l’avis de l’abbé Lucien de Ndogpassi quand il évoque non sans émotion la mémoire de l’illustre disparu. « Il a mené une vie de pasteur remplie, il a œuvré pour l’expansion de l’évangile au sein de ce qui était alors le grand diocèse de Nkongsamba et tout au long de sa vie pastorale, Mgr Thomas Nkuissi a mis de l’emphase sur la formation des religieux et religieuses ».[12]

Pour l’abbé Michel Olivier Tiako, économe de la cathédrale de l’archidiocèse de
Douala pendant le décès de Mgr Thomas, « Il a mené une vie de pasteur remplie, se rappelle notre source, il a œuvré pour l’expansion de l’évangile au sein de ce qui était alors le grand diocèse de Nkongsamba et tout au long de sa vie pastorale, Mgr Thomas Nkuissi a mis de l’emphase sur la formation des religieux et religieuses. »[13] Ces témoignages de deux de ses filleuls nous renseignent sur sa personnalité.


3- Témoignage de son neveu Gabriel DJANKOU NKUISSI

Pour son neveu Gabriel DJANKOU NKUISSI, qui nous a permis d’avoir plusieurs informations sur la personnalité et la vie de Mgr Thomas Nkuissi, il ressort que Thomas était un homme simple « On se souvient de l’Evêque à la Renault 4. On se souvient que sa table était ouverte à tous mais garni des plats bien de chez nous. Thomas était un orateur hors pair

Il savait parler. Ses homélies étaient courues. Très souvent Les Eglises se vidaient une fois sa parole dite. Car Thomas savait dire ce qu’il voulait dire. Thomas était un homme de conviction. Toute son œuvre scientifique, depuis sa thèse de Doctorat a Lyon et tous les grandes réflexions tendaient tous à revendiquer puis à affirmer la liberté des africains à vivre leur foi et assumer leur développement par la Parole de Dieu mais authentiquement en tant qu’Africain. Thomas était un homme d’action. Dans sa longue vie, il assuma plusieurs fonctions avec zèle et efficacité : Directeur diocésain de l’enseignement, Chancelier diocésain sous Mgr Ndongmo, Rédacteur en chef de l’Essor des Jeunes. Bref Thomas Nkuissi Djankou était de ces Hommes dont Dieu a gratifiés de dons particuliers qui lui permettaient de déjouer tous les pronostics et plans humains. A sa naissance, on ne lui donnait pas un jour de vie. Il vivra 30 000 jours soit 83 ans.

CONCLUSION

Au terme de cette étude une attention particulière a été portée sur Mgr Thomas Nkuissi (7 juillet 1928 évêque du diocèse de Nkongsamba de 1979 à 1992.

Fidèle à l’esprit du concile Vatican II, Mgr Nkuissi privilégie une pastorale de proximité, qui ne lui vaudra malheureusement pas que des amitiés au sein de l’Eglise Catholique. Combattu au sommet, il démissionne le 21 novembre 1992, laissant dans la tristesse et la nostalgie une grande famille diocésaine dont il a défendu les valeurs au sein de l’Eglise : l’inculturation, la promotion d’une liturgie en langues locales et la formation des laïcs, la création de plusieurs paroisses sont les principaux acquis hérités de ce prélat auquel a succédé Mgr André Wouking (administrateur apostolique de 1993 en 1995), puis Mgr Dieudonné Watio, actuellement évêque de Bafoussam.[14] Le diocèse de Nkongsamba, à la veille du premier centenaire de l’Evangélisation du Cameroun comptait 226 304 catholiques, 21 651 catéchumènes sur une population de 635 855 habitants.[15]

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

ESSONO Aloyse Kisito Patrice,

2013, L’annonce de l’Évangile au Cameroun. L’œuvre missionnaire des Pallottins de 1890 à 1916 et de 1964 à 2010. Paris, Kartala.

2014, Monseigneur Gérard Henri VIETER. Apôtre et fondateur de l’Église Catholique au Cameroun. Yaoundé, Ifrikiya,

MESSINA Jean Paul et Jaaf Van SLAGERON, Histoire du christianisme au Cameroun : des origines jusqu’à nos jours : approche œcuménique. Amazon, Karthala, 2005.

MVENG Engelbert, L’Eglise catholique au Cameroun 100 ans d’évangélisation.1890 Album du centenaire 1990. Presso Grafiche Dehoniane

Parle Seigneur. Catéchisme national de l’Église catholique au Cameroun, 2e édition revue et corrigée. Douala, Veritas, 2011.

SAMEKOMBA André Yves, Mgr Jean-Baptiste AMA EVINA. Itinéraire d’un pasteur prophétique au service de l’Eglise 1926 – 2004, Yaoundé, éditions Diocèse d’Ebolowa et Groupe Ethique, 2014

WEBOGRAPHIE

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http://www.news.mboa.info

http://www.score2000.info

[1]

[2] http://www.leffortcamerounais.com/2011/03/nkongsamba-emeritus-bishop-mgr-thomas-nkuissi-is-dead-1.html, consulté le

[3] Cf. http://www.catholic-hierarchy.org/bishop/bnkuissi.html, consulté le

[4] Jean-Paul Messina et Jaap van Slageren, Histoire du christianisme. Des origines à nos jours, Karthala-Clé, Yaoundé, 2005, p.377

[5] http://www.leffortcamerounais.info/2006/01/sur_la_trace_de.html, consulté le

[6]http://www.score2000.info/article-temoignage-pour-monseigneur-thomas-nkuissi-eveque-emerite-de-nkongsamba-71289750.html, consulté le

[7] Jean-Paul Messina et Jaap van Slageren, op. Cit, p. 377

[8] Le 25 mars 2011 Gabriel DJANKOU NKUISSI

[9]http://www.news.mboa.info/in-memoriam-societe/fr/societe/actualite/62030,mgr-thomas-nkuissi-est-mort.html consulté le

[10] http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-3387.html, consulté le

[11] http://www.score2000.info/article-mgr-thomas-nkuissi-eveque-emerite-de-nkongsamba-au-revoir-et-a-bientot-70227235.html, consulté le

[12] http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-3282.html, consulté le

[13] http://www.cameroonvoice.com/news/article-news-3282.html, consulté le

[14] http://www.camerounexpress.com/services/services-entraide-lecteur/necrologie/2669-mgr-thomas-nkuissi-est-mort.html, consulté le

[15] Cf Jean-Paul Messina et Jaap van Slageren, op. Cit, p.378

MONSEIGNEUR THOMAS NKUISSI (7 juillet 1928 -17 mars 2011)
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18 novembre 2015 3 18 /11 /novembre /2015 23:12

Parmi les multiples congrégations religieuses au Cameroun, tout le monde attend parler des Rogationnistes du Cœur de Jésus. Qui sont-ils ? Il y a quinze ans ils sont au Cameroun, quel bilan pouvons-nous faire de leur présence dans ce beau pays ?

En effet, les Rogationnistes du Cœur de Jésus sont un Institut religieux clérical de vie apostolique de droit pontifical, fondé par Saint Hannibal Marie di Francia, un prêtre italien du Diocèse de Messine. Ordonné prêtre le 16 mars 1878, il fonda la congrégation des Rogationnistes le 16 mai 1897. Il fut béatifié le 07 octobre 1990 et Canonisé le 16 mai 2004 par le Saint Pape Jean Paul II. L’idéal chrétien des Rogationnistes se fonde sur la pastorale des vocations, sur la base des sacrées paroles de Jésus en Matthieu 9, 37-38 ou Luc 10,2 « La moisson est abondante, mais les ouvriers peu nombreux, priez donc le maitre de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson ». L’injonction Rogate-Priez est devenue le Patronyme de la congrégation. Ce commandement fait participer le Rogationniste à la vie et à la sainteté de l’Eglise ; il est la voix qui continue la prière du Christ Jésus à son Père céleste pour qu’il envoie de nombreux et saints ouvriers dans sa moisson. Cette prière a pour objet de réclamer à Dieu, de se manifester par le don des vocations nombreuses et saintes dans l’Eglise et dans la Congrégation en particulier. Dans le but d’étendre ce commandement de Jésus partout dans le monde, les Rogationnistes sont au Cameroun depuis le 28 novembre 2000.

En cette année donc, cette congrégation a la joie de célébrer ses 15 ans d’existence dans cet ilot de paix qu’est le Cameroun. Point n’est besoin de présenter la litanie de ses réalisations. Toutefois, il sied de faire remonter le temps par ce bref survol pour comprendre le sens de la célébration de cet anniversaire en invoquant ces initiateurs, sa présence au Cameroun, ses œuvres et pourquoi pas ses projets.

Sous l’invitation de Mgr Victor Tonye Bakot, alors évêque du diocèse d’Edéa, la Congrégation des Rogationnistes répondra présente en venant déposer ses valises dans le Diocèse d’Edéa le 28 novembre 2000. En effet, arrivés au Rwanda en 1978, les Rogationnistes vont aussitôt se mettre à l’œuvre dans l’Evangélisation sous l’égide de leur charisme du Rogate en se dévouant pour la prière des vocations comme étant sa pastorale sans omettre le service des nécessiteux et besogneux. Mais avec les évènements dramatiques de 1994, il fallait se trouver une nouvelle terre d’accueil plus paisible et stable. Dans cette recherche, comme par grâce, le diocèse d’Edéa était également à la quête d’une congrégation masculine car n’ayant aucune en son sein. La providentielle rencontre de deux désirs va ainsi permettre au Supérieur Général, le Père Giorgio Nalin, l’envoi du Père Wilfredo Cruz, Nicolas Villora venant des Philippines et Venuste Sibomana, venant du Rwanda, fonder une nouvelle communauté Rogationniste à Edéa.

Très vite, les Pères fondateurs de cette nouvelle présence vont se mettre au travail. Ils vont se dévouer à l’apostolat au sein du Diocèse. Le Père Vénuste sera aumônier des jeunes, le Père Nicolas (Niky) sera vicaire dominical à Bonamoukengue, le Père Wilfredo (Willy) sera chargé des vocations du Diocèse pendant onze ans, et curé à la paroisse Marie Reine de l’axe Lourd. Tous vont se vouer à l’évangélisation en donnant un coup de main efficace au Diocèse. Les nombreux démunis et nécessiteux du coin se feront parrainer afin de poursuivre leurs études. Pour pérenniser leur œuvre, dans la nouvelle communauté bâtie par eux, non loin du carrefour Kribi sur la route de Kribi, ils vont ouvrir les portes à tous les jeunes qui s’intéresseront à leur forme de vie. Ainsi, en 2004, débutera la formation des jeunes aspirants à être Rogationnistes. Depuis lors, cette maison appelée lors de sa fondation Maison de Formation Saint Hannibal Marie Di Francia mais aujourd’hui Grand Séminaire Rogationniste, a déjà accueilli onze promotions. Le premier prêtre Camerounais, issu de la première promotion est le Père Etienne Lipem, originaire de la Paroisse Christ Roi de Log-bikoï, ordonné le 31 janvier 2015. La deuxième promotion est constituée des Pères Dieudonné, Gabriel et Jean Marcel. Ils ont été ordonnés prêtre le 05 septembre 2015.

Dans le désir de permettre à ces jeunes aspirants Rogationnistes de poursuivre leur cursus formatif, le Père Vénuste Sibomana conduira la première promotion à Nkolbisson pour les études philosophiques chez les Pères Oblats de Marie Immaculée en 2005. Puis en 2006, en attendant la fin de la construction de la maison de formation à Ngoya dans la Lekié, les Missionnaires du Sacré Cœur leur feront bon accueil pour un an. Ainsi, après un temps intense des travaux de construction réalisé par l’entrepreneur Alain Assiga, en 2007, en présence du Supérieur Général le Père Giorgio Nalin, l’Evêque d’Obala, Mgr Jerôme Owono Mimboé va inaugurer la nouvelle communauté rogationniste qui portera le nom du Scolasticat Saint Hannibal Marie Di Francia de Ngoya. Le Père Vénuste est alors Supérieur et responsable des théologiens dudit scolasticat tandis que le Père Philip Leyza Golez est vice-supérieur, économe et responsable des philosophes. Les étudiants en philosophie mènent les études à l’Institut de Philosophie Saint Joseph Mukasa de Nkolbisson et ceux de Théologie fréquentent à l’Ecole de Théologie Saint Cyprien de Ngoya.

A Ngoya, les Rogationnistes vont également se dévouer à l’évangélisation : faisant la pastorale avec les enfants du village, adoptant les plus démunis et nécessiteux, aidant dans les différentes paroisses sous des formes diverses en particulier à la paroisse Ebebda où les Pères Rogationnistes sont vicaires dominicaux, les collèges en ayant toujours en esprit la dimension charismatique qui s’inspire des paroles de Jésus : « La moisson est abondante mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maitre de la moisson d’envoyer les ouvriers dans sa moisson » (Mt 9, 38 ; Lc 10, 2). Ceci dans l’esprit et l’héritage de saint Hannibal Marie Di Francia, fondateur de la congrégation des Filles du Divin Zèle en 1887 et des Rogationnistes en 1897.

A Edéa, la communauté a à présent le Père Philip Leysa Golez comme supérieur succédant au Père Wilfredo Cruz et le père Etienne Lipem, vice-supérieur de la communauté et responsable des propédeutes en succession des Pères Louis Buhuru, Philip Golez, Elisé Kabera et Venuste Sibomana. A Ngoya, le Père Wilfredo Cruz, supérieur de la quasi-province de l’Afrique, est le supérieur de la communauté de ladite communauté, succédant les Pères Isidore Karamuka et Venuste Sibomana. Le Père Eugène Ntawigenera est vice-supérieur et responsable des théologiens en succession du Père Jean Pierre Ntabwoba et le Père François Birindwa est économe et responsable des philosophes en remplacement des père Eugène, Shibu Kavunkal et Philip. Pour cette année académique 2014-2015, la communauté de Ngoya compte 16 étudiants en théologie, un stagiaire et 18 étudiants en philosophie.

Depuis un an, soit le 1er juillet 2014, la congrégation est présente dans le diocèse de Kumbo avec les Pères Saji Kappikuzhi et Jeffrey Jagurinet, le frère Zack Bertrand. En 15 ans d’existence, on ne peut s’en empêcher de rendre grâce à Dieu pour tout ce qu’il a déjà réalisé pour les Rogationnistes, avec les Rogationnistes et par les Rogationnistes au Cameroun. Il y a encore beaucoup à faire, beaucoup à dire mais en attendant, on s’abandonne à la providence en lui suppliant d’envoyer dans son Eglise de nombreux et sains ouvriers car la moisson est abondante mais les ouvriers sont peu nombreux.

Frère DOURWE Bernard, RCJ

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9 septembre 2015 3 09 /09 /septembre /2015 19:45
En ce 08 Septembre 2015, à la fête de la Nativité de la Sainte Vierge Marie, toute la Congrégation des pères Rogationnistes, la Quasi-Province Saint Joseph d’Afrique, le Scolasticat Saint Hannibal Marie Di Francia de Ngoya, les amis et familiers des confrères ont connu une joie immense ceci grâce à la profession perpétuelle des Frères Ciza Mitima Jules (R D Congo), Dourwe Bernard (Cameroun) et Harindintwari Jean de Dieu (Rwanda) en la Paroisse Saint Pie X de Ngoya.
En effet, au cour de la célébration Eucharistique présidée par le Père Wilfriedo Cruz, Supérieur Majeur de la quasi-province saint Joseph d’Afrique, en présence de nombreux prêtres concélébrant parmi lesquels les trois nouveaux prêtres Camerounais Dieudonné, Gabriel et Jean Marcel ordonnés deux jours avant, nos frères ont donné leur oui définitif à la suite du Christ au sein de la congrégation des pères Rogationnistes.
Au cours de cette célébration eucharistique, 14 frères ont renouvelés leur engagement à la suite du Christ. Encouragés par les nombreux invités venant de tous les horizons, les frères Bernard, Jean de Dieu et Jules, après un long temps de discernement au sein de cette congrégation ont fait vœux pour toujours de pauvreté, chasteté, obéissance et de montrer du zèle au commandement du Seigneur « Rogate Ergo dominum Messis ut Mittat Operios Santi in messem suam » (Priez donc le Maître de la moisson d’envoyer les ouvriers à sa moisson) Mt 9, 38 ; Lc 10, 2.
Confions-les au Seigneur afin que lui-même qui les a appelés à sa suite leur accorde la grâce de la fidélité pour la plus grande consolation du Cœur de Jésus et de Marie.
Envoie Seigneur…de Saints Apôtres dans ton Eglise !!!
VŒUX PERPETUELS DES FRERES CIZA MITIMA JULES, DOURWE BERNARD ET HARINDINTWARI JEAN DE DIEU
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6 septembre 2015 7 06 /09 /septembre /2015 22:07

DEUXIEME PARTIE : EVALUATION CRITIQUE

Etudier l’âme et le corps comme une invention de l’homme intérieur dans l’Antiquité et son renouveau dans le christianisme primitif est riche d’intérêt pour la psychologie de la religion, la psychanalyse et les autres sciences humaines telle que l’anthropologie. Mais une pareille étude fait face à de nombreuses difficultés car la psychologie de la religion reste un domaine marginal.

A-Limites d’une psychologie du Christianisme primitif

L’étude de la psychologie du christianisme primitif est d’un grand intérêt pour nous aujourd’hui dans son apport pour la psychologie et les autres domaines du savoir. Mais des limites majeures demeures : celles de l’expérimentation, des sources, de l’anachronisme. En effet, nous ne pouvons ni interroger ni observer les gens des temps passés ; nous ne pouvons qu’interpréter les sources que le hasard nous a conservées. C’est pourquoi Gerd Theissen dira que cette étude se « limite à décrire, à classer, à comprendre et à expliquer des sources qui lui sont imposées. »[1] C’est dans ce sens que nous pouvons comprendre pourquoi le professeur Jacques Philippe Tsala Tsala dira que :

La psychologie religieuse vise le fait religieux en tant qu'il se traduit par des comportements, des attitudes et des expériences subjectives. Ces données observables sont analysées avec les méthodes qui sont les siennes. Elle ne se prononce ni sur l'existence de Dieu, ni sur la valeur de la religion, ni sur la réalité de celle-ci. Elle ne justifie pas. Elle tente d'expliquer.[2]

Est-ce que dans l’Antiquité le psychisme ne fonctionnait pas de façon tout autre que de nos jours, de sorte qu’une tentative d’explication à l’aide des modèles de la psychologie d’aujourd’hui n’aurait aucun sens ? En fait, toute recherche historique est un « anachronisme contrôlé », c’est-à-dire que nous posons la plupart du temps des questions que les gens qui font l’objet de notre étude ne se posaient pas. Nous inventons même, là où nous imaginons avoir trouvé quelque chose. En voici un exemple. Pour se prémunir contre les anachronismes, une psychologie du christianisme primitif devrait commencer par une description de la conception qu’on se faisait alors de la personne et de l’âme, conception qui nous est étrangère. Notre notion de la personne comme unité est apparue au fil du temps. Dans l’Antiquité, nous rencontrons des âmes extérieures (comme le Kâ et le Bâ, en Égypte), c’est-à-dire des âmes qui peuvent déserter l’homme et mener une vie en dehors de lui comme son double. De même, nous trouvons la croyance que plusieurs âmes peuvent exister dans la même personne. L’homme n’a pas toujours eu un centre à l’intérieur de lui-même. Mais dans l’Ancien Testament et dans la philosophie grecque, ces âmes extérieures ont pratiquement disparu, et la vie intérieure a désormais un centre. L’homme intérieur a été inventé : chez les Grecs, par la subordination de toutes les forces intérieures à la raison, en Israël, par l’orientation de l’homme tout entier vers Dieu. Dans l’Antiquité, cependant, cette unité intérieure a été toujours à nouveau remise en question. Dans la littérature intertestamentaire et dans celle de l’Antiquité tardive, nous rencontrons un regain de croyance aux démons et aux forces multiples des âmes. Des puissances démoniaques et l’esprit de Dieu se disputent la souveraineté sur l’homme, qui est divisé. Le christianisme primitif est apparu dans ce monde-là avec la prétention de renouveler l’homme intérieur. C’est par le salut que l’homme doit retrouver son unité. Si nous interprétons aujourd’hui ce genre d’assertions comme la réintégration de personnalités dissociées, on pourrait encourir le reproche d’anachronisme.

Une psychologie du christianisme primitif devrait en tout cas commencer par décrire ces conceptions de l’âme et de la personne qui nous sont étrangères. Nous ne sommes pas désarmés face au risque d’anachronisme : ce qui nous est étranger, nous pouvons le comprendre en tant que tel. Le manque de sources et l’anachronisme ne sont que deux des objections qu’on peut faire à une psychologie du christianisme primitif. Mais elles ne devraient pas nous empêcher d’essayer d’élaborer une telle psychologie. Certes, l’état de la recherche est peu encourageant. Peut-on faire progresser la connaissance en décrivant, en classifiant, en interprétant et en expliquant l’expérience de vie et le comportement des premiers chrétiens ? Paradoxe ou continuité dans la conception de l’âme et du corps ? On constate qu’il y a une différence de conception anthropologique en fonction des auteurs sacrés et des sociétés.

B-Influence du dualisme platonicien

La philosophie grecque avec Platon, affirme une conception dualiste de l’âme et du corps. « Âme et corps sont comme deux substances unies, mais dont les réseaux d’activités sont séparés. L’âme est en lutte avec le corps. L’âme a ses activités autonomes, et le corps les siennes.»[3] Cette conception dualiste de l’homme va fortement influencer le christianisme primitif et laisse encore ses marques dans la pensée contemporaine.

La conception paulinienne de l’homme est fortement marquée par l’influence du dualisme platonicien. Platon en effet dans son dualisme fait une nette différence entre «l’homme intérieur et l’homme extérieur ». Dans la dynamique psychologique de l’image paulienne de l’homme, on observe l’opposition entre esprit et chair (pneuma et sarx). Cette opposition conduit à une différenciation importante entre corps et chair (sôma et sarx) : le corps est spiritualisé et la chair est démonisée et devient par là ennemie de Dieu. Platon distinguait dans son anthropologie, l’« enveloppe extérieure » de « l’homme intérieur ».[4]

Dans la dynamique des profondeurs des gnostiques, c’est seulement par la connaissance que l’homme parvient au soi véritable oublié et l’homme qui vit ici bas est l’âme extérieure exilée d’un soi véritable résidant au ciel. Cette vision gnostique traduit également l’influence du platonisme. Platon en effet dans sa théorie de la connaissance par de la réminiscence comme mode de connaissance.

Le dualisme occidental a le plus souvent dévalorisé le corps pour exalter l’âme. Comme le fait remarquer Xavier Lacroix, nous vivons dans une société qui a fortement changé de considération du corps. Le corps est sujet d’une jouissance éphémère. Ce qui entraine la banalisation de la sexualité.[5] Ce dualisme sera repris par la postérité.

Les philosophes mécanicistes (DESCARTES, HOBBES, LOCKE et HUME) laisseront déjà entendre que certaines actions tireraient leur origine de forces internes ou externes sur lesquelles nous n'avons aucun contrôle. Pour HOBBES par exemple, quelles que soient les raisons invoquées pour expliquer notre conduite, la cause sous-jacente de tout comportement est la tendance à rechercher le plaisir et à éviter la douleur.[6]

Pour Descartes à travers son dualisme, le corps de l’homme n’est qu’une participation à la nature. L’homme selon lui n’est qu’un complexe de nature et de substance pensante.

Et partant, de delà même que je connais avec certitude que j’existe, et que cependant je ne remarque point qu’il appartienne nécessairement à autre chose que ma nature, ou à mon essence, sinon que je suis une chose qui pense, je conclus fort bien que mon essence consiste en cela seul que je suis une chose qui pense, ou une substance dont toute l’essence ou la nature est de penser. Et quoique peut-être (ou plutôt certainement, comme le dirait tantôt) j’aie un corps auquel je suis très étroitement conjoint, néanmoins pour ce que d’un côté j’ai une claire et distincte idée de moi-même, en tant que je suis seulement une chose qui pense et non étendue et qui ne pense point, il est certain que ce moi , c’est-à-dire mon âme, par laquelle je suis ce que je suis, est entièrement et véritablement distincte de mon corps, et qu’elle peut être ou exister sans lui.[7]

Cette distinction n’a pas encore été totalement évacuée de la théologie classique. C’est pourquoi Joseph Comblin dira que :

La théologie n’a jamais vraiment réussi à accorder au corps toute sa valeur ni à les unir réellement. L’âme et le corps y sont comme deux quasi-substances associées par une union jamais harmonieuse. Le corps reste privé de son prestige, lié à la matière, elle aussi dévalorisée. L’âme se manifeste par la vie intellectuelle et par les actes de la volonté, c’est-à-dire la conscience. Si l’homme est image de Dieu, on pense que c’est uniquement en vertu de l’âme et de ses activités. Ce qui fait la dignité de l’homme c’est la conscience. […] le corps est conçu comme un instrument de l’âme, afin que l’âme puisse agir dans le monde. L’activité intellectuelle est séparée de l’activité corporelle ou manuelle. Le travail manuel est inferieur à la contemplation.[8]

C-Critique de la psychanalyse freudienne

La psychanalyse avec Freud s’est voulue une évacuation de Dieu qui selon lui est une illusion[9]. Dans ce sens « la psychanalyse se propose de réparer l'erreur qui a longtemps consisté à séparer l'âme du corps. Elle se veut une synthèse permettant de saisir ce qu'on pense et de penser ce qu'on ressent.»[10] Mais une analyse de la psychologie implicite présente dans les textes de l’Antiquité permet de reconnaître facilement les précurseurs de la psychologie scientifique. On observe ainsi la proximité de la psychanalyse classique de Sigmund Freud avec des auto-interprétations préscientifiques. Freud utilise à la fois le langage de l’esprit et du corps. Freud parle du surmoi, du moi et du çà pour désigner le préconscient, le conscient et l’inconscient. Or, Avec Theissen, nous avons découvert que le christianisme primitif prenait déjà conscience de cette différenciation entre les forces sujettes à notre contrôle et les forces qui nous échappent.

Freud parle également des deux pulsions de l’éros et thanathos qui sont les pulsions de vie et de morts. Dans l’antiquité, nous voyons bien que les hommes avaient déjà conscience de ces deux pulsions. C’est pourquoi Paul parlera de la chair comme conduisant à la mort et de l’esprit comme force de vie. Et même il distinguera la chair du corps. La chair est source de péché tandis que le corps nous élève vers Dieu.

Comme Paul, l’anthropologie développée par la psychanalyse s’inscrit dans une dynamique de transformation et dans une dynamique des profondeurs : l’être humain en situation de dépendance doit être rendu capable de conduire sa vie de façon responsable. Là où était le çà, le moi doit prendre place. L’inconscient doit et peut être transformé en direction du conscient.

D-L’unité de la personne humaine comme dépassement du dualisme âme et corps

Presque toutes les grandes cultures de l’humanité ont déprécié le corps humain. On l’a traité comme s’il était une prison qui retiendrait captive la véritable humanité, laquelle consiste dans les valeurs intellectuelles. L’Evangile chrétien ignore cette séparation entre le corps et l’âme, il ignore ce mépris à l’égard du corps, même si au cours de l’histoire il est arrivé souvent, presque toujours, aux chrétiens de retomber dans les déformations des autres grandes cultures. D’une certaine façon, l’on peut dire que l’homme est son corps et son corps contient tout ce qui fait sa valeur.[11] Dans le langage, « Le mot « chair » ne désigne pas le corps comme étant distinct de l’âme, mais l’homme en sa faiblesse, sa mortalité, son inclination au péché.[12]

Loin de penser à une libération finale de l’âme enfin délivrée des chaînes du corps, Paul annonce une vie éternelle dans le corps. Le corps est susceptible d’une vie éternelle. Le corps peut être spiritualisé. Le corps n’est point incompatible avec l’esprit ; au contraire, l’esprit anime le corps, il devient un avec lui. Les deux formes ensemble une seule vie commune.[13] La création du corps et de l’âme sont contemporaines et indissociables. C’est au corps et à l’âme qu’est promise la vie éternelle.[14] Dans la tradition et l’agir chrétiens, le corps occupe une très grande place. Le soin des malades, par exemple, a toujours été considéré comme très important dans les communautés chrétiennes. Ainsi, comme l’affirme Maurice Corvez : « l’âme n’est plus pour nous une réalité unie extérieurement au corps. Elle lui est immanente, ne formant avec lui qu’une seule substance, un être essentiellement un, dans la dualité de ses parties composantes. Il n’y a pas deux choses en présence, mais une seule et même réalité, dont l’âme est la forme substantielle. »[15]

Pour Emmanuel Mounier, on ne peut pas dissocier le corps de l’âme. Il y a une unité psycho-organique de l’homme :

C’est l’homme tout entier, spirituel et charnel, qui dans la vie personnelle transcende les phénomènes particuliers, expression de la solidarité organo-psychique, c’est l’homme tout entier, spirituel et charnel, qui à l’autre extrémité de lui-même s’enracine sur la force vitale, prolongement en lui de la vie animale. Cette force propulsive et créatrice, cette « hormè » qui insère chacune de nos vies dans le courant totale de la Vie, on peut la dire psychique aussi bien que biologique, pourvu qu’avec le cartésianisme on ne réduise pas le psychisme au psychisme conscient : elle est, en effet, active, sélective, créatrice, et pourvu qu’avec les mécanistes on ne croie pas le biologique épuisé par des communications de mouvements. [16]

Cette caractériologie du composé humain donne elle-même prétexte à des fixations caractériologiques qui nous expliquent plusieurs résistances. Un certain spiritualisme irritable, un certain mépris du corps tantôt fanatique, tantôt délicat, sont toujours le signe d’un ressentiment mal dominé ou gauchement sublimé. La hantise de la pureté désincarnée se greffe sur le sentiment amer d’une déficience ou d’une laideur physique, sur une sexualité déçue ou freinée dans son développement normal. On traduit simplement la faiblesse des instincts. Ces diverses impuissances donnent issue à de vielles tendances sado-masochistes, que l’adulte normalement comprime. Elles s’offrent la double satisfaction de s’idéaliser dans de nobles exaltations qui ne coûtent pas grand mal et de se décharger de leurs regrets par une agressivité bien-pensente contre ce corps malvenu qui ne leur permis ni la jouissance d’y céder ni celle de le vaincre.[17]

Les dimensions du corps de l’homme ne se réduisent pas à celles de son épiderme : l’âme n’est jamais une monade close. Quand elle est unie au corps, elle est manifestement en relation avec la totalité dont le corps n’est qu’une partie, avec ce tout qui fait l’unité du monde matériel. Elle est liée à ce monde d’une manière substantielle, qui atteint jusqu’au plus profond de la réalité. A la mort, loin d’être supprimée par la disparition de sa forme corporelle, l’âme reçoit le plein achèvement avec lequel elle embrasse désormais le monde entier. Elle ne devient pas acosmique, mais acquiert au contraire, en se libérant de son corps, une plus grande proximité, un rapport plus intime avec cette unité fondamentale du monde.[18]

E-Intérêt de la psychologie du christianisme primitif pour la psychologie des religions

Les études psychologiques menées par Gerd Theissen sur le christianisme primitif est d’une grande portée pour la psychologie des religions car la religion a une grande influence sur l’homme de telle enseigne que tout ce qu’il puisse faire est déterminé par le sentiment ou le fait religieux, le professeur Jacques Philippe Tsala Tsala ne manque pas de faire cette remarque :

Comme fait social, la religion engendre nécessairement un système d'organisation et de représentation du monde. Elle structure ce qu'elle prescrit. De sorte que toute religion a des savoirs et des pouvoirs qui, d'une manière ou d'une autre, modulent les comportements (religieux). Mais l'univers dans son ordre est souvent angoissant et menaçant. La religion tente de l'expliquer, de le légitimer, de le préserver, de l'entretenir. Dès lors, l'émergence de la religion comme objet positif de savoir apparaît d'emblée comme la manifestation du désir d'avoir prise sur elle au lieu de la subir. [19]

Tel que Gerd Theissen nous a présenté le passage de l’âme extérieure à l’âme intérieure dans l’antiquité, on peut parler d’une forme d’évolution de l’homme religieux. L’homme est passé du polythéisme au monothéisme. Et le polythéisme initial était une forme d’animisme. Et pour le professeur Jacques Philippe Tsala Tsala :

Dans son sens général, le terme "animisme" [anima= âme en latin] désigne la croyance aux âmes et aux esprits. Il se réfère à la théorie d'Edward B. TAYLOR (1832-1917) selon laquelle la croyance aux esprits représenterait la première forme historique de la religion, avant d'évoluer vers le polythéisme et le monothéisme. Mais ce cens a été abandonné par les anthropologues modernes. C'est de l'animisme que de reconnaître que quelque chose existe en l'homme et lui survit. Il est du reste possible que la croyance en l'existence d'une âme ait précédé l'idée de Dieu ou des dieux. Mais aussi, la croyance en l'existence d'un ou de plusieurs esprits habitants les êtres et les choses a pu être à l'origine de la croyance en une âme humaine. Pour l'essentiel, l'animisme est la croyance et la reconnaissance de quelque chose qui survit en l'homme.[20]

Pour les gnostiques, les hommes sont répartis par origine en trois catégories : les charnels, les psychiques et les spirituels ou pneumatiques. Quoi que fasse chacun, il suivra le destin de sa catégorie : les charnels et les corps seront perdus ; les psychiques n’auront qu’un demi-salut au niveau de l’Intermédiaire ; les pneumatiques pourront retourner dans le plérôme. La liberté de chacun n’a aucune place dans la pensée gnostique[21].

La conception que l’homme a de son corps, de l’âme et de l’esprit détermine son comportement psychologique, social et religieux. L’homme vit en fonction de sa conception de l’âme et du corps. La naissance, la croissance, l’éducation, les relations interpersonnelles, les relations avec la transcendance, les croyances sont influencées par la compréhension de l’âme et du corps. Il y a ainsi un lien étroit entre anthropologie, psychologie, religion. Les travaux de Gerd Theissen constituent ainsi un enrichissement de la recherche de la psychologie de la religion.

F-La psychologie du mythe dans l’horizon de la psychologie du christianisme primitif

Le christianisme primitif ne s’est pas totalement purifié des mythes pour désigner et expliquer les relations corps et âme. C’est pourquoi Bultman pense qu’il faut démythiser le message religieux du Nouveau Testament. Mais Jacques Philippe Tsala Tsala pense que : « Le mythe échappe à la logique. Il est irrationnel, il ne s'explique pas. Personne ne sait comment il est né. Bien qu'anhistorique il a une histoire. Il vit, meurt et renaît de ses cendres. Son image se transforme mais garde sa vérité. Aussi est-il difficile à définir. »[22] C’est ainsi que nous pouvons constater qu’il y a comme une forme d’anachronisme dans la conception de l’homme dans la conception anthropologue du christianisme primitif. C’est ce qui justifierait les différents types de « psychodynamisme » présentés par Gerd Theissen.

On a constaté en effet que l’homme est vue du point de vue éthique chez Matthieu, du point de vue sotériologique chez Jean tandis que Paul l’aborde du point de vue de transformation et le Pasteur d’Hermas comme les gnostiques vient en l’homme l’expression des forces qui l’échappent et qui ne dépendent pas de lui. L’homme est vu tantôt comme une unité dans son corps et son âme, tantôt il est vu en termes de dualisme où le corps et l’esprit sont en confrontation. L’un le tire vers le bas et l’autre vers le haut à l’instar du dualisme platonicien. Ainsi, nous pensons avec le professeur Jacques Philippe que : « La psychologie religieuse doit donc tenir compte du mythe parce que le mythe qui n'est pas mensonge est d'abord un conservatoire dynamique ouvert indéfiniment à la vérité. La psychologie des profondeurs l'utilise abondamment. »[23] Car « tout mythe qu'on tue engendre un autre mythe qui se nourrit du premier ou le restaure. »[24] C’est dans ce sens par exemple que nous avons constaté avec Gerd Theissen que la dynamique des profondeurs chez les gnostiques est liée à l’étincelle de l’âme. L’homme selon eux a oublié son soi céleste et la « connaissance » doit le lui rappeler. Cette conception n’est pas loin du platonisme qui prône la réminiscence comme mode de connaissance pour permettre à l’homme de se souvenir de ce qu’il sait déjà.

CONCLUSION

Au terme de ce travail, il était question pour nous de faire la recension du premier chapitre L’âme et le corps. Une approche psychologique de la conception de l’âme et du corps dans l’antiquité juif et grec et son renouvellement dans le christianisme primitif de l’ouvrage de Gerd Theissen intitulé Psychologie des premiers chrétiens. Héritages et ruptures. Il ressort que l’âme que le monde moderne a perdue a été inventée il y a longtemps. La réflexion des hommes sur eux-mêmes se faisait à l’origine de façon indirecte en passant par des « âmes extérieures » qui, en tant que doubles, forces de vie et esprits des morts, n’étaient pas localisées en l’homme. Les anciens faisaient l’expérience directe d’eux-mêmes en postulant l’existence à l’intérieure d’eux-mêmes d’une multiplicité de forces et d’organes. C’est grâce à l’intériorisation de l’âme extérieure seulement et au recentrement des forces intérieurs qu’est née l’ « âme » en tant qu’unité intérieure. Le chemin est long qui va de l’invention et de la découverte de l’homme intérieur jusqu'à Paul et aux gnostiques. Dans l’Ancien Testament, cela s’est fait par l’orientation totalement engagée de l’homme vers le Dieu un et unique. A l’époque intertestamentaire, elle fut renforcée par le renoncement à Satan. En Grèce, cela s’accomplit par la subordination de toutes les âmes des organes au commandement de la raison. De ce fait, s’est développée en Grèce une image cognitive de l’homme et en Israël une image volitive de ce dernier. L’homme intérieur est renouvelé dans le christianisme primitif. Après que l’Antiquité eut découvert l’ « homme intérieur », le christianisme primitif, en le renouvelant, découvrit les premiers éléments de l’ « inconscient » dans l’homme intérieur.

Nous avons pu constater l’existence de quatre modèles d’attribution des causes dans le christianisme primitif: l’homme interprète son agir soit comme hétérodynamique, c’est-à-dire comme dépendant de facteurs extérieurs tels les dieux ou les démons. Mais il peut également s’attribuer à lui-même les causes de son comportement, de façon autodynamique, lorsqu’il interprète des impulsions irrationnelles comme des affects qui lui sont intérieurs et non dépendants de l’action d’un démon. Lorsqu’il y a une différenciation temporelle de ces possibilités, on vient à une image de l’homme comprise en termes de dynamique de transformation : l’homme espère la transformation d’une hétérodynamique en une autodynamique, on craint de tomber de la détermination par soi-même à la dépendance. Lorsque la différenciation est spatiale, on vient à une image de l’homme définie par une dynamique de profondeurs : l’homme interprète sa vie comme dépendant de puissances qu’il situe à l’intérieur de lui-même, mais qu’il ne perce pas à jour et qu’il ne maîtrise pas. Ainsi la dimension éthique de l’évangile de Matthieu est l’autodynamique. Chez Jean, l’image de l’homme est hétérodynamique : l’homme doit être sauvé. L’image de l’homme chez Paul est transformative : l’homme est un passage. Et chez le Pasteur d’Hermas et dans la gnose, l’homme est perçu dans une dynamique de profondeur car certaines forces l’échappent sans qu’il puisse les maîtriser.

Loin de s’opposer, la psychologie et la religion peuvent nous renseigner sur l’homme dans sa constitution comme corps et esprit. La psychologie a besoin de la religion pour mieux comprendre l’homme et vis-versa. La psychologie de la religion, discipline nouvelle dans le champ du savoir scientifique conserve toute sa pertinence aujourd’hui dans notre contexte de la mondialisation marqué par un sécularisme qui veut évacuer à tout prix et à tous les prix l’idée de Dieu au nom de la liberté et de l’autonomie de l’homme. Cette interrogation de l’homme sur l’idée de Dieu à toute sa portée en psychologie de religion. Le professeur Jacques Philippe Tsala Tsala l’exprime en ces termes :

Il y a toujours lieu de s'interroger sur ce qui pousse l'homme à croire à une puissance invisible. Ici, le rapport à l'autre paraît fondamental dans la mesure où la religion est vécue comme relation à un tout-Autre. L'idée du divin va de pair avec la nature de la relation à autrui. Le problème est donc de savoir pourquoi l'homme est religieux. Pourquoi il fonde l'existence et la certitude sur l'absence. Pourquoi ? La question est psychologique parce qu'elle vise les motivations de la croyance et du comportement religieux. Il s'agit en réalité du problème de la nécessité de l'idée de Dieu dans la vie d'un individu ou celle d'une communauté.[25]

BIBLIOGRAPHIE

Source

Bible TOB, Cerf, Paris, 2001

Ouvrages

COMBLIN Joseph, Anthropologie chrétienne, traduit de l’espagnol par Raymond Paratta, Cerf, Paris, 1991

CORVEZ Maurice, Points chauds de la pensée religieuse moderne, Téquin Paris, 1979

DESCARTES René, Méditations métaphysiques, Deuxième méditation, Vrin, Paris, 1967

LACROIX Xavier, Le corps et l’esprit, édition Vie chrétienne, Paris, 1995

MOUNIER Emmanuel, Traité du caractère, Coll. « Esprit», Seuil, Paris, 1947

PLATON, République, Livre IX

SESBOUE Bernard, Tout récapituler dans le Christ. Christologie et sotériologie d’Irénée de

Lyon, Desclée, Paris, 2000

THEISSEN Gerd, Psychologie des premiers chrétiens. Héritage et rupture, traduit de l’allemand par Joseph Offmann, Labor et fides, Genève, 2011

TSALA TSALA Jacques Philippe, Cours de Psychologie de la Religion, syllabus en usage à ETSC-Ngoya en troisième année de Théologie, inédit

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION.. 1

PREMIERE PARTIE : L’AME ET LE CORPS : l’invention de l’homme intérieur dans l’Antiquité et son renouveau dans le christianisme primitif. 3

A- L’invention de l’homme intérieur dans l’Antiquité. 4

i- La localisation de l’âme extérieure dans l’intérieur 4

ii- Le recentrement de l’âme intérieur 5

iii- Le développement de la vision de l’homme en Israël 5

iv- Le développement de la vision de l’homme en Grèce. 6

v- Expériences religieuses modérés et extrêmes. 7

B- Le renouvellement de l’homme intérieur dans le christianisme primitif. 8

i- Autodynamisme dans l’évangile de Matthieu : l’image éthique de l’homme. 8

ii- Hétérodynamisme dans l’évangile de Jean : l’image sotériologique de l’homme. 9

iii- Dynamique de transformation chez Paul : l’image de l’homme comprise en termes de transformation 10

iv- L’inconscient dans l’image de l’homme : deux formes de dynamique des profondeurs : le refoulement du péché et du soi 12

DEUXIEME PARTIE : EVALUATION CRITIQUE.. 14

A- Limites d’une psychologie du Christianisme primitif. 14

B- Influence du dualisme platonicien. 15

C- Critique de la psychanalyse freudienne. 17

D- L’unité de la personne humaine comme dépassement du dualisme âme et corps. 17

E- Intérêt de la psychologie du christianisme primitif pour la psychologie des religions. 19

F- La psychologie du mythe dans l’horizon de la psychologie du christianisme primitif. 20

CONCLUSION.. 22

BIBLIOGRAPHIE.. 24

TABLE DES MATIERES. 25

[1] Gerd Theissen, Op. Cit., p. 15

[2] Jacques Philippe Tsala Tsala, Op. Cit., p. 5

[3] Joseph Comblin, Anthropologie chrétienne, traduit de l’espagnol par Raymond Paratta, Cerf, Paris, 1991, p. 69

[4] Cf. Platon, République, Livre IX, 588b

[5]Cf. Xavier Lacroix, Le corps et l’esprit, édition Vie chrétienne, Paris, 1995, p. 6

[6] Jacques Philippe Tsala Tsala, Op. Cit, p. 27

[7] René Descartes, Méditations métaphysiques, Deuxième méditation, § 16, Vrin, Paris, 1967, p. 32

[8] Joseph Comblin, Op. Cit., p. 69

[9] Jacques Philippe Tsala Tsala, Op. Cit, p. 32

[10] Ibidem, p. 41

[11] Cf. Joseph Comblin, Op. Cit, p. 64

[12] Cf. Ibidem, p. 66

[13] Cf. Ibidem, p. 67

[14] Cf. Xavier Lacroix, Op. Cit, p. 7

[15] Maurice Corvez, Points chauds de la pensée religieuse moderne, Téquin, Paris, 1979, p. 22

[16] Emmanuel Mounier, Traité du caractère, Coll. « Esprit», Seuil, Paris, 1947, p. 119

[17] Cf. Ibidem, pp. 120-121

[18]Cf. Maurice Corvez, Op. Cit., pp. 27-28

[19] Jacques Philippe, Op. Cit., p. 7

[20] Ibidem, p. 12

[21] Cf. Bernard Sesboüé, Tout récapituler dans le Christ. Christologie et sotériologie d’Irénée de Lyon, Desclée, Paris, 2000, p. 94

[22] Jacques Philippe, Op. Cit., p. 18

[23] Ibidem, p. 20

[24] Ibidem, p. 21

[25] Ibidem, p. 27

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25 avril 2015 6 25 /04 /avril /2015 21:37
INTRODUCTION

Du latin religare (relier) ou relegere (recueillir), la religion est une composante qui intéresse à la fois l’homme dans sa recherche de Dieu, le profane qui se démarque de la pratique religieuse et l’homme de science qui s’intéresse au sens et au fait religieux. En parlant de l’homme de science, plusieurs disciplines scientifiques côtoient la religion et le fait religieux selon les centres d’intérêts : la sociologie qui s’intéresse au fait social qu’est le phénomène religieux ; l’anthropologie qui cherche à comprendre l’homme dans son élan religieux ; la philosophie qui s’intéresse au pourquoi de la religion, la psychologie qui se penche sur le sens et les motivations de la pratique religieuse, etc. On parle ainsi de la sociologie de la religion, de l’anthropologie de la religion, de la philosophie de la religion, de la psychologie de la religion. Cette dernière qui nous intéresse (psychologie de la religion) est une discipline ressente qui doit son essor aux apports des autres sciences humaines.

Bien que ressente dans le champ scientifique, la psychologie de la religion peut nous aider à mieux comprendre les pratiques datant bien avant sa naissance. Car elle « vise le fait religieux en tant qu’il se traduit par des comportements, des attitudes et des expériences subjectives. »[1] C’est ainsi que des recherches sur les faits historiques archaïques peuvent nous renseigner sur des comportements religieux des hommes de l’Antiquité. C’est dans ce sens que Gerd Theissen va s’intéresser à la Psychologie du christianisme primitif à travers sa publication : Psychologie des premiers chrétiens. Héritages et ruptures, paru aux éditions Labor et fides en 2011 traduit de l’allemand par Joseph Hoffmann.

 Pour Gerd Theissen, « Une psychologie de la religion primitive a pour tâche de décrire l’expérience vécue et le comportement religieux des premiers chrétiens, de les classer, de les interpréter, et autant qu’il est possible de le faire, de les expliquer. »[2] Pour l’auteur, cinq idées directrices constituent l’assise de la psychologie de la religion du christianisme primitif et ces idées guident l’ouvrage : (1) l’idée que « l’invention de l’homme intérieur » aux débuts de l’Antiquité a différentié expérience vécue et comportement religieux ; (2) l’idée qu’il existe quatre expressions de la religiosité, à savoir l’expérience, le mythe, le rite et l’ethos ;  l’idée que le religieux abrite deux degrés particuliers : la religiosité normale et la religiosité limite ou extrême ; (4) l’idée que le christianisme primitif connaît deux orientations religieuses extrêmes, le radicalisme prophétique et la gnose mystique et (5) l’idée que le christianisme intègre christologiquement de nombreuses variantes de l’expérience vécue et du comportement religieux.[3]

Gerd Theissen, né en 1943, théologien protestant, professeur du Nouveau Testament à l'Université d'Heidelberg, est l'un des meilleurs connaisseurs actuels des sociétés qui ont vu naître le christianisme primitif. Il a notamment publié en français, L'Ombre du Galiléen, Cerf, 1988, Histoire sociale du christianisme primitif, Labor et Fides, 1996 et La religion des premiers chrétiens, Cerf/Labor et Fides, 2002.[4] 

Gerd Theissen aborde la question de la psychologie du christianisme primitif à travers sept chapitres. L’introduction se veut une clarification des problèmes et méthodes d’une psychologie du christianisme primitif. Le premier chapitre intitulé : L’âme et le corps est une approche psychologique de la conception de l’âme et du corps dans l’antiquité juif et grec et son renouvellement dans le christianisme primitif. Le deuxième chapitre : Expérience et expériences vécues porte essentiellement sur la dimension spirituelle du christianisme primitif. Le troisième chapitre repose sur le Mythe et la sagesse. L’auteur s’intéresse ici à la dimension cognitive de la religion du christianisme primitif.  Le quatrième chapitre quant à lui : Rite et communauté se penche sur la dimension sociale de la religion du christianisme primitif. Tandis que le cinquième chapitre Ethos et praxis se veut une réflexion sur les dimensions pratiques de la religion du christianisme primitif. Ensuite le sixième chapitre Mystique et gnose examine la transformation de la religion du christianisme primitif. Enfin le septième chapitre fait une Récapitulation et considérations finales.

Notre travail reposera essentiellement sur la recension du premier chapitre intitulé l’âme et le corps dans une approche psychologique de la conception de l’âme et du corps dans l’antiquité juif et grec et son renouvellement dans le christianisme primitif. Comment est-ce que l’âme et le corps étaient considérés dans le judaïsme et le monde grec ? Quelles sont les nouvelles considérations pour le christianisme primitif ? Comment la conception de l’âme et du corps ont évolué au cours de la période archaïque et antique ? Quelle peut être son intérêt pour la psychologie de la religion ? Quel intérêt pour la psychanalyse ? Notre étude qui se veut d’abord une recension de ce chapitre nous conduira en première partie à faire un résumé de la pensée de Gerd Theissen. Notre deuxième partie constituera un commentaire sur la question de l’âme et du corps en montrant la pertinence de l’auteur, des réserves  à la lumière des cours reçus en psychologie des religions et des auteurs qui ont abordé ces questions.

PREMIERE PARTIE : L’AME ET LE CORPS : l’invention de l’homme intérieur dans l’Antiquité et son renouveau dans le christianisme primitif.

 

Autour du VIe siècle avant J.-C, les prophètes juifs et les philosophes grecs vont s’intéresser aux comportements et à l’expérience intérieure de l’homme comme ayant une source commune à l’intérieur de l’homme. La recherche de la compréhension de l’homme à partir de sa personne va permettre la découverte et l’invention de l’« Homme intérieur »[5]. Çà sera l’inauguration de la psychologie préscientifique. Dès ce moment, les hommes cherchèrent à comprendre l’homme à partir de la psyché. Ceci passera par la distinction en l’homme des couches supérieures et inferieures.  La structure de la psyché est alors interprétée sur des modes technomorphe (l’homme comprend son corps comme l’instrument d’un organe-pilote), biomorphe (l’être humain identifie les organes de son âme comme des parties du corps) ou sociomoporhe (l’homme interprète sa vie comme la vie en réduction d’une société)[6]. Cette psychologie préscientifique va permettre dans l’histoire le développement de quatre modèles d’attribution :

  • L’être humain peut interpréter son agir de façon hétérodynamique : il croit qu’il dépend des facteurs extérieurs (de dieux, de démons ou d’autres humains).
  • L’être humain peut interpréter son agir de façon autodynamique : ici, il attribue les causes de son comportement à lui-même. Il interprète par exemple des impulsions irrationnelles comme des affects de son intérieur et non pas comme l’œuvre d’un esprit ou d’un démon qui a pris possession de lui.
  • L’être humain peut interpréter son agir à partir d’une dynamique de transformation : l’homme attend qu’une modification profonde de la structure pulsionnelle qui le régit se produise dans le temps. Dans sa situation de départ, il se voit dépendre de facteurs extérieurs ; mais il espère devenir la cause de son comportement grâce à une transformation intérieure.
  • L’être humain peut enfin interpréter son agir à partir d’une dynamique de profondeur : il interprète sa vie comme dépendant de puissances qu’il ramène à son monde intérieur dont il ne maitrise pas tous les contours.[7]

Ces différentes approches psychologiques du comportement humain de l’Antiquité vont être précurseurs de la psychologie scientifique.

 

  • L’invention de l’homme intérieur dans l’Antiquité

L’invention de l’homme intérieure dans l’Antiquité s’est réalisée de manière progressive. L’homme a voulu se connaître et se comprendre dans son intériorité et son extériorité. Il va donc découvrir l’âme comme centre unifié à l’intérieur de lui-même. Mais pour y arriver l’homme va concevoir l’âme comme étant localisée soit à l’extérieure soit à l’intérieur de lui. On parlait alors dans les temps archaïques de « l’âme extérieure »[8] une âme extérieure était attribuée à l’être humain là où il était accompagné par une force vitale distincte de lui. Les Romains connaissaient le genius d’un homme, les Grecs le daimon qui protège. Cette âme extérieure continue de vivre dans la croyance actuelle dans l’ange gardien. Elle est localisée à l’extérieur de l’homme.[9] Elle est comme un miroir qui permet à l’homme de pouvoir se découvrir.

Lorsque l’âme est localisée à l’intérieur de l’homme, elle peut le quitter. Elle est l’âme voyageuse dans le rêve ou dans l’extase durant la vie. C’est le soi qui peut se dissocier lorsque l’homme meurt. On note une dissociation entre l’âme intérieure et l’âme extérieure. On rencontre cette dissociation en Egypte et en Grèce.

  • La localisation de l’âme extérieure dans l’intérieur

En Egypte, la personne de l’homme se différencie selon son rapport à son corps et à la société car elle n’est pas vue comme une unité. L’homme est doté d’un soi corporel appelé Ba (identique à l’âme libre). Il quitte la personne au moment du trépas, et un soi social appelé Ka[10]( il représente le pouvoir et le prestige d’un être humain dans la société). Le centre de l’homme se situe dans le cœur. L’homme est dirigé par son cœur. Au jugement de mort le cœur est pesé. Israël va partager avec l’Egypte cette conception du cœur comme centre de l’homme.

Dans la Grèce ancienne, l’homme ne fait pas l’expérience de lui-même comme d’une unité. La personne est dissociée en plusieurs centres. Mais la quête d’un centre de la personne, localisé dans une partie du corps, va donner naissance à deux courants de pensée : les uns avec Platon cherchèrent à localiser le centre de la personne dans la tête et les autres avec Aristote vont localiser le centre dans le cœur.[11] Un premier pas en direction de l’unité de l’âme fut franchi lorsqu’on déplaça vers l’intérieur les représentations du moi considéré comme une âme extérieure.

  • Le recentrement de l’âme intérieur

La réflexion de l’homme sur lui-même se manifesta d’abord par la représentation d’un soi qui se dissocie en âme extérieure. Ensuite, l’homme va progressivement, aux temps archaïques concevoir l’âme comme faisant partir du corps dans la multiplicité des membres où chaque partie aura une âme. Après, il cherchera un chemin de l’unité des âmes en considérant que tous les âmes se référent à un centre. « À côté de l’intériorisation de représentations extérieures de soi, c’est ce recentrement d’âmes intérieures multiples surtout qui forgea l’identité de l’être humain et dessina une architecture différenciée à l’intérieur de lui-même. »[12] Les égyptiens localisaient l’âme au niveau du cœur, tout comme les juifs qui, en plus vont souvent désigner l’âme par le mot nefesh qui désigne la gorge. L’âme est par là une force vitale. Les grecs vont connaître deux courants à propos : un groupe qui localise l’âme au cœur et l’autre qui situe le centre de l’âme au cerveau. Mais tous à l’antiquité considéraient l’âme comme une matière fine ou un esprit qui pénétrait le corps. C’est seulement Augustin qui, dans De Trinitate 10, va concevoir l’âme comme immatérielle et sans extension.[13]

Le pas en direction de l’unité du moi va donc être franchi par le passage de l’âme extérieure vers l’intérieur et le passage de l’âme plurielle interne à l’âme centralisée à l’horizon du VIe siècle avant J.-C. Mais l’intériorisation de l’âme extérieure n’a jamais été totale car l’homme se sait toujours être influencé par les puissances extérieures.

 

  • Le développement de la vision de l’homme en Israël

En Israël, le centre de l’homme intérieur est le cœur (lebad). Le cœur est « le lieu de la connaissance, du vouloir et du sentiment. La joie, le courage et la connaissance trouvent là leur origine. »[14] Le cœur est donc pour les israélites le centre de toutes les activités de l’homme même de ses motivations car c’est le centre de la personne. On va trouver dans les psaumes la description des « névroses du cœur »[15] : « Mon cœur se crispe dans ma poitrine ; des frayeurs mortelles sont tombées sur moi, crainte et tremblement me pénètrent, et je suis couvert de frisson » (Ps 55,5-6).

A côté du cœur, l’Ancien Testament va aussi développer d’autres organes de l’âme. La colère et la fureur sont souvent liées au nez (af) (Jg 14,19). Le sein maternel et les entrailles (raham) sont le lieu de la miséricorde (Es 49,15). Les reins sont liés à une douleur poignante (Jb 16, 12-13). Ce sont aussi les organes de la conscience et des remords (Ps 7, 10 ; Jr 11, 20). « À cette architectonique référée à un centre s’ajoute une dynamique comportant deux forces élémentaires : l’âme (nèfèsh) et l’esprit (rouah) »[16] l’âme (nèfèsh) est le souffle qui vient de l’intérieur de l’homme tandis que l’esprit (rouah) est le vent qui vient de l’extérieur. L’âme demeure dans le corps et ne le quitte que lors de la mort tandis que l’esprit est un don de Dieu à l’homme qui fait un avec lui.[17] Il n’est lié à aucun organe dans le corps. Toutefois, l’âme et l’esprit sont synonymes dans certains cas.

Dans l’Ancien Testament, le monde intérieur est encore constitué d’un grand nombre de parties et d’énergies, même si le cœur est toujours davantage considéré comme le centre personnel de l’être humain.[18] L’unité de l’homme est réalisée moins par un recentrement à l’intérieur de lui que par une orientation de tous les organes et de toutes les forces vers le Dieu un et unique (Dt 6, 4). En plus du monothéisme, l’unification de la personne est favorisée, bien plus tard, par la naissance d’une foi en une survie au-delà de la mort[19] qui rend le centre de la personne indépendant du corps corruptible et par le dualisme Satan/Dieu qui exige de l’homme une décision fondamentale.[20] Ainsi, toutes les traces d’une âme extérieure et libre vont disparaître. La volonté mauvaise est attribuée à une puissance extérieure à l’homme.

  • Le développement de la vision de l’homme en Grèce

Le développement de la vision de l’homme en Grèce est en majeur partie influencé par la philosophie. On note particulièrement l’influence de Platon et Aristote. Chez Platon, l’âme reproduit de façon sociomorphe la stratification de la société. De même que la société consiste en une hiérarchie de souverains, de guerriers et de travailleurs, l’intérieur de l’homme consiste en une hiérarchie formée par la raison (logistikon), la volonté (thymoeidès) et le désir (epithymetikon) (République 4, 437b). Cette architectonique intérieure est localisée dans la tête, la poitrine et le ventre. Le désir et la volonté sont dépréciés et considérés comme relevant de l’animalité. Au dessus d’eux se tient l’esprit qui est l’homme intérieur et doit dominer. L’esprit se nourrit de la connaissance et de la sagesse. Chacune des couches possède une vertu qui lui est propre ; la sagesse pour les souverains, le courage pour les guerriers et la tempérance pour les travailleurs. La justice consiste dans le fait que chacune de ces couches entretiennent des justes rapports les unes avec les autres. Le corps représente la prison de l’âme. L’âme est immortelle. Elle est préexistante et se défait du corps à la mort pour retourner au monde des idées.

Tandis que Platon exerce son « gouvernement de l’âme » à travers des niveaux de l’âme référés à chaque fois à la vertu qui correspond, Aristote définit en outre chaque vertu comme une réalité intermédiaire entre deux extrêmes et élargit ainsi le domaine de la responsabilité ; le courage n’existe pas tout seul, mais une responsabilité qui consiste à trouver la juste mesure entre lâcheté et présomption. De même, les pulsions en l’homme doivent être façonnées et trouver leur forme.

La philosophie grecque est demeurée attachée au fait que l’homme doit et peut mener une vie guidée par l’intelligence. Le mal et le bien sont alors interprétés de façon autodynamique : ils sont ramenés à une cause intérieure à l’homme[21].

 

  • Expériences religieuses modérés et extrêmes

Avec l’invention de « l’homme intérieur », une frontière fut établie entre intérieur et extérieur. Les interventions venues de l’extérieur deviennent de plus en plus des processus dramatiques, qu’il s’agisse de la possession ou de l’extase. Ils ne représentent plus la normale, mais quelque chose de menaçant ou de libérateur. De même, l’expérience vécue et le comportement religieux eux-mêmes se répartissent ainsi bien davantage entre les processus religieux modérés à l’intérieur des limites du moi d’un côté, et de l’autre des processus religieux extrêmes dans lesquels ces frontières sont franchies.[22] Il s’est élargi dans la culture juive et grecque le domaine que l’homme peut façonner selon sa volonté et son jugement. Le monde marqué par la normalité est celui de la Torah et de la loi, de la sagesse et de la philosophie. En même temps, les « irruptions » dans ce monde prennent un tour plus dramatique. Elles menacent les hommes dans leur identité et dans leur salut, mais elles créent aussi du salut sans intervention humaine lorsque des puissances bonnes manifestent leurs effets dans la vie. Les expériences religieuses à l’intérieur du monde familier se distinguent alors de plus en plus clairement d’expériences religieuses extrêmes dans lesquelles le monde se trouve fissuré.[23]

 

 

  • Le renouvellement de l’homme intérieur dans le christianisme primitif

Le christianisme primitif est un renouvellement extrême de l’homme intérieur. L’homme doit donner désormais un sens à sa vie en étant responsable de lui-même. A l’époque postérieure à l’Ancien Testament, il y a une remythisation de l’homme intérieur où il apparait comme un champ de bataille entre Dieu et Satan. L’image de l’homme intérieur renouvelée du christianisme primitif n’est pas homogène, nous trouvons une vision de l’homme référée à l’éthique et à la rédemption. L’image éthique de l’homme se réfère à des expériences du monde quotidien, l’image sotériologique à des expériences de ruptures qui le font éclater. L’image éthique de l’homme se forge à partir d’une tendance autodynamique et considère l’être humain comme déterminé par sa propre volonté ; l’image sotériologique de l’homme se dessine à partir d’une tendance hétérodynamique qui subordonne le salut à l’agir de Dieu. L’évangile de Matthieu construit une vision éthique de l’homme, l’évangile de Jean une vision sotériologique. Paul propose une « synthèse » sous la forme d’une conception de l’homme dans les termes d’une dynamique de transformation. Grâce à l’agir de Dieu, l’homme se transforme de façon telle qu’il peut à nouveau déterminer sa vie lui-même. Certes il a perdu son libre arbitre (Rm 7, 7), mais il n’en n’est pas moins appelé à la liberté (Ga 5, 1.13). En même temps s’amorce chez Paul une vision de l’homme dans les termes d’une dynamique des profondeurs : à l’intérieur de lui-même l’être humain est déterminé par des forces qu’il ne perce pas à jour et qui se soustraient à son empire ; mais elles aussi, il doit les intégrer dans sa vie. Le Pasteur d’Hermas aura aussi cette approche du dynamisme des profondeurs.[24]

  • Autodynamisme dans l’évangile de Matthieu : l’image éthique de l’homme

Chez Matthieu comme chez Jean, c’est l’image du Christ qui est centrale et non celle de l’homme. C’est à partir de lui que se construit des visions anthropologiques différentes.

L’Evangile de Matthieu commence par présenter par une généalogie Jésus comme le roi légitime issu de la tribu de David. Comme roi, Jésus ne libérera pas le peuple des mains des ennemis, mais des péchés (Mt 1, 21). Jésus inaugure sa seigneurie en tant que fils de David qui guérit par des miracles et c’est seulement à la fin de l’évangile qu’il proclame sa seigneurie sur le monde (Mt 28, 18). Il ne règne pas en s’appuyant sur une armée, mais seulement par son enseignement éthique. Tous les peuples doivent devenir des adeptes de son enseignement et obéir à ses commandements. Il offre une interprétation juste et humaine de la loi.[25] Matthieu subordonne le salut à des règles éthiques minimales : nourrir ceux qui ont faim, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, etc. (Mt 25, 35-36), et en outre pardonner à autrui parce que chacun est placé sous le pardon de Dieu (Mt 6, 14 ; 18, 23-35).

L’image de l’homme est lumineuse. Les disciples sont appelés à être la lumière du monde (Mt 5, 14). Ils doivent être un exemple pour tous grâce au potentiel qui est en eux : « la lumière du corps, c’est l’œil « si donc ton œil est sain, ton corps entier sera lumière. Mais si ton œil est malade, ton corps tout entier sera dans les ténèbres. » (Mt 6,22-23). L’œil est compris ici comme une source de vive lumière.[26] La lumière des paroles de Jésus et des actions bonnes illuminent le monde.

L’évangile de Matthieu a une vision éthique dont la coloration est positive, est « autodynamique ». Cet autodynamisme éthique culmine chez Matthieu dans le Sermon sur la Montagne. Le thème de la détermination de soi marque de différentes manières ses trois parties principales. Les antithèses (Mt 5, 21-48) proclament la liberté vis-à-vis de la tradition et des affects. Dans celles-ci, un moi souverain s’engage à surmonter des affects agressifs et sexuels là où ils conduisent à empiéter sur autrui, par exemple à maudire quelqu’un ou à désirer une femme mariée. Les règles de piétés (Mt 6, 1-18) proclament la liberté par rapport au contrôle social : la justice qui est meilleure doit être accomplie indépendamment du fait d’y acquérir des considérations et la parénèse sociale (Mt 6, 19-7, 11) : l’homme doit manifester sa souveraineté en se libérant des liens matériels et sociaux. Il doit surtout affirmer une liberté intérieure par rapports aux biens[27]. Ainsi, l’autodynamisme de l’agir éthique apparaît surtout, avec le Sermon sur la Montagne, dans les relations interhumaines.

  • Hétérodynamisme dans l’évangile de Jean : l’image sotériologique de l’homme

L’évangile de Jean  présente une image du Christ toute différente de celle de Matthieu et, en conséquence, une autre vision de l’homme. Jésus est depuis le commencement le créateur de toutes choses, le sens et le « logos » dans tout ce qui existe et qui vit. Tout à sa vie en lui (Jn 1, 1 ss.). C’est lui qui met les hommes en relation avec Dieu. Il leur fait don de la vie éternelle qui consiste à connaître le seul vrai Dieu et celui qu’il a envoyé (Jn 17, 3). Jésus réclame aux hommes la foi, la connaissance et la pratique du commandement de l’amour  pour devenir « enfants de Dieu ». Observer le commandement de l’amour signifie demeurer dans l’amour sauveur de Dieu.[28] Le commandement éthique central est revêtu d’un statut sotériologique. L’image de l’homme est soumise dans l’évangile à une orientation hétérodynamique : l’homme est déterminé depuis l’extérieur. Même ce qui semble être sa propre décision est soumise à la volonté antécédente de Dieu : « Nul ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire » (Jn 6, 44).

On trouve rarement dans l’évangile de Jean une anthropologie autonome. « Tout est concentré autour de l’évènement christique. »[29] Même en parlant du corps dans l’évangile, il s’agit du corps de Jésus mis en mort. Chez Jean, le corps (soma) est lié à la mort. Tandis que la chair (sarx) est liée à la vie : Jésus reçoit de Dieu le pouvoir sur toute chair (Jn 17, 2). Jésus se fait chair pour donner la vie aux hommes (Jn 6, 51). La consommation de la chair et du sang du fils de l’homme donne la vie (Jn 6, 52-58). Cette vie humaine apparaît souvent sur la forme dualiste. La chair est opposée à l’esprit. Les hommes sont engendrés par « la chair et le sang » et doivent naître à nouveau de Dieu (Jn 1, 13).

  • Dynamique de transformation chez Paul : l’image de l’homme comprise en termes de transformation

Paul identifie deux visions de l’être humain : l’une éthique qui attribue à l’homme la responsabilité de son agir et l’autre physique qui stipule que l’homme ne peut faire du bien qu’en vertu d’une transformation physique. La dimension éthique est globale tandis que celle physique est dualiste.[30] Comme chez Matthieu, Paul connaît lui aussi deux degrés qui traduisent la trajectoire de Jésus : Jésus est « issu selon la chair de la lignée de David, établi, selon l’Esprit de sainteté, Fils de Dieu avec puissance par sa résurrection des morts » (Rm 1, 3-4). Pour Paul, Jésus, comme Messie, ne sauve pas Israël de ses ennemis tel un nouveau David, mais il libère tous les hommes du péché, de la loi, et de la condition d’être périssable.[31] L’homme  au lieu d’être dominé par la chair doit être saisi par l’« esprit » divin. L’homme par nature, en tant que « chair » est ennemi de Dieu. Avec l’évangile de Jean, Paul partage l’idée d’une rédemption qui transforme l’homme. Chez Paul nous sommes en présence d’une synthèse. C’est ce qui apparaît dans sa vision de l’homme que nous pouvons dégager de façon indirecte à partir des notions psychologiques de psychè, pneuma, nous, kardia, syneidesis, sôma, sarx, eso anthropos, exo antropos.[32]

 

  1. L’image unitaire de l’homme chez Paul

Chez Paul, à la suite de la tradition biblique, le cœur (Kardia) est le centre de la personne humaine, le lieu de l’obscurcissement et du péché (Rm 1, 21 ; 2,5) mais également le lieu de l’illumination (2 Co 4, 6), de l’amour (Rm 5,5)  et de la foi (Rm, 10, 9).[33] La vie humaine est animée par une énergie unitaire. L’intelligence (nous) et la conscience (syneidesis) forment le sujet qui comprend et qui juge (moralement) (Rm 7, 23 ; 12,2). L’âme (psychè) est la force vitale dans son ensemble et le sujet vivant (1 Co 15, 45). L’esprit (pneuma) est du point de vue anthropologique l’esprit de l’homme en tant que sujet conscient de lui-même (1 Co 2, 11).[34]

Les notions de « corps » et de « chair » (sôma et sarx) appartiennent chez Paul à l’« architecture » unitaire de l’homme. Elles désignent sa nature biologique sous l’aspect de sa vocation mortelle aussi bien que sous l’aspect des pulsions qui l’habitent. Le corps (sôma) est l’homme passif et périssable, comprise de façon négative comme corps du péché et de la mort (Rm 6,6 ; 8, 13), de façon positive comme corps sauvé : du point de vue éthique comme corps qui agit (Rm 12,1), du point de vue ecclésiologique comme Corps du Christ (1 Co 12, 12 ss), du point de vue eschatologique comme corps ressuscité (1 Co 15,37.44).[35] Il en résulte chez Paul un appel insistant à la responsabilité de l’homme car l’homme doit décider comment il use du sôma et de la sarx.[36]

  1. L’image dualiste de l’homme chez Paul

L’image dualiste de l’homme, est comprise chez Paul en termes de transformation. L’esprit (pneuma) est théologiquement et de façon transpersonnelle l’Esprit de Dieu qui est donné comme un équipement permanent (1 Co 12, 1 ss.) et qui dans certaines situations, saisit la personne comme une force irrationnelle (1 Co 14, 1 ss.). La chair (sarx) désigne l’homme, actif et corruptible, et qui vit selon la chair (Rm 8, 12) parce que la « chair » est inimitié active vis-à-vis de Dieu (Rm 8, 7). Rarement elle est de façon positive un lieu paradoxal de la révélation (2 Co 3,3 ; 4,11). Sarx désigne l’énergie en l’homme qui doit être réprimée, les pulsions et les impulsions dans l’homme que Dieu ne peut pas prendre à son service. Sôma par contre désigne l’énergie susceptible d’être sublimée par Dieu, la dynamique de l’homme qui peut être mise au service de Dieu[37]. Si la chair est condamnée à mourir, le corps est rendu vivant par l’Esprit.[38] La chair doit être vaincue.  Il y a opposition entre l’homme extérieur et l’homme intérieur. L’homme extérieur (exo anthropos), c’est l’homme ancien, l’homme terrestre (1 Co 15, 49). Cet homme va vers sa ruine. Tandis que l’homme intérieur (eso anthropos) c’est l’homme nouveau, l’homme céleste (1 Co 15, 49). L’homme est appelé à effectuer une transformation  à travers le passage de l’homme ancien à celui de l’homme nouveau.[39] C’est pour Paul la transformation des énergies naturelles de la sarx en énergies positives dans le sôma.[40] La force transformatrice est l’Esprit de Dieu qui devient en l’homme une force de la vie renouvelée.

  • L’inconscient dans l’image de l’homme : deux formes de dynamique des profondeurs : le refoulement du péché et du soi

Dans le christianisme primitif, la découverte d’une dynamique des profondeurs en l’homme s’exprime souvent par l’intermédiaire d’un langage mythologique. Ce qui est caché en l’homme est perçu comme un esprit mauvais ou un ange gardien. Ce qui demeure dans l’inconscient fait l’objet d’évaluations différentes.[41] On retient ici celle de Paul qui parle de la transcendance de la chair et de l’esprit, celle du Pasteur d’Hermas qui parle du péché refoulé et celle de la gnose qui parle du soi véritable oublié.

 

  1. Dynamique des profondeurs chez Paul : la transcendance de la chair et de l’esprit

Nous trouvons chez Paul une dimension inconsciente qui englobe aussi bien des impulsions opposées aux normes que la force pour les surmonter. Aussi bien le péché que le soi véritable touchent à des profondeurs et à des hauteurs inconscients. Les trois notions anthropologiques importantes, pneuma, sarx et sôma, ont chez lui une dimension transpersonnelle à côté d’un aspect personnel. Ils ouvrent l’homme à quelque chose qui vise au delà de lui. Des puissances extérieures interviennent à l’intérieur de lui. Mais chez Paul, ces puissances n’interviennent pas de façon mythique comme les anges et démons. Il les considère comme une dimension en l’homme qui est au-delà de sa conscience et de ce dont il peut disposer, et qui pourtant fait partie de lui. Ce qui dans son image du monde aurait pu être présenté également comme une puissance mythique (et qui parfois présenté ainsi) ; il le décrit avec les notions anthropologiques en attribuant à celles-ci une dimension de profondeur inconsciente.[42]

La dimension transpersonnelle de la vision paulienne de l’être humain  apparaît le plus clairement à propos de la notion d’ « esprit » (pneuma) mis en relation avec la notion de « chair » et de « corps ». Le rapport de l’esprit à la chair est négatif, les deux s’excluent mutuellement. Là où œuvre l’esprit, la chair ne peut pas dominer[43].

  1. Dynamique des profondeurs dans le Pasteur d’Hermas : le péché refoulé

Au Ier siècle de l’ère chrétienne, Paul gardait bon espoir que les hommes seraient transformés par l’Esprit Saint. Hermas au IIè siècle constate que les chrétiens baptisés restaient le plus souvent des hommes imparfaits, alors qu’ils auraient dû être parfaits. Il résout ce dilemme en annonçant qu’une deuxième chance existe pour tous les chrétiens baptisés : ils ont le droit de se convertir encore  une fois, quand bien même le principe selon lequel la conversion est unique et définitive est maintenu.[44] Pour Hermas, il existe des dimensions inconscientes du péché. Il existe l’Esprit bon et l’Esprit mauvais tout comme il existe l’ange bon et l’ange mauvais. L’ange agit par les idées qui montent dans nos cœurs. Et on reconnait l’ange à travers les actes que nous posons. L’ange du bon conduit aux actes vertueux et l’ange mauvais conduit aux vices.[45]

  1. Dynamique des profondeurs dans la gnose : le soi véritable oublié

Pour les gnostiques au IIème siècle, l’homme est une étincelle perdue de la lumière divine qui a oublié son origine et qui doit être réunie à nouveau à son soi véritable. On peut alors voir facilement que le soi oublié des gnostiques est l’« âme extérieure » de l’homme, son soi qui peut se dissocier. Cette âme extérieure est le soi céleste que l’homme a oublié ou refoulé, le noyau de son existence. L’existence terrestre est l’âme extérieure perdue du soi céleste. L’homme est une idée de Dieu qui s’est perdue dans ce monde et que Dieu va chercher pour la faire revenir dans sa patrie céleste.[46] C’est seulement à travers la connaissance qu’il peut se rappeler ce qu’il a oublié. Selon Valentin, l’un des représentants du courant gnostique, le soi véritable est l’« âme extérieure » de l’homme. C’est le soi le plus élevé de l’homme qu’il doit se le réapproprier par la gnose[47].

 

[1] Jacques Philippe Tsala Tsala, Cours de Psychologie de la Religion, syllabus en usage à ETSC-Ngoya, inédit, p.5

[2] Gerd Theissen, Psychologie des premiers chrétiens. Héritages et ruptures, Labor et fides, Genève, 2011, p. 593

[3] Cf. Ibidem, p. 33

[4] Cf. Ibidem, Quatrième de couverture de livre

[5] Ibidem, p. 53

[6] Cf. Ibidem, p. 53

[7] Cf, Ibidem, p. 54-55

[8] Ibidem, p. 56

[9] Cf. Ibidem, p. 56

[10] Cf. Ibidem, p. 58

[11] Cf. Ibidem, p .59

[12] Ibidem, p. 60

[13] Cf. Ibidem, p. 61

[14] Ibidem, p. 63

[15] Ch. Frevel/ O. Wishmeyer, Menschsein, 2003, pp.32-34, cité par Gerd Theissen, Op. Cit. p. 63

[16] Ibidem, p. 64

[17]Cf.  Ibidem, p. 65

[18]Cf.  Ibidem, p. 66

[19] Cf. Ibidem, p. 67

[20]Cf. Ibidem, p. 69

[21]Cf.  Ibidem, pp. 70-71

[22] Cf. Ibidem, p. 72

[23] Cf. Ibidem, p. 73

[24] Cf. Ibidem, p. 74

[25]Cf.  Ibidem, p. 76

[26] Cf. Ibidem, p. 76

[27] Cf. Ibidem, p. 77

[28] Cf. Ibidem, p. 79

[29] Ibidem, p. 80

[30] Cf. Ibidem, p. 82

[31] Cf. Ibidem, p. 82

[32] Cf. Ibidem, p. 83

[33] Cf. Ibidem, p. 85

[34] Cf. Ibidem, p. 85

[35] Cf. Ibidem, p. 86

[36] Cf. Ibidem, p. 89

[37] Cf. Ibidem, p. 98

[38] Cf. Ibidem, p. 93

[39] Cf. Ibidem, p. 90

[40] Cf. Ibidem, p. 99

[41] Cf. Ibidem, p. 103

[42] Cf. Ibidem, p. 104

[43] Cf. Ibidem, p. 105

[44] Cf. Ibidem, p. 111

[45] Cf. Ibidem, p. 112

[46] Cf. Ibidem, p. 114

[47] Cf. Ibidem, p. 115

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17 janvier 2015 6 17 /01 /janvier /2015 16:47

LA SAINTETE DE SAINT HANNIBAL MARIE DI FRANCIA

Introduction : Qu’est-ce que la sainteté ?

Les sources scripturaires

La vocation à la sainteté trouve sens et source dans l’auto-communication de Dieu à l’homme. Depuis l’Ancien Testament, Dieu est défini comme étant essentiellement Saint et il veut partager sa sainteté avec l’homme (Lv 19, 2). Ce dernier pour y répondre doit mener une vie conformément aux exigences divines. Ces exigences se résument dans le commandement d’amour de Dieu et du prochain.

Le Seigneur Jésus maitre et modèle de toute perfection, a prêché la sainteté de la vie, dont lui-même est l’auteur et qu’il conduit à son achèvement, à tous et à chacun de ses disciples, quelque soit sa condition : « soyez donc parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Mt 5, 48). Il envoya à tous le Saint Esprit qui les incite intérieurement à aimer Dieu de tout leur cœur, de toute leur âme, de tout leur esprit et de toutes leurs forces (Mc 12, 30), et à s’aimer les uns les autres comme le Christ les a aimés (Jn 13, 34)[1]

Les sources magistérielles

L’Eglise à travers son magistère a toujours encouragé les hommes à répondre fidèlement à cette noble vocation des enfants de Dieu. L’histoire de l’Eglise ne saurait nous démentir sur tous les moyens que l’Eglise n’a cessé de mettre en œuvre pour aider les hommes à parvenir à leur réalisation en Dieu. Plusieurs conciles, synodes, consistoires etc. sont revenus à maintes reprises sur ce thème. L’un des conciles fort évocateur est le Concile Vatican II. A travers la constitution dogmatique Lumen Gentium qui traite de la vie de l’Eglise, le magistère enseigne que la vocation à la sainteté est la vocation fondamentale et unique de tous les chrétiens. Pour y parvenir plusieurs chemins sont offerts : la vocation à la vie matrimoniale, la vocation à la vie sacerdotale/ religieuse. Ce second chemin est marqué essentiellement par la consécration à Dieu en vue du Royaume des cieux dans la recherche de la plus grande gloire de Dieu et le salut de tous les hommes. C’est dans cette voie que Saint Hannibal va glorifier Dieu et sauver son prochain dans une sanctification quotidienne, continuelle, croissante, constante, dynamique et va nous ouvrir ainsi un chemin nouveau de sanctification dans la sequela Christi du Rogate.

Saint Hannibal : un saint à la recherche de Dieu à travers le service du prochain

Toute la vie de Saint Hannibal a été fortement marquée par le désir de sainteté. Il ne va ménager aucun effort pour réaliser ce désir qu’il tenait au fond de son cœur. Sa vie, son enseignement et les témoignages en disent long.

  • La vie de Saint Hannibal

Dès sa tendre enfance, saint Hannibal va faire preuve d’une vie entièrement dévouée à Dieu ceci grâce à sa situation familiale qui lui permit de laisser en toute chose la première place à Dieu. Issue d’une famille pieuse et dévouée, le jeune Hannibal va très vite à la différence de ses congénères manifester une soif de Dieu. C’est dans ce sens qu’il obtiendra aussitôt la permission de son confesseur de communier fréquemment alors qu’il était encore adolescent. Chose rare à son époque.

Cette enthousiasme va très vite faire naitre en lui, dans cette société italienne, marquée par des grandes crises socio-religieuses, un penchant pour la couche la plus défavorisée notamment les pauvres, les orphelins et les petits, ces marginalisés de la société. Et pour se rendre tout à tous, il se laissera, promptement et de façon inattendue mais sûre, séduire par la voix du Christ : « Viens, suis-moi ». Cette sequela christi, pas à l’ordinaire, comme il aimait si bien dire, ouvrira pour toute la postérité de l’humanité, de l’Eglise et de ses œuvres, les portes du Rogate (Mt 9, 38 ; Lc 10,2) qu’il appréhendera comme le moyen le plus efficace de répandre dans le monde la charité évangélique, principe fondamental de toute sainteté. Toute sa vie sera alors une vie donnée, un sacrifice, une offrande, une immolation et un holocauste pour ce qu’il appellera ad majorem consolationen cordis Jesu.

Durant toute sa vie, le désir de sainteté sera son leitmotiv. Dès son adolescence, il prendra un goût particulier pour la lecture des hagiographies. On se souvient de son séjour au couvent des Pères de Maria SS ma di Porto Salvo, de ses nombreux voyages à la recherche des saints vivants à l’exemple de la voyante de Salette, de la propagande de la vie des saints comme Jean Bersmans dont il encouragea fortement l’imitation des vertus aux nombreux jeunes qui l’écoutaient dans ses sermons populaires. Il se nourrissait de la parole de Dieu, des sacrements. Et ne manquait pas de demander des prières pour sa conversion continuelle bien qu’étant toujours disponible au souffle de l’Esprit Saint qui était son premier guide et consolateur spirituel.

Toute sa vie est une école de sainteté. Il ne manquera pas de partager avec ses contemporains et toute sa famille spirituelle ce trésor découvert, cette perle rare qui vaut tous les prix. Ces enseignements en sont forts illustratifs.

  • L’enseignement de saint Hannibal sur la sainteté

A chacun occasion de sa vie, grande ou petite, Saint Hannibal n’a jamais manqué de prodiguer des enseignements, conseils, sagesses, astuces, exhortations sur la sainteté. Sa vie elle-même est un enseignement silence, discret et très efficace. A travers les Quarante déclarations et promesses, Saint Hannibal a voulu laisser à toute la postérité son héritage spirituel. Dans ce petit manuel, petit mais richissime en enseignement, on y trouve tout ce qu’il faut pour parvenir à la sainteté sans aucune embuche. Nous ne saurons faire ici une exégèse de peur de ne biaiser sa pensée. Mais nous découvrons dès la première déclaration le sens, l’objet et la finalité de toute vocation à la vie religieuse/sacerdotale surtout Rogationniste. Saint Hannibal dit ceci en effet :

Mon entrée dans cette Communauté est seulement due à la vocation que je ressens dans mon cœur. J’ai l’intention de me consacrer purement et simplement au Seigneur, de servir Dieu de toutes mes forces, en ne cherchant que ma propre sanctification et le bien suprême des âmes, par l’observance de la Règle et de la discipline, l’exercice des vertus religieuses, et le lien sacré de la Profession religieuse. Et cela avec l’aide de Dieu et de ma bonne volonté.

Saint Hannibal, à la suite de cette première déclaration, passe au peigne fin tous les contours notamment les vertus qu’il faut appréhender, intérioriser et pratiquer pour répondre à notre commune vocation de la sainteté. Pour parvenir à la sainteté, selon lui, il faut passer par un chemin de vertus. On peut énumérer entre autre : l’amour de Jésus et de Marie, l’amour des saints et des anges, l’amour des enfants et des pauvres, l’amour et le respect mutuel , l’amour et le respect envers toute la hiérarchie ecclésiale et des supérieurs, la pratique des dévotions, la pratique des vœux religieux de pauvreté, chasteté, obéissance et Rogate, la pratique de la mortification et ascèse, de l’humilité, l’acceptation des corrections fraternelles, l’acceptation des charges, le détachement avec les parents, la pratique et la vie dans les sacrements principalement l’Eucharistie et la confession etc.… Tous ces paramètres qu’il recommande à travers ses enseignements n’étaient pas que des idées ou conjectures mais il prit soin de les pratiquer toute sa vie. Il était, en effet, convaincu que la sainteté ne consiste pas dans les œuvres extraordinaires ni dans la pratique continuelle de la pénitence mais dans l’union divine : « Mon Jésus, mettez dans mon cœur la vraie sainteté qui soit de votre cœur, de votre esprit amoureux » et cette union divine s’exprimait par le vécu quotidien avec son prochain.

Les différents témoignages recueillis pour sa cause de canonisation nous sont précieux pour l’attestation de ces propos.

  • Les différents témoignages sur la sainteté de Saint Hannibal

Toute l’existence de notre père Fondateur est l’expression d’une vie christifiée, offerte à Dieu le Père grâce aux dons de l’Esprit Saint. De son vivant, saint Hannibal a toujours dans sa grande humilité refusé de se reconnaître comme un saint homme. D’ailleurs, il se disait n’être qu’un pauvre pécheur. Lorsque ses œuvres connurent d’énormes difficultés, il n’hésitait pas à affirmer que ces difficultés sont dues à ses nombreux péchés. Mais toute la ville et par la suite l’Eglise a reconnue très vite en lui un saint homme. Il fut lui-même, le premier, un bon ouvrier de l'Évangile et un prêtre selon le Cœur de Dieu. Sa charité, qualifiée de «sans calculs et sans limites», se manifesta avec des accents particuliers, notamment envers les prêtres en difficulté et envers les moniales et les plus faibles de la société.

Durant son existence terrestre, une renommée de sainteté, claire et authentique, l'accompagnait déjà, à tous les niveaux, si bien que lorsqu'il s'éteignit à Messine, le 1er juin 1927, réconforté par la présence de la Très Sainte Vierge Marie qu'il avait tant aimée durant son existence terrestre, les gens disaient: «Allons voir le saint qui dort». Encore vivant, son ami Don Orione disait à ses contemporains, « Si vous voulez voir un saint, allez là-bas à Messine ». Ses funérailles furent une véritable apothéose que les journaux de l'époque rapportèrent tous avec des articles et des photos. Le maire de la ville n’hésita pas à déclarer un deuil citadin avec les hommages funèbres dans toute la ville. Après cette reconnaissance civile et politique du rayonnement de la sainteté de notre Père, mort en odeur de sainteté, l’Eglise de Messine allait ouvrir un procès diocésain pour la cause de sa canonisation. Et plusieurs témoignages ont été recueillis sur sa vie. Nous avons par exemples ceux-ci :

Mgr Tommasso dit ceci :

Le père Hannibal était toujours en présence de Dieu et tout ce qu’il faisait était pour la gloire de Dieu. Il était une personne édifiante, l’homme doué de capacité contemplative et mystique. Il a indiqué une route exacte d’option préférentielle pour les plus pauvres. Durant toute sa vie sacerdotale, il chercha à faire le Rogate comme une prière universelle. Il est devenu un propagateur infatigable de ce commandement de Jésus.

Un autre évêque Mgr Paino Angelo donne ce témoignage : « en tous les rapports que j’avais avec lui, je restais toujours édifié en présence d’un saint. Tout le monde l’appelait saint. »

Les enquêtes vont être menées par toute l’équipe mise en marche pour mettre en lumière toute sa vie dans les moindres détails. Un résultat positif recueilli dans positio super vertus publiée en 1988 permettra l’avancée de cette noble cause. Les nombreuses prières adressées à Dieu le Père par son Fils Jésus Christ dans l’Esprit, pour l’attestation de sa présence parmi la cohorte des saints va aboutir à sa béatification le 07 octobre 1990 et le 16 mai 2004, le pape Jean Paul II qui l’avait béatifié le déclara Saint de l’Eglise Catholique romaine en le reconnaissant comme l'«authentique pionnier et maître zélé de la pastorale moderne des vocations», « le père des pauvres et des petits ».

Les grâces de sa vie, le nouveau chemin de sainteté qu’il a initié ne cessent de porter des fruits encore aujourd’hui. De telle sorte qu’à l’occasion du dixième anniversaire de sa canonisation, de nombreuses pétitions de part le monde entier sont parvenus au Vatican pour demander au Saint Père la grâce de faire de lui le patron des vocations. Cette initiative continue encore son chemin aujourd’hui.

Conclusion : De Saint Hannibal à nous

Hannibal fils de son temps nous rejoint encore aujourd’hui. Il a encore beaucoup à nous enseigner sur le chemin de la sainteté. Nous en sommes en effet les bénéficiaires de ses grâces et nous devons suivre ses pas pour parvenir également à la gloire du Père. Mais comment pouvons nous nous réapproprier son intuition et son inspiration ? Des réflexions peuvent fleurir et alimenter notre vécu quotidien. Mais avant d’ouvrir des brèches, il demeure que par notre engagement au sein de cette congrégation, la vocation à la sainteté doit être pour nous un impératif. Nous implorons en effet, tous les jours de notre vie, le Seigneur d’envoyer à son Eglise de nombreux et saints apôtres. Et notre charisme dans sa première déclinaison exige de nous d’être de bons ouvriers c’est-à-dire les saints apôtres. Ceci implique que, à l’image de Saint Hannibal, nous sommes appelés à nous laisser conformer au Christ. Etant christifiés, nous pourrons ainsi avec fierté, zèle et détermination irréprochable, reprendre aussi aisément ces mots de saint Paul : « Ce n’est plus moi qui vit c’est le Christ qui vit en moi ». Alors, Le « soyez parfait » ne sera plus un impératif mais une réalité qui se vit au jour le jour, une vie dévouée au Père par le Fils et dans l’Esprit Saint sanctificateur pour les siècles des siècles.

 

 

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