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2 septembre 2014 2 02 /09 /septembre /2014 13:14

Là où est la haine, que je mette l’amour.

Là où est l’offense, que je mette le pardon.

Là où est la discorde, que je mette l’union.

Là où est l’erreur, que je mette la vérité.

Là où est le doute, que je mette la foi.

Là où est le désespoir, que je mette l’espérance.

Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière.

Là où est la tristesse, que je mette la joie.

O Seigneur, que je ne cherche pas tant à être consolé qu’à consoler, à être compris qu’à comprendre, à être aimé qu’à aimer.

Car c’est en se donnant qu’on reçoit, c’est en s’oubliant qu’on se trouve, c’est en pardonnant qu’on est pardonné, c’est en mourant qu’on ressuscite à la vie éternelle.

 

Saint François d’Assise.

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30 juin 2014 1 30 /06 /juin /2014 22:03

LES BEATITUDES (MT 5, 3-12)


Seigneur, tu dis : heureux les pauvres de cœur, le Royaume des cieux est à eux.

Mais notre monde dit : abat les pauvres, ils n’ont pas de places sur terre et propose pour cela les richesses mal acquises et les systèmes d’exploitation de ceux-ci.

Or, toi, de riche que tu étais tu te fis pauvre afin de nous enrichir de ta pauvreté.

Aujourd’hui encore tu ne cesses de prendre compassion des pauvres de Yahvé.

Suscite encore aujourd’hui dans ton Eglise des hommes et femmes qui pourront t’aider dans cette noble tâche.

 

Seigneur, tu dis : heureux les doux, ils posséderont la terre.

Mais notre monde ne cesse de crier et de promouvoir la violence, la terreur et l’insécurité.

Or, toi tu es doux et humble de cœur.

Tous ceux qui viennent vers toi trouve consolation et réconfort

Donne à tes ouvriers de communiquer encore aujourd’hui au monde cette douceur et humilité.

 

 

Seigneur, tu dis : heureux les affligés, car ils seront consolés.

Mais notre monde ne cesse de se moquer de ceux qui pleurent en les proposant haine et vengeance.

Or, toi tu as un cœur compatissant pour tous les membres souffrants de ton corps mystique.

Tu veux encore aujourd’hui que notre regard se tourne vers les affligés de la société.

Accorde à ton Eglise de prendre partie des membres souffrants de ton corps à travers le monde.

 

 

Seigneur, tu dis : heureux les affamés et les assoiffés de la justice car ils seront rassasiés.

Mais notre monde ne cesse de tirer profit des injustices.

Or, toi tu es le Prince de la paix et le Véritable Juge.

Tu prends partie de ceux qui luttent pour la justice et des victimes des injustices humaines.

Donne à notre humanité de s’inspirer et de pratiquer à tout moment la justice divine.

 

 

Seigneur, tu dis : heureux les miséricordieux car ils obtiendront miséricorde.

Mais notre monde écrase les sans voix et manifeste une grande indifférence envers ceux-ci.

Or toi, tu es le miséricordieux qui va à la recherche de la brebis égarée pour la ramener vers le pâturage.

Tu veux que l’humanité tout entière revienne vers le Père comme l’enfant prodige.

Accorde à ton Eglise des hommes et femmes dévoués pour s’engager à témoigner ta miséricorde.

 

 

Seigneur tu dis : heureux les cœurs purs car ils verront Dieu.

Mais notre monde ne nous propose que des impuretés, abominations déviances allant jusqu’à contre nature.

Or, toi tu as conservé durant toute ta vie parmi nous la pureté du corps et du cœur.

Tu as toujours voulu purifier tout ce qui est souillé,

Purifie encore aujourd’hui tous les membres souillés de ton corps mystique.

 

 

Seigneur, tu dis : heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu.

Mais notre monde ne recherche que la guerre et les conflits entre les hommes.

Or, tu es le Prince de la paix qui nous invite à parler le langage de l’amour.

Tu t’incarnas dans notre humanité afin de la reprocurer la paix des enfants de Dieu.

Donne aux ouvriers évangéliques d’apprendre à semer partout l’Evangile de la paix.

 

  

Seigneur, tu dis : heureux les persécutés pour la justice car le Royaume des cieux est à eux.

Mais notre monde exclut de la société les hommes justes.

Or, toi le Fils de Dieu tu ne fais aucune discrimination entre les hommes

Tu t’incarnas et te livras sur la croix pour que justice soit faite.

Accorde à notre temps des hommes qui annoncent ton royaume, qui dénoncent l’injustice et qui renoncent à tout ce qui aliène l’homme.

 

 

 

Seigneur, tu dis : heureux êtes vous, quand on vous insultera, qu’on vous persécutera et qu’on dira faussement contre vous toute sorte d’infamie à cause de moi.

Mais notre monde proclame la mort de Dieu au nom de la sécularisation.

Or, tu es le chemin la vérité et la vie. Nul ne peut aller au père sans passer par toi.

Donne à notre monde qui va à sa perdition de te reconnaître comme étant l’Unique Médiateur.

Toi qui étais, qui es et qui viens! Pour les siècles des siècles! Amen !

DOURWE Bernard, RCJ

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13 mai 2014 2 13 /05 /mai /2014 22:16
INTRODUCTION

L’homme était et il est toujours à la recherche de la transcendance. Il est à cette quête naturelle de l’invisible parce qu’il veut étancher sa soif de la découverte de soi et surtout parce qu’il veut surmonter sa finitude. C’est pourquoi il adhère à telle ou telle croyance religieuse pour combler son abîme de finitude et, cela lui revient de par sa liberté et sa volonté. La première question que nous nous posons est de savoir si toutes les religions aspirent aux mêmes valeurs ou si elles enseignent les mêmes valeurs. Même si l’on dit que l’abondance ne nuit pas, ne pouvons-nous pas affirmer que la pluralité des croyances religieuses est en quelque sorte à la base de différentes perversions notamment l’extrémisme, le fondamentalisme et l’intégrisme  religieux ? Un simple regard suffit pour remarquer ce qui se passe dans différents pays sous prétexte d’agir au nom de la foi : les guerres entre les religions, les attentats au nom de Dieu, les persécutions d’un tel ou tel groupe des croyants, les lois oppressives pour certains à cause de leur foi etc. Chacun se croit être dans la totalité de la vérité et l’autre devient un ennemi et un danger à combattre. Nous pouvons parler de l’autonomisation de la foi en défaveur de la raison et au même moment, nous pouvons alors donner raison à Karl Marx dans sa maxime stipulant que « la religion est l’opium du peuple ». Autrement dit, la croyance devient un mortifère à retardement. Au lieu d’unir le peuple, elle le divise incessamment et petit à petit. Faut-il alors recourir au Léviathan de Hobbes pour engloutir toutes les différentes croyances et ainsi les unir en lui en vue d’arrêter ces conflits ?

En effet, le pluralisme des croyances devrait être une richesse pour l’homme. Mais, l’actualité nous montre qu’il est à la base des conflits. Les croyances deviennent de plus en plus source de dégénérescence des conflits des valeurs et ainsi conduisent aux conflits interpersonnels au nom de la foi. Pour ce faire, nous voudrions, dans ce travail, parler de conflits des valeurs par rapport à la diversité des croyances. Voici les questions qui se posent : qu’est ce qui serait à la base des diversités des croyances qui ne font que se multiplier en nos jours ? Pourquoi leurs enseignements provoquent-ils les conflits des valeurs ? Comment alors tous les hommes peuvent-ils parvenir à une vie d’ensemble dans ce monde de contradiction de l’être et du croire ? Pour répondre à ces questions, nous nous proposons trois parties à traiter.  D’abord, nous parlerons de la diversité des croyances ; ensuite, nous discuterons les conflits des valeurs et enfin il sera question du vivre ensemble pacifique dans cette diversité des croyances et des conflits des valeurs.

I.DIVERSITÉ DES CROYANCES

            Les questions liées à la diversité des religions et des croyances ont une importance croissante de nos jours. En effet, non seulement la diversité religieuse est une caractéristique de nos sociétés de plus en plus évidente, créant ainsi l’opportunité d’une meilleure compréhension interculturelle, mais aussi cet aspect positif de nos sociétés modernes est à la source de nombreux conflits interculturels contemporains. Nous distinguons plusieurs groupes des croyances ou religions : les religions historiques, les religions orientales et les religions traditionnelles. Pour cette dernière nous nous intéressons aux religions traditionnelles africaines.

I.1. Les religions historiques

            Les religions dites historiques se basent sur la révélation d’un Dieu unique. Ce sont des religions monothéistes.  Il s’agit notamment du Judaïsme, du Christianisme et de l’Islam.

I.1.1. Judaïsme

            Le judaisme est une religion des juifs. « L’un des thèmes centraux de cette religion est celui de l’alliance entre Dieu et le peuple juif qui devint dès lors le peuple élu »[1]. L’histoire de ce peuple élu s’est écrite grâce à des hommes, rois ou prophètes (Noë, Abraham et Moïse) surtout à travers son constant dialogue avec son Dieu. Dans la Bible, Moïse est presenté comme le premier et le plus grand prophète du peuple juif, lui que  « l’Eternel a connu face à face ». Les autres prophètes sont des hommes choisis par Dieu pour transmettre la révélation de son message (Isaïe, Jérémie, Nathan, Elie et Elisée)[2]. Le judaïsme professe sa foi en un Dieu unique, Créateur du Ciel et de la terre, proche de l'homme, Dieu de l'Alliance « qui a sauvé son peuple en le faisant sortir d'Egypte ». Le sentiment de la resposnabilité pour les juifs est de faire connaître aux nations cet amour que le Dieu Saint, le Tout-Autre, porte à toutes ses créatures à travers les enseignements de la Torah.

I.1.2. Christianisme

            Le Christianisme est l'ensemble des confessions fondées sur la personne et l’enseignement évangélique de Jésus-Christ. Le christianisme regroupe les traditions catholiques, protestantes et orthodoxes. La foi trinitaire en assure les fondements[3]. Le christianisme a émergé du judaïsme au Ier siècle de notre ère. Il a gardé du judaïsme ses Écritures (l’Ancien Testament ou Première Alliance) et certaines de ses doctrines fondamentales telles que : le monothéisme[4]. Pour le christianisme, il n'y pas seulement des valeurs impersonnelles et des impératifs de conscience. Le chrétien est aussi appelé à vivre la plus grande valeur sur laquelle toutes les autres sont subordonnées, « l'amour ». Le Christ en est le modèle[5], il est l´Amour personnifié.

I.1.3. Islam

            «Islam généralement traduit par "Soumission", sous-entendu à Dieu, provient de la racine S.L.M qui porte le sens de Salut ou de Paix»[6]. C'est une religion fondée par Mahomet (début du VIIe siècle) qui se veut à la fois religion, mode et système de gouvernement et règle de la vie quotidienne. Son fondement est le Coran, livre saint et parole de Dieu révélée à Mahomet, et la Sunna, enseignement et vie du prophète, qui contiennent des éléments de la tradition judéo-chrétienne. Le croyant (musulman) doit se référer au Coran, adhérer sincèrement à l'Islam, avoir une confiance absolue en Dieu, s'abandonner intégralement à lui et rechercher inlassablement la perfection de son comportement. La loi canonique de l'islam est contenue dans la charia. Le contenu de leur foi se résume en quelques points : «Dieu est unique ; Dieu est tout-puissant, miséricordieux et retributeur; se soumettre à Dieu est le véritable Islam; Dieu parle par ses prophètes (Moïse, Jésus et Mahomet) Dieu parle aussi par les signes de l'univers»[7].

I.2. Les religions orientales

            On appelle  religions orientales,  les religions qui se sont développées dans les pays d’Orient et d’Extrême-Orient. Les religions orientales les plus importantes sont le bouddhisme, l’hindouisme, le shintoïsme, le confucianisme et le taoïsme. Cependant, il en existe d’autres. Seulement, notre étude se limitera au Bouddhisme et à l´Hindouisme.

I.2.1. Le Bouddhisme

            Le bouddhisme est l'un des grands systèmes de pensée et d'action orientaux. Né en Inde au VIe siècle av. J.C., il s'est assez rapidement propagé dans l'ensemble de l'Asie: - vers le Japon en passant par le Tibet et la Chine; - vers l'Indonésie en passant par la péninsule indochinoise; et aussi - vers l'ouest, où il fut freiné par le Christianisme, et plus tard par l'Islam. À l'origine, le bouddhisme n'est pas une philosophie, mais une « leçon de choses », l'enseignement de la réalité, un exposé des faits, de la souffrance, de son origine et de sa cessation pour finalement atteindre le nirvāna. Il donnera naissance par la suite à une riche tradition philosophique et religieuse. Il est quelquefois décrit comme une « science de l'esprit » inspirée par les enseignements du Bouddha, « l'Éveillé », un homme dont l’existence historique est attestée, même si les détails de sa vie restent, pour beaucoup d’entre eux, invérifiables, et souvent de portée mythologique[8].

II.2.2. L´Hindouisme

            L'hindouisme est la plus vieille des principales religions du monde. Son origine remonte à la civilisation de l'Indus qui naquit vers 2500 av. J.-C. L'originalité de l'hindouisme est de n'avoir ni prophètes ni dogmes centraux ; sa pratique étant issue d'une tradition orale très ancienne. En conséquence, l'hérésie n'existe pas. Cependant, les penseurs admettent que les Veda sont la source de croyances hindoues. L’Hindouisme se présente comme une religion dynamique, un ensemble de concepts philosophiques issus d'une tradition remontant à la protohistoire indienne, dotée d'une capacité à assimiler les croyances, et les philosophies, sans les opposer. L'hindouisme a beaucoup évolué au cours du temps. L'hindouisme ancien dépassait le simple cadre religieux. Au-delà du syncrétisme théologique, l'hindouisme était un vecteur pour toutes les sciences : le droit, la politique, l'architecture, l'astrologie, la philosophie, la médecine, etc.

I.3. Les religions traditionnelles africaines

            La religion traditionnelle africaine "survit" partout en Afrique, surtout par des syncrétismes avec l'islam et le christianisme. En effet, si une grande partie des africains est aujourd'hui musulmane ou chrétienne, son islam ou son christianisme reste très influencé par la religion d'origine. La propagande de l'islam et du christianisme fait gagner du terrain face à la religion africaine. Ainsi, la religion africaine perd du terrain chaque jour, car ses véritables tenants sont souvent âgés, et peu sont ceux qui, parmi la jeunesse africaine, acceptent de continuer la tradition spirituelle, ou bien de s'y faire initier. Ces religions « se référent aux ancêtres et à une forme de médiation entre les hommes et l’Immanence, sont le terreau culturel et spirituel d’où viennent la plupart des chrétiens convertis, et avec lequel ils gardent un contact quotidien »[9]

            La multiplicité de ces croyances engendre le plus souvent des conflits au sein de la société à cause des différentes valeurs véhiculées.

 

II. LES CONFLITS DES VALEURS 

            Toutes les religions sont reconnues à travers le monde par les valeurs qu’elles véhiculent dans la société. Chacune d’elles a ses valeurs qu’elle cherche à prévaloir au dessus de celles des autres. Aujourd’hui, beaucoup de conflits socio-religieux et de nombreuses conséquences graves ne cessent de se multiplier du jour au jour. Cette situation concerne surtout les grandes religions qui, d’ailleurs, nous serviront d’échantillons dans cette partie. Il s’agit de la religion chrétienne, la religion musulmane et la religion juive ou le judaïsme.

II.1. Les valeurs religieuses

            Comme nous venons de le souligner, les valeurs religieuses dépendent d’une religion à une autre. Une religion met plus d’accents sur telles valeurs que sur telles autres comme nous le présenterons dans ce qui suit.

            Pour le christianisme, les valeurs sont concentrées dans le Credo ou profession de la foi. Dans la vie en société, l’accent est mis sur la dignité de la personne humaine, l’homme créature de Dieu, sur l’égalité des conditions. Parce qu’il est une créature de Dieu, tout homme est égal à un autre. Puis, il y a  « l’amour ». « Tu aimeras ton prochain comme toi-même ». D’autres branches du christianisme refusent certaines valeurs comme par exemple le célibat des prêtres en occident, l’enseignement du Magistère pour les protestants car, pour eux, seules les Ecritures suffisent etc. L’Islam, qui connaît aussi l’amour, la confiance et l’hospitalité, met plutôt l’accent sur l’obéissance à un certain nombre de principes : les cinq piliers de l’islam, l’attestation du Dieu Unique et du prophète, les prières quotidiennes, l’aumône, le ramadan, le pèlerinage à la Mecque.[10]Dans le Judaïsme plusieurs valeurs religieuses sont à souligner : les lois alimentaires ou cacherout, la circoncision, les lois de la pureté familiale, le culte de Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, la Tanak ou Bible hébraïque ainsi que leur élection comme peuple de Dieu[11].

II. 2. Causes des conflits

1. Le monothéisme 

            En exprimant son inquiétude sur la société contemporaine, le pape Benoît XVI dit que  « Dans l'Histoire, le monothéisme a servi de prétexte à l'intolérance et à la violence et "une religion peut devenir malade (...)  quand l'homme pense devoir prendre lui-même en main la cause de Dieu, faisant ainsi de Dieu sa propriété privée". "Il n'est pourtant pas vrai que le « non » à Dieu rétablirait la paix. Si la lumière de Dieu s'éteint, la dignité divine de l'homme s'éteint »[12]. Pourtant, le monothéisme chrétien, monothéisme « trinitaire », selon le pape, n’est pas source de violence comme on le voit aujourd’hui, mais une force de paix personnelle et universelle. 

1. Le fondamentalisme et l’intégrisme

            Quand on évoque le fondamentalisme, c'est généralement à la religion islamique ou au christianisme protestant que l'on se réfère. Parler de fondamentalisme à propos du catholicisme, c'est évoquer une dimension nouvelle du conservatisme dans la sphère catholique. Pierre Lathuilière estime que le fondamentalisme doit être nettement distingué de cette forme typique du conservatisme catholique qu'est l'intégrisme. Ce qui est au cœur de l'expérience fondamentaliste, c'est une conviction de conversion intime et individuelle, alors que l'intégrisme s'appuie sur une notion de tradition sociale et globalisante.[13] L’intégrisme dans la doctrine catholique désigne ce refus des reformes promulguées par l’Eglise surtout avec Vatican II (liturgie, rôle des laïcs, dialogue interreligieux et œcuménique, etc.), source de beaucoup des conflits et des divisions.

            Pour le protestantisme, le fondamentalisme se fait voir surtout dans la lecture fondamentaliste de la Bible avec ses conséquences dans la vie. Son exclusivisme éloigne de toute démarche œcuménique[14]. Le fondamentalisme musulman quant à lui, est intéressé par la question de la morale et de l’éthique islamique. Il est antidémocratique, s’oppose à la laïcité et l’acceptation occidentale des droits de l’homme. Ce qui vient en premier c’est l’intégralité du message religieux qui repose sur la vision théocratique. Aujourd’hui, la religion musulmane tombe dans l’hégémonisme à outrance en voulant islamiser beaucoup de pays et prendre la direction de l’Etat. Chez les Juifs,  le fondamentalisme est fondé sur leur Identité religieuse, comme peuple Saint, peuple choisi. Cela fait que ce peuple vit seul, à l’écart, en situation de ségrégation. Ils rejettent toute forme de rapport entretenu avec le monde extérieur ; ils vivent ensemble, travaillent ensemble, voyagent ensemble et ont leur propre magasin. Ils ont une vision exclusive de la vérité, car, à eux et à eux seuls, Dieu communique et se communique. Ils rejettent aussi l’idée de la politique visant des buts communs à diverses personnes[15].

 

 

3. La mondialisation

            En plein processus de la mondialisation, la modernité se taille la place de choix comme idéal qui veut éclairer, ou idéal de l’autonomie, de l’émancipation de l’homme non seulement dans la société mais aussi dans la religion, l’homme veut être libre. Si les premières communautés des croyants vivaient ensembles, c’est parce qu’elles obéissaient aux lois communes et personnes ne pouvaient s’insurger contre une loi admise au sein de la communauté. Malheureusement aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Car au nom de l’autonomie que prône la mondialisation, l’homme religieux s’égare et remet en cause la doctrine de sa foi pour élaborer la sienne qui répond à ses convictions personnelles et parfois à ses intérêts personnels. Ainsi, nombreux mouvements religieux naissent chaque jour et créent des chocs, des divisions, des conflits belliqueux et surtout des confusions dans les cœurs de beaucoup de croyants. L’on pourrait alors se demander si c’est l’unique Dieu que tout le monde annonce.

II. 3. Les conséquences des conflits

            En Afrique comme partout ailleurs au monde, nous suivons à travers les medias le choc des valeurs religieuses qui fait autant de dégâts matériels et les pertes en vies humaines. Nombreuses personnes affrontent une discrimination fondée sur leur religion ou leur conviction. Cette discrimination peut, entre autres effets, limiter leur accès à l’enseignement public, aux services de santé ou à la fonction publique. Dans les cas extrêmes, de nombreuses communautés religieuses peuvent être appréhendées ou tuées en raison de leur affiliation ou de leurs convictions religieuses. Le cas le plus frappant, tel que Raphaël Delpard nous le présente, c’est le christianisme en Orient : 

« Qu’ils soient catholiques, protestants, coptes ou de tout autre communauté, les chrétiens sont pourchassés, privés de travail, emprisonnés, torturés, assassinés. Tous les moyens sont utilisés pour les contraindre à renier leur foi, y compris le viol rituel collectif, considéré dans certains Etats comme une sanction pénale. Posséder une Bible est devenu un crime, la célébration des cultes est interdite, on est revenu au temps des messes dans les caves et des premiers martyrs »[16].

            Ainsi nous constatons que certaines valeurs religieuses prônées par les religions sont causes des conflits et ne passent pas sans laisser des conséquences graves au sein de la société. Comment remédier à ces conflits ?

 

 

III.POUR UN VIVRE ENSEMBLE PACIFIQUE

            Face aux nombreuses difficultés causées par la diversité des croyances au sein de la société, il sied de proposer quelques aspects pour une meilleure vie pacifique entre les hommes. En premier ressort, nous pensons à l’articulation entre foi et raison, deuxièmement au dialogue interreligieux et œcuménique et troisièmement, au rôle que l’Etat doit jouer dans la régulation des conflits des valeurs.

III.1. Dialogue foi et raison

            Il n’est plus aujourd’hui à démontrer l’importance de l’articulation entre foi et raison au sein des pratiques religieuses. En effet, la foi et la raison comme le soulignait le Pape Jean Paul II dans sa lettre encyclique Fides et Ratio sont comme deux ailes qui nous permettent de parvenir à la vérité tout entière[17]. Le dialogue entre foi et raison sont des gages qui permettent aux croyants d’éviter de sombrer dans le fondamentalisme, l’intégrisme, le xénophobisme, l’extrémisme, le fidéisme, l’exclusivisme ou encore le rejet de l’autre parce que ne partageant pas les mêmes valeurs religieuses que nous. Il faut donc théologiser la raison et raisonner la foi. Il faut que la Révélation ait son mot à dire dans les vérités de la raison et que la raison ait son mot à dire dans les vérités de foi. L’œcuménisme et le dialogue interreligieux ne peuvent être possibles si la foi et la raison sont opposées ou éloignées. Autrement dit, l’effort de se comprendre et se rapprocher des autres confessions chrétiennes et des autres religions oblige de redécouvrir le rapport foi et raison.

III.2. Dialogue interreligieux et œcuménique

            Si la religion est pour le bien de l’homme et un véhicule des valeurs authentiques, pourquoi le monde court-il de plus en plus vers ce ravin d’immoralité ? Pourquoi les différends d’ordre doctrinal et moral entre religions persistent-ils? Ne fallait-il pas un champ d’entente entre différentes religions, soit un dialogue interreligieux ?

            Sans aller dans l’historique, le dialogue interreligieux est plus qu’une nécessité dans ce monde où les hommes sont appelés à vivre plus que jamais dans une seule communauté. Il se définit sans se confondre soit avec l’étude des diverses religions, soit avec le prosélytisme, ou encore à l’œcuménisme. Pour le Cardinal Arinze, le dialogue interreligieux est «la rencontre de diverses religions, dans un climat de liberté et d’ouverture, afin d’écouter l’autre, de tenter de comprendre la religion de la personne qui est en face, dans l’espoir de trouver des possibilités de collaboration avec elle.»[18] Il concerne non seulement des religions chrétiennes, ce qui serait l’œcuménisme, mais aussi les autres croyances religieuses à l’instar du judaïsme, l’islam, l’hindouisme, le bouddhisme, les religions traditionnelles etc. Le dialogue interreligieux urge surtout dans ce temps où différents pays connaissent des guerres et des conflits interreligieux, où l’ordre moral et social est basculé. En fait, les religions qui façonnent différemment la vie du monde sont appelées à une assise dialogique pour débattre de tout cela, pour dépasser les limites. A en croire Joseph de Finance : « tout dialogue est un effort pour remédier à la séparation des sujets, pour restituer, au plan de leur multiplicité même, une image de l’unité originelle. »[19] Ainsi, chercher un terrain sûr d’entente mutuelle pour le bien vivre de la société, l’assurance de l’harmonie entre les croyants, le travail d’ensemble, la promotion des valeurs morales et éthiques, le développement de la justice et de la paix, de droit de la personne humaine et de l’égalité revient à l’ensemble de toutes les religions, maitresses de notre monde. Si tous les croyants entrent dans les idéaux les plus élevés de leur religions, on peut intercaler ensemble différents problèmes que connaît notre humanité tels que les guerres interreligieuses, les antivaleurs, oppressions et exploitation des pauvres, tribalisme, discrimination religieuse et érosion des valeurs familiales fortes, l’intolérance et l’extrémisme religieux et ainsi établir l’unité de la nature humaine. Le dialogue doit donc construire, orienter et surtout promouvoir les vraies et authentiques valeurs religieuses, morales, sociales, éthiques, intellectuelles, écologiques etc. en construisant une fraternité excluant toute discrimination[20]. D’où le rôle primordial de l’Etat.

III.3. L’Etat : régulateur des conflits des valeurs

            En présence des conflits liés aux diversités des croyances, l’Etat a un rôle prépondérant dans la régulation des conflits. L’Etat est en effet le garant de l’intégrité nationale et il doit être un facteur d’unité entre les citoyens vivant dans son territoire. C’est pourquoi il doit promouvoir les valeurs telles que la justice sociale, la paix, la liberté, la tolérance et la réconciliation entre les hommes. Il doit mettre aussi sur pied des lois justes qui favorisent le respect de la dignité de tout homme sans aucune discrimination religieuse. Pour ce faire, le concile Vatican II fait la promotion de l’Etat laïc. Celui-ci doit être au service de la société. Jean-Georges Boeglin dit à propos :

« l’Etat laïc, dans l’enseignement de Vatican II, a le devoir de garantir le respect des convictions de tous les citoyens, de garantir la pleine liberté religieuse et de procurer, sur le plan civil, toutes les conditions qui favorisent le développement de la vie religieuse dans le respect de toutes les convictions religieuses et philosophiques des citoyens. […] L’Etat n’est jamais amené à se prononcer sur les doctrines des religions de ses citoyens, mais il doit garantir à chaque confession la liberté religieuse. »[21]

L’Etat et son rôle apparaissent alors sous un autre jour : il a la mission irréductible de veiller à la cohésion sociale de manière neutre, bienveillante, paritaire et compétente par sa fonction législative[22].


CONCLUSION

 

Dans ce travail, il était question de traiter le problème de la diversité des croyances et le phénomène des conflits des valeurs qui en découle. Nous avons voulu savoir pourquoi le phénomène du pluralisme des croyances s’accompagne toujours par des conflits des valeurs. Car, en effet, le monde qui, plus que jamais, connaît le fait d’apparition grandissante des nouveaux mouvements religieux, signe de nouvelles formes de croyances, ne cesse pourtant pas de sombrer dans les conflits incessants entre croyants. Nous avons compris que cela est une face externe révélant la forme interne de l’enseignement des différentes croyances religieuses car chacune d’elles a sa propre compréhension de la chose divine.

Ainsi, dans le premier moment, nous avons cherché à comprendre ce phénomène de la diversité des croyances à la lumière des grandes religions dites historiques, c'est-à-dire, le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam. Nous avons essayé de donner une idée générale sur chacune d’elles. Après une étude menée sur ces religions, nous sommes arrivés au deuxième moment où nous nous sommes efforcés de déterminer les causes des conflits de valeurs. Les plus marquantes ont été pour nous le monothéisme, le fondamentalisme, intégrisme et la mondialisation. Nous avons remarqué que les conséquences de ces conflits sont notables dans différents pays. Nous nous sommes demandés : en face de cette drame, qu’est ce que l’homme doit-il faire pour éradiquer ces conséquences? Cette question a été répondue au troisième moment où nous avons démontré un chemin à entreprendre pour arriver à un vivre ensemble paisible et pacifique. Il s’agit ici du dialogue entre foi et raison, qui, combinées, sont les deux ailes pour parvenir à la vérité, du dialogue interreligieux et en cas majeur, l’Etat comme dernière instance à régler les conflits. Et d’ailleurs, si « le feu brûle fort quand chacun y met son bois », pourquoi différentes croyances ne peuvent-elles pas se mettre ensemble pour promouvoir en unanimité les valeurs authentiques et ainsi éviter les conflits à tous les niveaux?


BIBLIOGRAPHIE

DOCUMENTS MAGISTERIELS

BENOIT XVI, Exhortation post-synodale Africae munus, Libreria Editrice Vaticana, 2011

BENOIT XVI, Homélie à Rome le 5 décembre 2011

JEAN PAUL II, Encyclique Fides et ratio, Libreria Editrice Vaticana, 1998

Vatican II,  Constitution pastorale sur l'Eglise dans le monde de ce temps Gaudium et Spes, 1965

Vatican II,  Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis Humanae, 1965

Vatican II,  Déclaration sur les relations de l'Eglise  avec les religions non chrétiennes Nostra Aetate, 1965

 

OUVRAGES

ACAT, Fondamentalismes, intégrismes : une menace pour les droits de l’homme, Bayard, Paris, 1997

ARINZE Cardinal Francis, A la rencontre des autres croyants. Dialogue interreligieux, un engagement et un défi, Paris, Médiaspaul, 1997

BOEGLIN Jean-Georges, Etats et religions en Europe, Tome I, L’Harmattan, Paris, 2006

DELPARD Raphaël, La persécution des chrétiens aujourd’hui dans le monde, Michel LAFON, Paris 2009 

FINANCE (de) Joseph, Affrontement de l’autre, Rome, Presse de l’université Grégorienne, 1977

KOUNKOU Dominique, Les nouvelles formes du sentiment religieux : un défi pour la laïcité moderne? L’Harmattan, Paris, 2003

LATHUILIERE Pierre, Le fondamentalisme catholique, cerf, Paris, 1995

MALHERBE M., Les religions, Editions Nathan /HER , 2004

 

ENCYCLOPEDIE

THEO, l'encyclopédie catholique pour tous, Ed.Droguet-Ardant/Fayard,Paris, 1992

Encyclopédie Wikipédia 2010

WEBOGRAPHIE

http://fr.wikipedia.org  

http://www.dicocitations.com/

http://www.eglise.catholique.fr  

http://www.zenit.org/fr   

TABLE DES MATIERES

 

INTRODUCTION.. 1

I-     DIVERSITÉ DES CROYANCES. 2

I.1. Les religions historiques. 2

I.1.1. Judaïsme. 2

I.1.2. Christianisme. 2

I.1.3. Islam.. 3

I.2. Les religions orientales. 3

I.2.1. Le Bouddhisme. 3

II.2.2. L´Hindouisme. 4

I.3. Les religions traditionnelles africaines. 4

II. LES CONFLITS DES VALEURS. 5

II.1. Les valeurs religieuses. 5

II. 2. Causes des conflits. 5

1.     Le monothéisme. 5

2.     Le fondamentalisme et l’intégrisme. 6

3.     La mondialisation. 7

II. 3. Les conséquences des conflits. 7

III-     POUR UN VIVRE ENSEMBLE PACIFIQUE.. 8

III.1. Dialogue foi et raison. 8

III.2. Dialogue interreligieux et œcuménique. 8

III.3. L’Etat : régulateur des conflits des valeurs. 9

CONCLUSION.. 11

TABLE DES MATIERES. 13

 

 



[1] M. Malherbe, Les religions, Editions Nathan /HER , 2004, p.20

[2] Cf. Ibidem, p. 21-22

[3] Cf. http://www.eglise.catholique.fr/Christianisme, consulté le 22 Décembre 2013

[4] http://www.dicocitations.com/ Christianisme, consulté le 22 Décembre 2013

[5] Théo, L'encyclopédie catholique pour tous, Ed.Droguet-Ardant/Fayard, Paris, 1992,p.780.

[6] M.Malherbe, Les religions, Editions Nathan /HER 2004, p.79.

[7] Ibidem. p.142.

[8] Encyclopédie Wikipédia 2010/ le Bouddhisme.

[9] Benoît XVI, Exhortation post-synodale Africae munus,  n°92, Libreria Editrice Vaticana, 2011.

[10] Cf. Dominique Kounkou, Les nouvelles formes du sentiment religieux : un défi pour la laïcité moderne? L’Harmattan, Paris, 2003, p180.

[11] http://fr.wikipedia.org/wiki/Judaïsme, consulté le 20 décembre 2013.

[12] http://www.zenit.org/fr/articles/le-monotheisme-trinitaire-force-de-paix, homélie du pape Benoit XVI à Rome le 5 décembre 2011.

[13] Cf. Pierre Lathuiliere, Le fondamentalisme catholique, Cerf, Paris, 1995. Quatrième de couverture.

[14] ACAT, Fondamentalismes, intégrismes : une menace pour les droits de l’homme, Bayard, Paris, 1997, p. 38.

[15] Ibidem, p 101

[16] Raphaël Delpard, La persécution des chrétiens aujourd’hui dans le monde, Michel LAFON, Paris, 2009, La quatrième de la couverture.

[17] Jean Paul II, Lettre encyclique Fides et ratio, prologue, Libreria Editrice Vaticana, 1998

[18] Cardinal Francis Arinze, A la rencontre des autres croyants. Dialogue interreligieux, un engagement et un défi, Médiaspaul, Paris, 1997, P.13.

[19] Joseph de Finance, Affrontement de l’autre, Presse de l’université Grégorienne, Rome, 1977, p.50.

[20] Cf. Vatican II, Déclaration Nostra Aetate, 2-3

[21] Jean-Georges Boeglin, Etats et religions en Europe, Tome I, L’Harmattan, Paris, 2006, p. 66.

[22] Cf. Vatican II, Dignitatis humanae 2-5, Gaudium et Spes 92

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9 avril 2014 3 09 /04 /avril /2014 21:13

JE CROIS A LA COMMUNION DES SAINTS


Le 9e article du symbole des Apôtres stipule ceci « Je crois à la communion des saints ». Cette affirmation de notre foi est riche de sens et suscite en nous aujourd’hui à la suite de l’enseignement de l’Eglise une nécessité de clarification. Qu’est-ce en effet la communion des saints à la quelle nous croyons? Pour y répondre nous prendrons pour point d’appui l’enseignement du Magistère de l’Eglise à travers la constitution dogmatique sur l’Eglise Lumen Gentium (LG) et le Catéchisme de l’Eglise Catholique (CEC).

Cet article de notre credo « Je crois à la communion des saints » se veut une continuité et une explication de « Je crois à la Sainte Eglise Catholique et Apostolique ». En effet : « qu’est-ce que l’Eglise sinon l’assemblée des saints ? » (CEC n° 946). La communion des saints est précisément l’Eglise dans ses différentes réalités.

De prime abord, l’affirmation de la croyance à la communion des saints est dotée de deux significations étroitement liées. D’un côté, il s’agit de la « communion aux choses saintes, santa» et de l’autre côté, de la « communion entre les personnes saintes, santi» (CEC 948).

Dans la communauté primitive de Jérusalem, les disciples « se montraient assidus à l’enseignement des Apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières.» (Ac2, 42). La communion des biens spirituels regroupe la communion dans la foi, la communion des sacrements (surtout l’Eucharistie), la communion des charismes (dons de l’Esprit Saint) en vue de l’édification de l’Eglise et la communion de la charité. Qu’en est-il de la communion entre les personnes saintes ?

Le concile Vatican II, dans la constitution dogmatique Lumen Gentium n°6, parle de trois états de l’Eglise en ces termes, « en attendant que le Seigneur soit venu dans sa majesté accompagné de tous les anges et que, la mort détruite, tout lui soit soumis, les uns parmi ses disciples continuent sur la terre leur pèlerinage, d’autres ayant achevé leur vie, se purifient encore, d’autres enfin sont dans la gloire contemplant dans la pleine lumière, tel qu’il est, le Dieu en trois personnes ». Il s’agit ainsi de l’Eglise du ciel constituée des saints, de l’Eglise pèlerine qui nous concerne tous ici sur terre et l’Eglise souffrante qui concerne les âmes du purgatoire.

Il y a un échange des biens spirituels entre ces trois états de l’Eglise. En effet, les saints intercèdent pour nous et pour les âmes du purgatoire. Ils ne cessent « d’intercéder pour nous auprès du Père, offrant les mérites qu’ils ont acquis sur terre par l’unique Médiateur de Dieu et des hommes, le Christ Jésus » (LG n°49). Nous en retour nous implorons leur intercession et prions pour l’Eglise souffrante car les âmes du purgatoire ont besoin de notre intercession (2M12, 45) et de celle des saints. « Notre prière pour eux peut non seulement les aider mais aussi rendre efficace leur intercession en notre faveur. » CEC 958

Ainsi dans le Christ, tous les fidèles ne font qu’un seul corps. Lorsque nous affirmons « je crois à la communion des saints », nous croyons à la communion de tous les fidèles du Christ, de ceux qui sont pèlerins sur la terre, des défunts qui achèvent leur purification, des bienheureux du ciel, tous ensembles formant une seule Eglise, et nous croyons que dans cette communion l’amour miséricordieux de Dieu et de ses saints est toujours à l’écoute de nos prières.

Frère DOURWE Bernard, RCJ

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24 décembre 2013 2 24 /12 /décembre /2013 05:41

Il y a de cela 2013 ans !

Toi l’enfant Jésus tu pris chair de notre chair.

Toi l’enfant Jésus tu concrétisas la promesse annoncée depuis la création !

Toi l’enfant Jésus tu allais changer l’histoire de l’humanité.

Oui  Seigneur, çà fait déjà 2013 ans que nous vivons les temps nouveaux.

Le temps de la grâce

Le temps de la plénitude

Le temps de la béatitude

Qu’avons-nous fais de particulier pour mériter ta présence ?

Qu’avons-nous fais de spécial pour bénéficier de l’amour qui s’est fais don ?

Qu’avons-nous fais d’exceptionnel pour être comblés grâces après grâces ?

Oui Seigneur, tu dépasses toujours nos attentes pour nous rejoindre dans nos misères.

Oui Seigneur, tu dépasses toujours notre entendement pour te faire présent aujourd’hui ici à Ngoya.

Oui Seigneur, tu nous surprends en venant chercher et trouver refuge dans nos cœurs.

Reste toujours avec nous toi l’Emmanuel au sein de notre Scolasticat Rogationniste.

Ainsi nous pourrons être des authentiques témoins du Rogate maintenant, toujours et partout.

 

Dourwe Bernard, RCJ

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8 décembre 2013 7 08 /12 /décembre /2013 22:03
CHAPITRE II- LA PERTINENCE DE L’ENCYCLIQUE FIDES ET RATIO 

La Lettre encyclique Fides et ratio, du pape Jean Paul II, est riche en intérêt tant pour le monde religieux que profane. Mais dans le cadre de notre réflexion, nous voulons retenir notre attention sur trois centres d’intérêts. Comme le pape l’a souligné dès l’introduction de l’encyclique, l’homme est appelé à parvenir à la  connaissance de la vérité. La foi et la raison s’offrent à lui pour y parvenir d’où la foi et la raison au service de la vérité comme notre premier centre d’intérêt. Ensuite, l’encyclique revêt un grand intérêt pour la réflexion théologique qui se veut selon saint Anselme « Fides quarens intellectum » et enfin, la théologie fondamentale ne peut pas être en reste dans nos centres d’intérêt car elle se veut une réflexion conciliant foi et raison.

II.1. La foi et la raison au service de la vérité

La foi et raison sont deux sources de la connaissance qui se complètent dans la recherche de la vérité. Par la raison, l’homme peut atteindre naturellement la vérité et par la foi, il s’ouvre au mystère de Dieu. « Foi et raison ne sont ni exclusives, ni confusibles. Elles subsistent chacune à son plan. Mais, pour la médiation de leurs sciences respectives-Théologie et philosophie- elles peuvent entrer en un rapport dont elles tirent l’une et l’autre avantage.»[1] C’est pourquoi « sans la foi, la raison se dessèche en erreurs, sans la raison, la foi sombre en crédulité »[2].

La vérité reste le bien fondamental, le théologien, le philosophe, le scientifique, comme tout autre intellectuel, est avant tout, et par vocation, un serviteur de la vérité. « Si on n’aime pas la vérité, on n’est pas un homme »[3]. En effet, le désir de connaître la vérité est inscrit en tout homme. La recherche de la vérité ne s’arrête pas aux vérités partielles, observables ou vérifiables, elle est poussée vers une vérité ultérieure à celles-là. Alors cette vérité se donne dans la foi chrétienne, c’est le Dieu Un et Trine révélé en Jésus-Christ ; une vérité qui n’entre en contradiction aucune avec celles que l’on atteint par la raison, mais qui les assume dans une unité supérieure[4]. Ainsi Georges Bene, homme de science affirma à propos :

Par les vérités concernant la création du monde, le sens de la vie humaine, la destinée de l’homme, la foi peut être une aide puissante pour l’intelligence, en précisant au savant les bases qui justifient sa recherche, les ambitions légitimes qu’il peut poursuivre…, et aussi les voies qui risquent d’être sans issues… inversement, non seulement les textes saints sont au moins partiellement éclairés par le progrès scientifique, mais la compréhension, la formulation des vérités de la foi peut et doit bénéficier des progrès de la science. Le progrès scientifique représentant réellement la fine pointe de ce que l’homme peut connaître par les seules ressources de sa raison sur l’intelligence du monde matériel, ses données constituent en quelque sorte le matériel de base sur lequel s’édifiera une philosophie réaliste, base indispensable du tout effort théologique sérieux.[5]

La vérité dans sa plénitude n’est atteinte que par une raison qui s’ouvre à la foi, même si le mystère n’est jamais complètement appréhendé. Le pape réaffirme à la fois la valeur de la raison et de la foi au Christ qui seul révèle l’homme à l’homme. Ni la foi sans la raison, ni la raison sans la foi : la foi et la raison sont comme deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité.

La raison livrée à elle-même ne peut pas atteindre la vérité si elle ne s’ouvre pas à la foi qui l’introduit dans le mystère « la raison, est ainsi subsumée par la foi à la rencontre d’une vérité qui se donne, révèle l’homme à lui-même et lui dévoile sa vocation transcendantale»[6]. Pour cela,  la raison doit être valorisée mais non surestimée. « L’homme atteint la vérité par la raison, parce que, éclairé par la foi, il découvre le sens profond de toute chose, en particulier de sa propre existence »[7].

 Certaines vérités comme le mystère de la sainte Trinité, de l’Incarnation, de la Résurrection échappent à la raison. C’est dans ce sens que nous pouvons comprendre l’affirmation du concile Vatican I, dans la constitution De fide catholica, au chapitre IV : « La raison, illuminée par la foi, dans une recherche attentive, fervente, sobre, acquiert, sous la grâce de Dieu, une certaine intelligence des mystères, qui est extrêmement fructueuse ; et cela, soit par les voies de l’analogie avec les connaissances naturelles, soit par la connexion des mystères, entre eux ou avec la fin suprême de l’homme »[8].

 Les vérités embrassées par la foi et celles découvertes par la raison, non seulement ne peuvent en dernière analyse se contredire, puisqu’elles procèdent de la même source, la vérité même de Dieu, créateur de la raison et dispensateur de la foi[9] ; mais de fait, elles se soutiennent et s’éclairent réciproquement : « la droite raison démontre les fondements de la foi, et, éclairée par la lumière de celle-ci, elle s’adonne à la science des choses divines. Quant à la foi, elle libère et protège la raison des erreurs et lui fournit de multiples connaissances. »[10] 

II. 2. Intérêt de l’encyclique pour la théologie chrétienne

La théologie, en vertu de sa propre nature, suppose, comme condition de possibilité, la philosophie comme discipline fondamentale indépendante. La théologie ne peut pas s’en passer de la philosophie même si elle trouve sa raison ultime dans la Révélation. La philosophie a longtemps été considérée comme « ancilla theologiae ». Le pape souligne plutôt l’autonomie de la raison et de la foi. Désormais la relation qui doit opportunément s’instaurer entre la théologie et la philosophie sera placée sous le signe de la circularité. La théologie se déploie dans un effort rationnel rigoureux et soutenu qui part de la Parole de Dieu et cherche à mieux la connaître. La philosophie quant à elle part d’un exercice de la raison qui se laisse conduire et illuminer par la Parole de Dieu qui la fait percer ses propres limites et élargir son champ thématique, lui faisant embrasser des horizons nouveaux et insoupçonnés. C’est cette interaction qui doit accompagner la théologie dans son statut de science de la foi, dans son double principe méthodique d’auditus fidei et intellectus fidei. La Commission théologique internationale souligne, à la suite du pape Jean Paul II, la pertinence du rapport fides et ratio pour la réflexion théologique : « La théologie est une œuvre de la raison éclairée par la foi (ratio fide illustrata), qui cherche à traduire en un discours scientifique la Parole de Dieu exprimée dans la Révélation.»[11]

Se servant du Vatican II, le document du pape Jean Paul II rappelle la tâche de la Théologie : d’abord renouveler ses méthodes en vue de servir plus efficacement l’évangélisation et porter son regard sur la vérité dernière qui lui est confiée par la Révélation. Son travail répond au dynamisme présent dans la foi elle-même[12]. Son objet c’est la recherche de la vérité, le Dieu vivant et son dessein de salut révélé en Jésus Christ. Son travail principal est de présenter l’intelligence de la Révélation (intellectus fidei) et le contenu de la foi (auditus fidei). On peut encore dire que sa tâche est l’intelligence de la kénose. D’où le pape demande de faire une analyse des textes scripturaires, ceux de la Tradition vivante de l’Église. Il faut interpréter les sources de la Révélation. La théologie doit se demander ce que les textes entendent communiquer. La théologie doit interpréter des sources en vue de la compréhension de la vérité révélée ou l’élaboration de l’intellectus fidei. Si cette dernière « veut intégrer toute la richesse de la tradition théologique, il doit recourir à la philosophie de l’être »[13].

Dans ce même document, le pape montre la crise actuelle au sujet de la vérité. Ici il fait appel à la théologie morale et demande que celle-ci « mène une réflexion approfondie et sache faire ressortir que ses racines sont dans la Parole de Dieu »[14]. Ceci demande de recourir à l’éthique. Aujourd’hui, l’œuvre théologique de l’Église doit être d’abord au service de l’annonce de la foi et de la catéchèse. Cette annonce concerne le kérygme et invite à la conversion en proposant la vérité du Christ. La catéchèse doit présenter intégralement la doctrine de l’Église. Les théologiens doivent aujourd’hui accorder une attention particulière aux implications philosophiques de la Parole de Dieu en menant une réflexion qui fasse ressortir la densité spéculative et pratique de la science théologique.

II. 3. Intérêt de l’encyclique pour la théologie fondamentale

Lorsqu’on jette un regard attentif dans l’encyclique Fides et ratio, on remarque facilement que le premier chapitre s’articule autour de deux questions clés de la Théologie fondamentale : Révélation et foi. Ces deux éléments apparaissent pour définir la vérité dont l’Église certifie et qu’elle sert. Pour l’atteindre, la raison doit s’ouvrir à la foi et ainsi subsumée par cette dernière, elle révèle l’homme à lui-même et lui dévoile sa vocation transcendante. La théologie fondamentale tire un grand profit de la pertinence du dialogue entre la foi et la raison.  Selon Bouillard, la tâche essentielle de la théologie fondamentale consiste à discerner et à manifester le rapport entre la question de l’existence, que dévoile une analyse philosophique, et la réponse qu’y donne le message chrétien. C’est pourquoi il affirme ceci :

 Il est indispensable que nous sachions présenter une justification rationnelle de notre foi. C’est nécessaire quand on veut aborder l’incroyant et lui dire d’emblée quelque chose qui compte à ses yeux. C’est nécessaire aussi pour réaffermir le chrétien dans sa foi et l’aider à se situer par rapport à l’athéisme qui l’entoure ou par rapport aux religions non chrétiennes. Enfin, une telle réflexion lui permettra de mieux comprendre sa foi, parce qu’elle lui fait un retour aux fondements.[15]

La Révélation doit avoir une  base rationnelle. Voilà pourquoi le pape cite saint Augustin pour montrer le rapport indispensable entre la foi et la raison : « Crois afin que tu comprennes et comprends afin que tu crois » (St Augustin serm 43, 7, 9) Croire selon Saint Augustin « n’est pas autre chose que penser en donnant son assentiment. Quiconque croit pense, et en croyant il pense, et en pensant il croit…Si elle n’est pas pensée, la foi n’est rien »[16].

Le document est revenu sur l’auditus fidei qui a permis de circonscrire le concept de Révélation telle que l’Église l’entend. Au fait, la théologie procède par l’écoute conjointe de l’Ecriture, la Tradition et le Magistère. L’Encyclique fonde sa description de la vérité entendue dans sa plénitude comme Révélation[17] en se basant sur la Parole de Dieu (2Co 4, 1-2 ; 1Th2, 13 ; Ep1, 9) et sur les affirmations de Dei filius et Dei Verbum. Les trois premiers chapitres de l’encyclique Fides et ratio ont pour mission de démontrer que pour nous les chrétiens, la vérité en toute sa plénitude se donne dans la Révélation « que le chemin de sa recherche parte de la foi ou de la raison[18]. L’encyclique tourne autour de l’homme, sujet unificateur de la foi et raison car, c’est lui qui est lancé à la recherche de la vérité et qui pourrait l’atteindre dans la foi, cette dernière ouvrant l’esprit à la Révélation. Le document fournit des grands intérêts pour la théologie fondamentale dans la mesure où il revient sur ce que doit être la tâche de celle-ci. Il s’agit d’élucider de façon critique l’essence et la méthode de la théologie, c’est-à-dire, établir une justification rationnelle de la foi chrétienne, comporter l’étude de la Révélation divine et de son accueil par l’homme.

En ce sens, le pape rejoint Henri Bouillard qui pense que, la tâche essentielle de la théologie fondamentale consiste à discerner et à manifester le rapport entre la question de l’existence que dévoile une analyse philosophique et la réponse qu’y donne le message chrétien. Autrement dit  «  la tâche essentielle de la théologie fondamentale consiste à référer l’une à l’autre, sans les confondre, une herméneutique de l’existence et une herméneutique du message évangélique »[19]. L’objet propre de la théologie fondamentale est de déployer ce qui est antécédent et consonant à la foi à partir de la raison. La théologie fondamentale s’efforce de montrer que l’apparition du Christ répond à l’attente inscrite dans l’existence humaine ; elle cherche à vérifier l’exigence globale du christianisme à l’égard de l’homme. Elle fournit une justification rationnelle de la foi.

 

CHAPITRE III- L’ACTUALITE DE FIDES ET RATIO

III. 1. Le drame actuel de la séparation entre la foi et la raison

Comme l’a montré le pape Jean Paul II dans Fides et ratio, la séparation entre la foi et la raison n’a jamais été un bénéfice pour l’homme en quête de vérité. Car elle génère un appauvrissement mutuel des moyens de connaissance et une « pauvreté anthropologique »[20] qui ne sont pas toujours bénéfiques pour l’homme. A partir de Descartes, la quête de la vérité qui avait permis à la raison d’être dans un rapport de complémentarité avec la foi, a  été remplacée par une quête de la certitude, la raison et la foi ont commencé un divorce qui paraît atteindre son paroxysme dans les temps qui sont les nôtres. C’est dans ce sens qu’il est facile de constater les méfaits du drame actuel de ce divorce. Les graves problèmes éthiques qui se posent avec acuité aujourd’hui, les lois inhumaines qui sont votées un peu partout dans le monde comme l’avortement, le mariage homosexuel, l’euthanasie ; manifestent avec nécessité l’actualité de Fides et ratio qui nous rappelait, il y a 15 ans, que la science ne peut elle-même produire des principes éthiques. Elle a besoin pour cela de la philosophie et de la théologie. Dans ce sens, le monde a besoin que la raison et la foi marchent ensemble. Car  la vérité de la raison ne saurait être opposée à celle de la foi. Chaque fois que le scientifique va contredire la vérité de la Révélation, l’homme prendra des décisions qui sont contraires à son bonheur.

La sécularisation qui est une problématique de grande actualité aujourd’hui révèle aussi l’importance de se mettre à l’école de fides et ratio. Dans la mesure où ce phénomène crée une profonde scission en l’homme en l’obligeant à mettre de côté ce qui est fondamental dans sa vie : la recherche de la vérité et du sens ultime. Ce qui obscurcie en lui le chemin vers la vérité. Ce drame qui est l’héritage de la postmodernité antimétaphysique et antireligieuse où les vérités religieuses et les vérités métaphysiques ont été retirées de la sphère publique et reléguées dans un domaine privé, est une marque qui montre la profondité du fossé qui sépare l’homme de la vérité. Ainsi, nous pouvons dire que beaucoup d’hommes d’aujourd’hui sont loin de la vérité sur Dieu et sur eux-mêmes. Car ils sont comparables à un avion en train de déraper parce qu’il a voulu voler avec une seule aile.

De même, le radicalisme religieux qui s’observe actuellement comme l’extrémisme musulman, le fidéisme de certains leaders religieux ; la foi du charbonnier de plusieurs chrétiens, la vaudouisation de Dieu, la charlatanisation de l’invisible ainsi que l’exorcisme sauvage de certains prêtres et pasteurs ; sont  des signes de cette foi qui veut avancer sans l’aide de la raison. Ce qui n’est pas possible nous dit encore Jean Paul II dans son encyclique.  Car la compréhension du salut dans ses deux dimensions du pas encore et du déjà là c'est-à-dire ; dans son avènement futur et dans sa réalité actuelle nécessite la conjugaison de la foi et de la raison. En ce sens, pour que les choses marchent, pour sortir la science de l’impasse dans laquelle elle est plongée, pour sauver la vie humaine en lui restituant sa dignité, pour sortir des problèmes dus au rationalisme ou au fidéisme, pour trouver le chemin vers la vérité et le sens ultime, ayons le courage de proclamer la nécessaire circularité entre la foi et la raison et leur complémentarité. Car elles ont les deux ailes qui permettent à l’esprit humain d’accéder à la vérité. Il faut donc théologiser la raison et raisonner la foi. Il faut que la Révélation ait son mot à dire dans les vérités de la raison et que la raison ait son mot à dire dans les vérités de foi. C’est pourquoi les problématiques de la nouvelle évangélisation d’une part et l’inculturation d’autre part révèlent la grande actualité de Fides et ratio c'est-à-dire, de proposer la foi chrétienne dans un langage que la raison puisse accueillir afin de susciter la foi.

  III.2. La nouvelle évangélisation et l’inculturation

 Face à ces drames de la séparation de la foi et de la raison, l’Église fait face à une nouvelle problématique de l’évangélisation et de la transmission de la foi chrétienne. Pour cela, elle propose une nouvelle manière de proclamer l’Evangile qu’est la nouvelle évangélisation. Pour les Pères, « on y a recours pour indiquer l’effort de renouvellement que l’Église est appelée à faire pour être à la hauteur des défis que le contexte social et culturel contemporain présente à la foi chrétienne, à son annonce et à son témoignage, suite aux profonds changements en cours ».[21] Elle n’est pas nouvelle parce que la première aurait échoué ou aurait été mal faite, mais plutôt nouvelle dans son ardeur, ses méthodes et ses expressions[22].

Cette option de l’évangélisation qui trouve  son origine historique dans l’envoi des disciples par le Seigneur engage actuellement toute l’Église, chaque chrétien selon sa vocation propre. Dans notre temps, elle doit prendre une dimension tout à fait nouvelle. Elle doit prêter attention aux moyens de communication et adopter le langage des sciences modernes mais d’une manière critique. Elle doit établir un rapport toujours renouvelé entre la foi et la raison afin de révéler au monde la pleine vérité. Cette rencontre de la foi et de la raison doit, en effet, alimenter l’engagement de la communauté chrétienne dans le vaste champ de l’éducation de la foi et de la culture.  Pour cela, il faut une lecture attentive des signes de temps. En effet, la nouvelle évangélisation doit viser la propagation de la foi en apportant une réponse adéquate aux signes des temps, aux besoins des hommes d’aujourd’hui. 

Elle doit promouvoir la dignité de la personne humaine, la famille fondée sur le mariage entre l’homme et la femme, la lutte contre les injustices, les inégalités, les violences, le racisme, la faim et la guerre. Pour les pères synodaux, « la mondialisation, la sécularisation et la nouvelle donne de la société, les migrations avec toutes les difficultés et les souffrances qu’elles comportent doivent représenter les opportunités d’évangélisation ».[23]  C’est pourquoi elle doit rendre présent le Christ dans chaque situation de l’homme. Elle n’est pas seulement un acte de foi mais aussi  de la raison pour pouvoir pénétrer les cœurs de tout le monde et amener les personnes croyantes à « rendre raison de l’espérance qui est en eux». Elle doit rendre témoignage de la vérité totale et conduire toute l’humanité à sa connaissance. Elle doit veiller avec soin au dialogue avec les cultures pour que « la Bonne Nouvelle puisse y prendre chair ». Ici, on parle de l’inculturation.

C’est à  la suite de l’Église primitive qui empruntait la terminologie philosophique et culturelle de la civilisation gréco-romaine pour pouvoir annoncer le message du Christ que le concile Vatican II a ouvert l’Église à la diversité culturelle et philosophique. L’Église d’aujourd’hui se trouve devant la même nécessité pour une annonce réussie de la Bonne Nouvelle. C’est pourquoi le bienheureux pape Jean Paul II dit que « l’inculturation est précisément l’insertion du message évangélique dans la culture [24]». En effet, l’inculturation est analogue à l’Incarnation, c’est-à-dire la manifestation du Christ dans la culture humaine. Alors que la culture se laisse évangéliser, l’Evangile, lui aussi, doit se laisser interpeller par la culture s’il veut être pertinent pour le peuple de tout âge car « l’Evangile a dans son sein la capacité d’accueillir toutes les cultures en favorisant le progrès de ce qui, en chacune d’elle, conduit implicitement vers la pleine explication dans la vérité »[25].

L’inculturation doit s’entendre comme  un dialogue de l’Evangile avec les cultures dans la ferme confiance qu’elle trouvera en chacune d’elle les « semina verbi ». Les acteurs de ce dialogue doivent faire usage de la philosophie qui est selon le pape Jean Paul II «  ce miroir dans lequel se reflète la culture des peuples »[26]. Ainsi, la nouvelle évangélisation doit prendre compte de cette dimension sapientielle de la culture pour que  la Bonne Nouvelle du Christ puisse être comprise par toutes les personnes, chacune dans « sa langue » comme au jour de la première pentecôte. Cette première ne doit pas se confondre avec la culture car elle la transcende. Il y a seulement un enrichissement mutuel. Ici, écoutons ce que dit Africae Munus à ce sujet : D’une part, les cultures doivent donc se laisser imprégner par  l’Evangile mais sans se laisser asservir par aucune afin que ce dernier prenne le visage des innombrables cultures et des peuples où il est accueilli et enraciné ; de l’autre part, en ce moment où on vit le brassage des peuples et des cultures, l’Evangile doit mettre les éléments positifs de la culture en les illuminant de l’intérieur,[27] pour qu’ainsi les hommes puissent atteindre la vérité dans sa plénitude et vivre l’Evangile d’une manière renouvelée.

III-3.  L’œcuménisme et le dialogue interreligieux

L’œcuménisme et le dialogue interreligieux, thèmes relativement récents dans l’histoire du christianisme sont des lieux incontournables pour la réflexion théologique chrétienne aujourd’hui. Car la présence des autres religions qui ne disparaissent pas après deux mille ans de mission chrétienne, la sécularisation avec ses tendances athées et antireligieuses et principalement antichrétiennes, qui élimine Dieu de la sphère publique, et surtout le contexte actuel avec ses mutations et son caractère pluriel, en particulier la mondialisation exigent la cohabitation de plusieurs religions. Ce qui oblige aujourd’hui plus que jamais la théologie chrétienne à reconsidérer son exclusivisme  pour s’établir dans un rapport dialogique avec les autres religions. Dans la mesure où le dialogue interreligieux apparait aujourd’hui comme une nécessité qui montre qu’une démarche théologique sérieuse ne parviendra dans notre monde à élaborer une théologie chrétienne valable, si elle ne tente de comprendre le christianisme à travers son « exister interdépendant ». D’où la nécessité d’ouverture de la théologie chrétienne aux religions. Au regard des nombreuses tensions naturelles entres les grandes religions et les grandes cultures, les problèmes migratoires, le dialogue interreligieux est une exigence pressente dont la théologie chrétienne ne pourrait se dérober.  C’est un de points qui nous permet de voir l’actualité de Fides et ratio. Puisque l’œcuménisme et le dialogue interreligieux ne peuvent être possibles si la foi et la raison sont opposées ou éloignées. Autrement dit, l’effort de se comprendre et se rapprocher des autres confessions chrétiennes et des autres religions oblige de redécouvrir le rapport foi et raison. C'est-à-dire que le rapprochement de la théologie chrétienne avec les autres religions ne peut se faire que sous la modalité du rapport foi et raison.

Ainsi l’encyclique de Jean Paul II, malgré qu’il n’aborde pas directement cette question nous aide tout de même à entrer dans l’esprit d’ouverture à la différence religieuse et dans la reconnaissance des vérités des autres religions. En ce sens, la théologie chrétienne est appelé « à dépasser le paradigme qui considère les autres religions comme une simple déviation appelée à disparaître, un jour, pour arriver à les considérer comme une réalité irréversible avec quoi il faudra cheminer »[28]. En  d’autres termes, c’est en reconnaissant la pluralité religieuse comme un phénomène principiel plutôt que factuel, que la théologie chrétienne pourra vraiment dialoguer avec leur intelligibilité et penser théologiquement l’universalité de la médiation christique.[29]

Ce dialogue est aussi un moyen pour la théologie chrétienne d’approfondir sa double fonction intelligible et herméneutique. Parce que en faisant fond sur le respect de soi-même et en s’exposant pleinement à d’autres voies, à d’autres traditions, à d’autres mystères, à d’autres confessions de foi, bref c’est en entrant dans la vision d’un « exister interdépendant »[30] que la théologie chrétienne trouvera mieux la vérité de sa propre tradition et l’essence chrétienne dans une ouverture aux défis de la raison.[31] La reconnaissance des valeurs des autres  religions est un acte de raison qui devient foi lorsqu’on découvre qu’elles sont semences du Christ. Claude Geffré perçoit cela en ces thèmes «  il faut aller plus loin et tendre vers une théologie interreligieuse qui réinterprète la singularité chrétienne en fonction des richesses d’ordre religieuse dont les autres religions peuvent témoigner »[32]. Ceci est possible si la théologie chrétienne s’élabore dans un rapport nécessaire avec la philosophie. Car:

Le fond du problème théologique n'est pas que les chemins des hommes vers Dieu soient multiples, mais que les chemins de Dieu vers les hommes soient toujours adaptés à la situation culturelle, sociale, religieuse, areligieuse, athée, de chacun. Et l'on reconnaît que ce chemin est chemin de Dieu non pas à cause du vocabulaire religieux qui l'exprime, mais lorsqu'il est à la fois vérité et vie, lorsqu'il permet aux hommes et aux femmes de faire en vérité l'expérience de la vie, que cette vérité s'exprime ou non pour eux dans le cadre d'une religion.[33]

 Ce qui signifie que Fides et ratio nous introduit dans l’esprit de dialogue avec l’altérité religieuse, antireligieuse et athéiste.

 

CONCLUSION GENERALE

Nous avions pour tâche au cours de ce travail de ressortir et présenter la pertinence et l’actualité de l’encyclique Fides et ratio pour le rapport foi et raison en théologie chrétienne. Pour ce faire, nous avons d’abord fait un arrêt épistémologique et analytique sur Fides et ratio pour présenter son auteur, son contexte de publication et ses grandes articulations. Il est apparu que le Bienheureux Jean Paul II l’a publié dans un contexte où la foi et la raison étaient appauvries du fait de leur séparation, autrement dit un contexte où il était important voir urgent de rappeler leurs nécessaires rapports dans la recherche de la vérité. Ensuite, nous avons abordé la problématique de sa pertinence pour le discours théologique chrétien en général et pour la théologie fondamentale en particulier. Ainsi, il est clair que Fides et ratio est un rappel à la théologie chrétienne de la relation incontournable qu’elle doit sans cesse entretenir avec la philosophie surtout sur les plans épistémologique et méthodologique. En faisant une sorte d’ « apologie catholique »[34] de la raison en quête de vérité et du sens ultime, le bienheureux Jean Paul II renforce et encourage la théologie fondamentale dans sa réflexion dialogique à toujours puiser dans la philosophie première pour donner des réponses de la foi aux questions et défis de la raison et aux exigences et problèmes de l’heure.

Enfin, nous avons montré dans une perspective actuelle l’interpellation toujours vivante de Fides et ratio à travers certaines problématiques de l’heure comme le drame actuel de la séparation entre la foi et la raison, la nouvelle évangélisation et l’inculturation ainsi que la question de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux. Il en est ressorti que ces problématiques mettent véritablement en évidence l’actualité de Fides et ratio et l’exigence de se mettre à son école. Ce qui exige de la théologie chrétienne une nouvelle façon de voir, de penser et d’agir pour se construire toujours plus comme une science qui concilie fidélité à sa propre tradition et dialogue avec la rationalité actuelle dans toutes ses diverses facettes.  

   Ainsi, avec Fides et ratio la théologie chrétienne est appelée à sortir du paradigme qui la faisait au service seulement des chrétiens pour devenir théologie interreligieuse avec un fort aspect dialogique sans pourtant perdre son statut de science de la foi. En ce sens la théologie fondamentale qui se formule désormais en termes de position et de proposition, peut toujours rester à l’embrasure de la porte pour aider autant ceux qui sont dedans que ceux qui sont dehors. Fides et ratio est une encyclique d’une très grande richesse qui remet en question le christianisme de catastrophe de certaines Eglises et de certains chrétiens d’Afrique.

BIBLIOGRAPHIE

SOURCE

  • Ø BENOIT XVI, Exhortation post-synodale Africae munus, Libreria Editrice Vaticana, 2011
  • Ø JEAN PAUL II, Encyclique Fides et ratio, Libreria Editrice Vaticana, 1998
  • Ø JEAN PAUL II, Exhortation post-synodale Ecclesia in Africa, Libreria Editrice Vaticana, 1994
  • Ø Discours du pape Benoit XVI à l’occasion du dixième anniversaire de la publication  de Fides et ratio, 2008
  • Ø La Bible de Jérusalem

 

AUTRES OUVRAGES

  • Ø AVELINE Jean-Marc, « Le dialogue interreligieux : chemin d'espérance pour l'humanité » in croire.com
  • Ø BENE Georges « Science et foi : réflexions d’un physicien » Table Ronde, La foi       aujourd’hui, n° 239-240, Paris, 1967, pp. 196-212 
  • Ø BOUILLARD Henri, « L’expérience humaine et le point de départ de la théologie fondamentale », pp. 83-92 Concilium, 6,  1965
  • Ø BRITO Emilio « Le rapport de la théologie fondamentale et de la philosophie de la religion », in SANTEDI KINKUPU Léonard et MALU NYIMI Modeste (Dir), Recherches africaines de théologie n°18, Facultés catholiques de Kinshasa, 2006, pp 247-265  

 

  • Ø CHENU M. D., La théologie est-elle une science ? Librairie Arthème Fayard, Paris, 1957

 

  • Ø GEFFRE Claude, Révélation de Dieu et langage des hommes, « cogitatio fidei » no 63, Paris, Cerf, 1972
  • Ø Commission Théologique Internationale, Théologie aujourd’hui : perspectives, principes et critères, 2012
    • Ø IGIRUKWAYO A.M. Zacharie, Aspect Théologique de l’encyclique Fides et ratio, in Annales de l’Ecole Théologique Saint Cyprien, 5, 1999, Yaoundé, pp.193-216
    • Ø KIM MI JEUNY Agnès, « L’impact de la crise écologique et du dialogue interreligieux sur la théologie chrétienne » in Revue de recherches de sciences religieuses 1er trimestre 100(1) 2012, pp. 85-104

 

       WEBOGRAPHIE

 

 

11-              

Sommaire

INTRODUCTION GENERALE.. 1

CHAPITRE I : PRESENTATION DE L’ENCYCLIQUE.. 2

I.1 Auteur et Contexte. 2

I.2 Problématique et articulation de l’encyclique. 4

CHAPITRE II- LA PERTINENCE DE L’ENCYCLIQUE FIDES ET RATIO.. 8

II.1. La foi et la raison au service de la vérité. 8

II. 2. Intérêt de l’encyclique pour la théologie chrétienne. 10

II. 3. Intérêt de l’encyclique pour la théologie fondamentale. 11

CHAPITRE III- L’ACTUALITE DE FIDES ET RATIO.. 13

III. 1. Le drame actuel de la séparation entre la foi et la raison. 13

III.2. La nouvelle évangélisation et l’inculturation. 13

III-3.  L’œcuménisme et le dialogue interreligieux. 13

CONCLUSION GENERALE.. 13

BIBLIOGRAPHIE.. 13

SOMMAIRE.. 13



[1] Emilio Brito « Le rapport de la théologie fondamentale et de la philosophie de la religion », in Recherches africaines de théologie n°18, Léonard Santedi Kinkupu et Modeste Malu Nyimi (Dir), Facultés catholiques de Kinshasa, 2006, p.252

[2] G. Belleville, Flammes (1965) cité par Georges Bene « Science et foi : réflexions d’un physicien » Table Ronde, La foi aujourd’hui, n° 239-240, 1967, Paris, p.205

[3] Georges Bene, op. cit,  p.205

[4] Cf. A.M. Zacharie Igirukwayo, Aspect Théologique de l’encyclique Fides et ratio, Annales de l’Ecole Théologique Saint Cyprien, 5, 1999, Yaoundé, p.197

[5] Georges Bene, op. cit, pp.208-209

[6] Jean Paul II, Fides et ratio, n°13

[7] Ibidem, n°20

[8]Concile Vatican I, session III, chap. 4 cité par M. D Chenu, La théologie est-elle une science? Librairie Arthème Fayard,  Paris, 1957, pp.35-36

[9] Cf. Jean Paul II, Fides et ratio, n°77

[10] Vatican I, Dei Filius, chap.3 in Commission théologique internationale, n°64

[11] Commission théologique internationale, La théologie aujourd’hui : perspectives, principes et critères, n°60

[12] Jean Paul II, Fides et ratio, n°107

[13] Jean Paul II, Fides et ratio, n°97

[14] Ibidem, n°98

[15] Henri Bouillard, « L’expérience humaine et le point de départ de la théologie fondamentale », Concilium, 6,  1965, p.85

[16] Jean Paul II, Fides et ratio, n°79

[17] Cf. ibidem, n°7-11

[18] A.M.Zacharie Igirukwayo, op.cit, p.197

[19] Henri Bouillard cité par Emilio Brito, op.cit. p.248

[20] Nous nous referons ici à une expression du père Engelberg Mveng dans « Essai d’anthropologie negro africain »  article de son ouvrage l’Afrique dans l’Église. Paroles d’un croyant ; Paris, L’harmattan, 1986, p.98

[21] www.vatican.va,  Lineamenta  sur  la nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi, no5

[22] Benoît XVI, Exhortation post-synodale Africae munus, n°164

[23] www.vatican.va, Lineamenta  sur  la nouvelle évangélisation pour la transmission de la foi , no8

[24] Jean Paul II, Exhortation post-synodale Ecclesia in Africa, no60.

[25] Jean Paul II, Fides et ratio, n°71.

[26] Idem, n°103

[27] Cf. Benoît XVI, Africae munus, n°37-39.

[28] Agnès Kim MI Jeuny, « L’impact de la crise écologique et du dialogue interreligieux sur la théologie chrétienne » in Revue de recherches de sciences religieuses 1er trimestre 100(1) 2012, p.86

[29] Cf ibidem

[30] ibidem

[31] Cf ibidem

[32] Claude Geffre, Révélation de Dieu et langage des hommes, « cogitatio fidei » no 63, Paris, Cerf, 1972, p. 23

[33] Jean-Marc Aveline, « Le dialogue interreligieux : chemin d'espérance pour l'humanité » in croire.com

[34] Discours du pape Benoit XVI à l’occasion du dixième anniversaire de la publication de Fides et ratio in Vatican. Va, 2008.

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8 décembre 2013 7 08 /12 /décembre /2013 21:53

La problématique du rapport entre la foi et la raison est présente aussi bien dans l’histoire de la philosophie que dans celle de la théologie. Car  autant que l’homme est défini comme un être religieux de même, il est aussi défini comme être raisonnable. En ce sens la question de la relation entre ces deux dimensions de sa personne est importante. L’histoire nous révèle un foisonnement de  réponses à ce problème du rapport entre la foi et la raison qui revient à celui du rapport entre théologie et philosophie. Cependant, deux d’entre elles apparaissent comme les plus significatives. D’un côté, une tendance conciliatrice qui voit dans la raison et la foi  deux sources de connaissance qui doivent être mises ensemble pour parvenir à la vérité. De l’autre côté, une tendance séparatiste qui conçoit la raison comme la seule source de la connaissance de la vérité et voit dans la foi un obstacle à l’émergence de cette raison. C’est de cette tendance dont notre contexte actuel est héritier ; autrement dit le monde d’aujourd’hui est marqué par la séparation entre la foi et la raison qui a pris cours avec la philosophie moderne de Descartes ; atteint son apogée avec l’illuminisme d’Emmanuel  Kant et  les différentes philosophies antimétaphysiques et antireligieuses.

Dans un tel contexte la foi et la raison se sont appauvries mutuellement et la recherche de la vérité obscurcie. Mais c’est là aussi que se révèlent plus que jamais une grande soif de sens et une recherche passionnée de la vérité. C’est ainsi que le pape Jean Paul II dans l’objectif de redéfinir de façon claire et nette les rapports  entre foi et raison publiait, il y a 15 ans, une encyclique pour « faire part de quelques réflexions sur la voie qui conduit à la vraie sagesse », voie qui selon lui passe par la conjugaison de la foi et de la raison qui sont « les deux ailles qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité »[1].

Nous voulons dans ce travail nous arrêter sur cette encyclique pour répondre à la question de savoir quelle est la pertinence de Fides et ratio pour le discours théologique chrétien. Pour y répondre, nous allons d’abord faire une étude historico-analytique de l’encyclique pour présenter son auteur, son contexte de publication et ses grandes articulations. Ensuite, nous entrerons dans le cœur de ce travail en réfléchissant sur sa pertinence pour la théologie chrétienne en générale et pour la théologie fondamentale en particulier.  Enfin, nous réfléchirons sur l’actualité de Fides et ratio à la lumière de certaines problématiques de l’heure comme le drame actuel de la séparation entre la foi et raison, la nouvelle évangélisation et l’inculturation, le dialogue interreligieux.

I.1 Auteur et Contexte

I.1.1 L’auteur[2] :

       Karol Wojtyla, qui prendra ensuite le nom de Jean-Paul II, naît en 1920 à Wadowice, une petite ville de Pologne.   Karol Wojtyla est ordonné prêtre le 1er novembre 1946. Il est ensuite envoyé à Rome pour compléter sa formation. Il y reste deux ans et soutient une thèse en théologie sur « La foi dans la pensée de saint Jean de la Croix ».  En 1958, Karol Wojtyla est nommé évêque auxiliaire de Cracovie par le pape Pie XII. Il devient, à 38 ans, le plus jeune évêque de Pologne. Le 13 janvier 1964, il devient archevêque de Cracovie. En 1967, Paul VI le crée cardinal. C’est le 16 octobre 1978 que le Cardinal Wojtyla est élu pape par les cardinaux au Vatican. Il prend à partir de ce moment-là le nom de Jean Paul II.

       Il contribuera à l'effondrement du communisme en Europe de l'Est. Cependant, tous ces combats ne font pas l’unanimité. Le pape avait ainsi des positions très conservatrices sur les questions de morale et de la famille. Cet ardent défenseur du droit à la vie a rappelé l'opposition de l'Église à l'avortement et l'euthanasie. Il réaffirme en février 1993 son opposition au préservatif, précisant que "la chasteté est le seul moyen pour mettre fin à la plaie tragique du SIDA".  Il œuvra également pour le dialogue interreligieux, à l’exemple des conférences d'Assise pour la paix (en 1986 et 2002).

Le 264ème pape a marqué les esprits par le renouveau qu’il a apporté à l’Église catholique. Charismatique et proche des fidèles, il œuvra pour la justice et la dignité de tous. On retiendra de son pontificat (le 3ème plus long de l'histoire) ses nombreux voyages, la lutte contre le communisme et le nazisme, la volonté de rapprochement entre les religions, et son attachement aux valeurs traditionnelles. Au nombre de ses documents majeurs, on compte 14 lettres encycliques, 15 exhortations apostoliques, 11 constitutions apostoliques et 45 lettres apostoliques.

Jean-Paul II meurt au Vatican le 2 avril 2005 à 21 h 37. Le 1er mai 2011, il fut béatifié par le pape Benoît XVI.

 

I.1.2. Contexte.

            La lettre encyclique Fides et ratio est l’œuvre du pape Jean Paul II, écrite juste avant l'an 2000 en date du 14 septembre 1998, fête de la Croix glorieuse car la croix est le lieu d’une rencontre difficile mais féconde entre la foi et la raison. Elle est  la dernière lettre encyclique parue au XXe siècle. Le pape s’adresse d’abord aux évêques, les frères avec qui il partage la mission de manifester la vérité. Il s’adresse en plus aux théologiens et aux philosophes, auxquels revient le devoir de s’acquérir des différents aspects de la vie, il s’adresse enfin aux personnes qui sont à la recherche de la vraie sagesse. Fides et ratio est le résultat d’une réflexion sapientielle de Jean Paul II qui s’est inspiré de ses prédécesseurs qui ont aussi traité des questions sur la foi et la raison.           

Ce document est écrit vers la fin du vingtième siècle, une période de changements rapides et complexes qui expose surtout les jeunes générations, auxquelles appartient l’avenir qui risquent de perdre quelques points de repères et quelques vérités fondamentales de la doctrine catholique et d’être déformées ou rejetées, d’où une nécessité de parler de la vérité et son fondement par rapport à la foi.                                                                                 

            Pendant cette même période, la théologie catholique fait face à une crise postmoderne de la raison classique elle-même, qui a des graves conséquences pour l’intellectus fidei. L’idée de la vérité semble très problématique. La recherche de la vérité ultime apparait souvent occultée. Certains penseurs rejettent l’idée selon laquelle la vérité révélée de Dieu à la foi suppose la raison du croyant et la stimule car la vérité de la Parole de Dieu doit être examinée et scrutée par lui, ainsi commence l’intellectus fidei qui n’a nullement pour objectif de remplacer la foi[3]. C’est ainsi que le pape souligne à ce propos :

Il m'a semblé urgent de rappeler par cette encyclique le grand intérêt que l'Église accorde à la philosophie ; et plus encore le lien profond qui unit le travail théologique à la recherche philosophique de la vérité. De là découle le devoir qu'a le Magistère d'indiquer et de stimuler un mode de pensée philosophique qui ne soit pas en dissonance avec la foi. Il m'incombe de proposer certains principes et certains points de référence que je considère comme nécessaires pour pouvoir instaurer une relation harmonieuse et effective entre la théologie et la philosophie.[4]

Bref, Si le pape publie Fides et ratio, ce n’est pas seulement pour dire son estime profonde pour la philosophie, c’est parce qu’il discerne une menace pesant sur la philosophie en tant que recherche de la vérité ultime. Et cette menace touche l’Église car, pour elle, la philosophie, en plus de sa mission propre, joue un rôle essentiel au service de l’intelligence de la foi. L'encyclique indique ainsi des pistes nouvelles pour le IIIe millénaire en soulignant que la philosophie reste une aide indispensable pour approfondir l’intelligence de la foi et pour communiquer la vérité de l’Evangile à ceux qui ne la connaissent pas encore.

I.2 Problématique et articulation de l’encyclique

I.2.1. Problématique

L’Église ne peut qu’apprécier les efforts de la raison pour atteindre des objectifs qui rendent l’existence personnelle toujours plus digne. Elle voit dans la philosophie le moyen de connaître des vérités fondamentales concernant l’existence de l’homme. En même temps elle considère la philosophie comme une aide indispensable pour approfondir l’intelligence de la foi et pour communiquer la vérité de l’Evangile à ceux qui ne la connaissent pas encore.    

  L’Église, malheureusement, se heurte devant un nouveau défi qui se présente, la forte tentation de séparer la foi et la raison qui domine la fin du vingtième siècle oubliant que le dialogue entre la foi et la raison, entre la théologie et philosophie, est donc requis non seulement par la foi mais aussi par la raison. Ce dialogue, selon le pape, est nécessaire, parce qu’une foi qui rejette la raison ou la méprise, risque de dégénérer en superstition ou en fanatisme, tandis qu’une raison qui délibérément se ferme à la foi, même si elle est susceptible des grandes avancées, ne pourra pas atteindre les plus hauts sommets de ce qui peut être connu.  Bref, la Foi et la Raison sont comme les deux ailes qui permettent à l'esprit humain de s'élever vers la contemplation de la vérité, nous dit le pape. 

Aujourd’hui, la théologie catholique doit faire face à la crise postmoderne de la raison classique elle-même, qui a de graves conséquences pour l’intellectus fidei. Ainsi, naissent diverses formes d’agnosticisme et de relativisme qui font que la recherche philosophique s’égare dans un scepticisme général. Tout devient une simple opinion, toutes les positions se valent et on tombe dans un subjectivisme total. 

Forte de la compétence qui lui revient du fait qu’elle est dépositaire de la Révélation de Jésus Christ, l’Église, face à ces problèmes, entend réaffirmer la nécessité de la réflexion sur la vérité. C’est ainsi que le Pape, pasteur de l’Église et témoin de la vérité divine et catholique, pense qu’en réaffirmant la vérité de la foi, nous pouvons redonner à l’homme de notre époque une authentique confiance en ses capacités cognitives et lancer à la philosophie le défi de retrouver et de développer sa pleine dignité. Il est aussi urgent de parler du thème de la vérité et sur son fondement par rapport à la foi car quelques vérités fondamentales de la doctrine catholique, risquent d’être déformées ou rejetées.

 

I.2.2. Articulation de la lettre encyclique

L’encyclique Fides et ratio commence par une introduction suivie de sept chapitres et se termine par une conclusion. Ce document est fait en numéros sous forme de paragraphes. Ils vont de numéro 1 au numéro 108.

Dans l’introduction (no1-6), le pape Jean Paul II présente l’homme comme un animal chercheur de vérité. Au cœur de l’homme se trouve ainsi inscrite une quête de sens qui donne l’orientation de l’existence : qui suis-je ? D’où viens-je et où vais-je ? Tel est le sens de l’adage socratique : « Connais-toi toi-même ». Jean-Paul II montre bien comment ces questions sont présentes dans toutes les cultures humaines : c’est le Christ incarné qui est la réponse à cette recherche de vérité en tant qu’universel concret. L’Église, en tant que témoin de la Vérité du Christ, en appelle à une réflexion renouvelée sur la vérité et provoque la philosophie à redevenir une sagesseembrassant les grandes questions de l’existence et à retrouver sa vocation métaphysique originelle. Telle est la raison pour laquelle Jean-Paul II entend concentrer son attention sur la véritéet sur son fondementpar rapport à la foi. Jean-Paul II développe sa pensée en trois étapes : il examine d’abord les vocations respectives de la foi et la raison, avant de présenter le combat spirituel de la raison et de la foi, et enfin la mission aujourd’hui de la raison et de la foi.

Le premier chapitre nous parle de la révélation de la sagesse de Dieu (no7-15).  L’Église vit, comme le souligne le pape, dans la conscience que Dieu s’est donné à connaître par Jésus, son fils. Contre le rationalisme qui voudrait limiter la connaissance vraie au seul fruit des capacités naturelles de la raison humaine, l’Église soutient que la foi possède en propre une véritable connaissance et qu’il ne faut pas mélanger deux ordres de connaissance qui ne se confondent pas ni ne s’excluent : la connaissance par la raison naturelle et la connaissance par la foi, les vérités que l’on peut atteindre par la raison naturelle et les mystères qui ne nous sont donnés à connaître que par la Révélation. Cependant, étant manifestation de Dieu, cette Révélation demeure à jamais empreinte de mystère. Même rendue accessible à la foi, elle reste une vérité insondable. C’est pourquoi l’acte de foiest, par nature, un acte d’obéissance à Dieu qui se révèle.                                                                 

Credo ut intellegam, voilà le titre du deuxième chapitre (no16-23) dans lequel le pape Jean-Paul II souligne l’unité entre la connaissance de la raison et celle de la foi, cette dernière permettant l’approfondissement et l’affermissement de ce qu’appréhende la raison humaine. Il n’y a donc pas de concurrence entre la raison et la foi, et la foi n’intervient pas pour réduire l’autonomie de la raison. Elle intervient en affinant le regard intérieur qui permet à l’Homme de discerner la présence de Dieu dans les événements ou dans la nature. L’Homme atteint la vérité par la raison parce qu’éclairé par la foi ainsi il découvre le sens profond de toute chose.

Le troisième chapitre à son tour développe intellego ut credam (no24-35) Quels que soient les genres de vérité, qu’ils s’agissent des vérités d’expérience ou de la vérité scientifique, de doctrines religieuses ou de doctrines philosophiques, la recherche de la vérité s’accompagne toujours d’un acte de foi, c’est-à-direde croyance. En effet, en tant qu’être social, l’Homme est incapable de tout vérifier et établir par lui-même. La croyance peut apparaître comme une forme imparfaite de connaissance ; mais elle recèle aussi une grande richesse humaine dans la grâce de connaître, non dans une évidence autarcique, mais dans la gratitude d’un rapport interpersonnel fondé sur la confiance.

Les rapports entre la foi et la raison sont développés dans le quatrième chapitre (no36-48). Dans ce chapitre, le pape Jean-Paul II reprend dans une perspective historique et critique les rapports qu’ont entretenus la philosophie et la religion. Il cherche à mettre en évidence le mutuel enrichissement de la foi et de la raison philosophique, soulignant la fécondité de leur coopération chez les Pères de l’Église et le caractère néfaste de leur progressive séparation depuis l’époque moderne.

Les interventions du magistère dans le domaine philosophique ont fait l’objet du cinquième chapitre de cette encyclique(no49-63). Le souci du Magistère était de souligner la nécessité de la connaissance rationnelle et donc de la philosophie pour l’intelligence de la foi : connaissance naturelle de Dieu et Révélation, raison et foi sont inséparables l’une de l’autre en même temps qu’irréductibles l’une à l’autre. D’où la résistance conjointe au rationalisme et au fidéisme. Le pape Jean-Paul II aborde ici une question relativement polémique : d’après quelle légitimité l’Église se permet-elle d’intervenir dans les débats philosophiques pour pointer du doigt certaines doctrines ou certains présupposés ? L’indépendance de la philosophie serait-elle menacée par cette intervention du Magistère qui, se faisant, sortirait de ces prérogatives ? Il était donc du devoir du Magistère de l’Église d’encourager une pensée philosophique qui soit en symbiose avec la foi et promouvoir les études philosophiques dans les écoles ecclésiastiques.

L’Interaction entre la théologie et la philosophie est au centre de cet avant dernier chapitre (no64-80). Le pape souligne et montre que  la Parole de Dieu s'adresse à tout homme, en tout temps et sur toute la terre ; et l'homme est naturellement philosophe. Pour sa part, la théologie, en tant qu'élaboration réflexive et scientifique de l'intelligence de cette Parole à la lumière de la foi, ne peut pas s'abstenir d'entrer en relation avec les philosophies élaborées effectivement tout au long de l'histoire, pour certains de ses développements comme pour l'accomplissement de ses tâches spécifiques. Le pape précise que la théologie s'organise comme la science de la foi, à la lumière d'un double principe méthodologique : l'auditus fidei et l'intellectus fidei. Selon le premier principe, elle s'approprie le contenu de la Révélation de la manière dont il s'est progressivement développé dans la sainte Tradition, dans les saintes Ecritures et dans le Magistère vivant de l'Église. Par le second, la théologie veut répondre aux exigences spécifiques de la pensée, en recourant à la réflexion spéculative.

Le chapitre sept est le dernier de cette encyclique (no80-100). Il veut souligner les Exigences et Tâches actuelles. Le pape commence par souligner les exigences impératives de la Parole de Dieu et poursuit en soulignant les tâches actuelles de la théologie.  Une double tâche incombe à la théologie aujourd’hui selon le pape Jean Paul II : d’une part, renouveler ses méthodes pour servir plus efficacement l’évangélisation ; d’autre part, viser audacieusement la vérité ultime proposée par la Révélation, sans se cantonner par principe à des tâches intermédiaires. En tant que présentation de l’intelligence de la Révélation et du contenu de la foi, la théologie a pour centre le mystère trinitaire de Dieu, auquel elle n’a accès que par celui de l’Incarnation du Fils, et plus précisément par le mystère pascal.

 

L’encyclique qui se termine, par une conclusion (no100-108), est une série de vibrants appels. Aux théologiens, pour qu’ils soient attentifs aux implications philosophiques de la Parole de Dieu et à la dimension métaphysique de la vérité, en vue d’un dialogue fructueux avec toute la tradition philosophique. A ceux qui ont la responsabilité de la formation sacerdotale, académique et pastorale de mieux préparer les futurs pasteurs par une formation philosophique solide. Aux philosophes et à ceux qui enseignent la philosophie d’être toujours en quête de la sagesse authentique et de la vérité philosophique et métaphysique. Aux scientifiques, de poursuivre leurs recherches scientifiques pour le bien de l’homme et de rester dans le sillage sapientiel. A tous, un appel de respecter l’homme sauvé par le Christ et en recherche constante de la vérité et du sens. Le pape finit par présenter la sainte Vierge Marie comme le Trône de la Sagesse et refuge de ceux qui font de leur vie une recherche de la sagesse.



[1] Jean Paul II, Fides et ratio, prologue

[2] Cf. www.vatican.va et www.wikipedia.org; Biographie de Jean Paul II

[3] Commission Théologique Internationale, Théologie aujourd’hui : perspectives, principes et critères, no63, 2012.

[4] Jean Paul II, Fides et ratio, no63.

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15 octobre 2013 2 15 /10 /octobre /2013 16:49
INTRODUCTION

 

L’importance de la liturgie et du culte dans la vie chrétienne a été au cœur de l’enseignement du pape Benoît XVI durant les sept années de son pontificat. Nous pouvons affirmer ici que l’orientation qu’il a donnée à la liturgie durant son pontificat est le fruit de ses réflexions sur la liturgie qu’il avait exposées sept ans avant son élection comme pape dans son célèbre traité, L’esprit de la Liturgie qui reprend le célèbre titre du livre de Guardini publié en 1918 dans lequel celui-ci voyait déjà le renouveau liturgique apporté par le Concile Vatican II. Le Cardinal Ratzinger exposait dans cet ouvrage sa vision de la reforme liturgique introduite par le concile et le risque d’humanisation et de sacralisation de la liturgie qui en découle. Voilà pourquoi il plaide inlassablement pour que la liturgie n’apparaisse jamais comme une fabrication humaine, mais comme cet ensemble lié à la Tradition vivante de l’Église et qui ouvre les hommes au mystère de Dieu et à sa révélation. Joseph Ratzinger voulait retrouver l’authentique esprit de la liturgie en assumant la vénérable tradition multiséculaire de l'Église. L’esprit de la liturgie est un ouvrage clair et limpide pour réaffirmer dans notre monde en pleine mutation la place unique et centrale de la liturgie dans la vie de l’Église et le fait qu’elle ouvre les hommes au mystère de Dieu et à sa révélation. Nous voulons nous arrêter un temps sur ce livre pour ressortir ses grandes articulations afin d’en déduire son importance pour la vie de l’Eglise. Pour ce faire, nous commencerons par présenter l’auteur de l’œuvre ainsi que son contexte de publication, après nous allons entrer dans L’esprit de la liturgie pour ressortir  son corpus essentiel et ses idées maîtresses. Pour terminer nous porterons une note appréciative à cet ouvrage.

 

I-   AUTEUR ET CONTEXTE DE PUBLICATION

1-   Auteur

      Le Cardinal Joseph Ratzinger, le Pape Benoît XVI, est né à Marktl am Inn, dans le Diocèse de Passau (Allemagne), le 16 avril 1927 (Samedi saint); il a été baptisé le jour même. De 1946 à 1951, il étudie la philosophie et la théologie à l’Institut supérieur de Freising et à l’Université de Munich. Il est ordonné prêtre le 29 juin 1951. En 1953, il obtient son doctorat en théologie avec une thèse intitulée : « Peuple et maison de Dieu dans la doctrine de l’Église chez saint Augustin ».  De 1962 à 1965, il contribue de façon remarquable au Concile Vatican II. Le 25 mars 1977, le Pape Paul VI le nomme Archevêque de Munich et Freising. Il reçoit l’ordination épiscopale le 28 mai suivant. Paul VI le créa cardinal au Consistoire du 27 juin 1977 avec le titre de « Santa Maria Consolatrice al Tiburtino ». Nommé par Jean-Paul II, le 25 novembre 1981, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi et Président de la Commission biblique pontificale ainsi que de la Commission théologique internationale, il renonce au gouvernement pastoral de l’archidiocèse de Munich et Freising le 15 février 1982[1]. Le 5 avril 1993, le Pape l’élève au rang de Cardinal-Évêque en lui confiant le siège suburbicaire de Velletri-Segni. Il est élu pape le 24 avril 2005 à Rome. Il renoncera à cette charge le 28 février 2013. 

2- contexte de publication

Pour bien cerner les objectifs, les finalités et le sens général d’un ouvrage comme celui du Cardinal Joseph Ratzinger, il serait bon de reconstituer son contexte de publication afin de dégager les points importants qui permettent de saisir l’intelligence. C’est à cet exercice que nous voulons nous atteler dans cette partie de notre travail. L’Esprit de la Liturgie fut publié en 2000 en Allemand et la traduction française parue en 2001. Ainsi, c’est un livre qui est publié presque 40 ans après le concile Vatican II qui est le moment événementiel le plus important dans l’histoire de l’Eglise au 20è siècle. Ce livre porte aussi le titre d’un ouvrage important dans l’histoire de la liturgie au 20è siècle celui de Romano Guardini, qui parut en 1918. C’est de ce livre dont le Cardinal s’est inspiré pour titrer son livre. Le livre de Guardini est considéré comme « le point de départ du mouvement liturgique en Allemagne »[2]. Il aida de façon spéciale à porter un regard nouveau sur la liturgie dans sa beauté, sa richesse cachée et sa grandeur à travers les siècles comme centre vivifiant de l’Eglise et de la vie chrétienne. Guardini favorisa une célébration liturgique « plus substantielle ». On peut ainsi sans exagérer dire que le livre de Guardini, comme Mediator Dei du Pape Pie XII, est un des livres liturgiques qui ont été annonciateurs et inspirateurs pour la reforme liturgique du concile Vatican II.

Un des  éléments essentiels de la dynamique du renouveau ecclésial apporté par le concile Vatican II fut la grande reforme liturgique avec la publication de la constitution dogmatique sur la liturgie Sacrosanctum concilium. Celle-ci avait entre autre mis un accent particulier sur la participation active du peuple de Dieu au déroulement liturgique et favoriser un recentrage humble et sobre sur le véritable mystère de la présence du Christ dans son Église. Autrement dit, l’esprit de la Liturgie est publié après les grands changements liturgiques survenus  dans l’Eglise après le concile. Il peut dans ce sens être perçu comme une histoire de la liturgie au 20è siècle avec une forte allusion à la reforme liturgique conciliaire. On peut ainsi se poser la question si ce livre est une réaction contre la reforme conciliaire après prés de 40 ans de pratique ou s’il est une volonté de fidélité. Ce qui est intrigant est que ce livre qui parait aux portes du troisième millénaire après les grands changement rapides et complexes de ce monde,  peut surgir comme une volonté ferme, voire une urgence pour le Cardinal de rappeler le sens profond de la liturgie que le concile Vatican II avait remis en valeur et qui risque d’être recouvert ou mis de côté et nous pensons que c’est dans cette mouvance que le Pape Jean Paul II avait publié une année avant une lettre apostolique Dies Domini sur la sanctification du Dimanche pour justement rappeler dans ce monde en profonde mutation l’importance et le sens profond de la célébration du dimanche dans la vie chrétienne. Ainsi, L’esprit de la liturgie peut paraître comme une invitation à la redécouverte du sens chrétien de la liturgie et surtout de son esprit qui doit se centrer sur le mystère du Christ.  

 

  1. II.               STRUCTURE ET ARTICULATION DU LIVRE 

        II.1 Structure externe

         L’Esprit de la Liturgie, du cardinal Joseph RATZINGER, est une traduction  de l’Allemand par Génia Català avec la collaboration de Gregory Solari. Son édition originale c’est : Der  Geist der liturgie, Herder  Verlag, 2000. Cet ouvrage commence avec un avant-propos et est subdivisé en quatre parties composées des chapitres. La première partie est intitulée l’essence de la liturgie. Elle est composée de trois chapitres ci-après : la place de la liturgie dans la vie humaine ; Liturgie, Cosmos, Histoire et la forme fondamentale de la liturgie chrétienne. La deuxième partie à son tour parle du temps et l’espace dans la liturgie. Espace et temps dans la liturgie, le lieu sacré, l’autel et l’orientation de la prière, la réserve eucharistique et le temps sacré sont les cinq chapitres successifs qui font le corps de cette partie. Pour ce concerne la troisième, art et liturgie, deux chapitres y sont développés: Image et liturgie ainsi musique et liturgie.  La quatrième partie, la forme de la liturgie, est organisée en deux chapitres. Le premier chapitre porte sur le rite et le deuxième chapitre, quant à lui, est focalisé sur le corps dans la liturgie. Le livre  termine par des indications bibliographiques.

     II.2 Structure interne

1-      Première partie : l’essence de la liturgie

La première partie du livre Lesprit de la liturgie  du cardinal Joseph RATZINGER est subdivisée en trois chapitres : la place de la liturgie dans la vie humaine ; Liturgie, Cosmos, Histoire et la forme fondamentale de la liturgie chrétienne. 

Dans le premier chapitre, la place de la liturgie dans la vie humaine, la liturgie est conçue comme le prélude à la vie future, à la vie éternelle. Par elle, l’homme vit une vie éternelle anticipée et est appelé à adorer Dieu pour solidifier son rapport avec Lui, avec ses semblables et avec le reste de la création. La liturgie tire son essence et son ordonnance de Dieu même et de sa révélation. 

Le deuxième chapitre souligne les liens qui existent entre la liturgie, le cosmos et l’histoire. La création est le lieu de l’alliance, elle a pour raison d’être l’histoire d’amour entre Dieu et l’homme. Le culte et la création ont en commun la déification, l’édification d’un univers de liberté et d’amour. Il est aussi à souligner que le cosmos comme création n’est pas une construction immuable, il est un mouvement, qui va d’un commencement vers une fin, et en ce sens il est histoire. Il est donc difficile et impossible de séparer la liturgie, le cosmos et l’histoire car ces trois éléments sont liés l’un à l’autre si l’on se réfère à l’histoire du salut.

Le troisième chapitre quant à lui, montre le passage de l’Ancien au Nouveau Testament pour parler de la forme fondamentale de la liturgie chrétienne. Dans l’Ancien Testament, le culte se présente comme une recherche d’expiation, de pardon et de réconciliation après la conscience de la chute et de l’aliénation de l’être humain. Le sacrifice d’Abraham et la Pâque juive servent d’exemples. Ces événements expliquent le fondement de la foi juive pour lequel Jésus est venu, non pas pour abolir mais pour donner une nouvelle signification par sa mort et sa résurrection, la Pâques. L’Eucharistie, comme mémorial de celle-ci, devient alors le point de rencontre de tous les fils de l’Ancienne Alliance et de toute l’histoire religieuse de l’humanité. De cela, quatre aspects essentiels de la forme du culte chrétiens sont signalées : d’abord la liturgie chrétienne considère que le temple nouveau existe déjà, le Christ, crucifié et ressuscité. Ensuite, l’universalité est un trait propre au culte Chrétien. En plus, elle est cette adoration du Logos qui s’est fait chair et que l’on contemple sous l’espèce Eucharistique. Enfin, cette liturgie accomplit à la fois les promesses de l’Ancien Testament et la quête religieuse du l’humanité. Elle reste une liturgie de l’espérance.

2-      Deuxième partie : le temps et l’espace dans la liturgie

La deuxième partie est organisée en cinq chapitres : le premier chapitre porte sur l’espace et le temps dans la liturgie, le deuxième se focalise sur le lieu sacré bien entendu la signification du bâtiment de l’Église, le troisième sur l’autel et l’orientation de la prière, le quatrième sur la réserve eucharistique et le cinquième sur le temps sacré.

Dans le chapitre premier, Espace et le temps dans la liturgie, Ratzinger se sert de la transition décrite par les Pères, de l’Ancien au Nouveau Testament comme mouvement en trois étapes, ombre, image et réalité, pour montrer la naissance de la liturgie. Au fait, dans le Nouveau Testament, l’ombre fait place à l’image. On trouve une image entre ombre et réalité. C’est cette conception néotestamentaire qui a donné naissance à la théologie de la liturgie chrétienne. Trois plans constituent le culte chrétien : le plan médian correspondant aux paroles et actes de Jésus pendant la sainte cène, noyau de la célébration liturgique. Le reste de la liturgie s’est développée à partir d’une synthèse du culte divin dans la synagogue et dans le temple. La liturgie chrétienne doit évoquer le kérygme. Ce sacrifice offert une fois pour toutes ne signifie pas « passé » ; ce qui leur conférait une caractéristique de sans actualité. Il dépasse le temps car ce dernier lui-même est « absorbé dans ce qui dépasse le temps »[3]. Ainsi « c’est dans l’aujourd’hui que la liturgie chrétienne nous rend contemporains les événements qui forment son fondement »[4]. Ceci est nommé plan liturgique. Le troisième plan est celui de l’actualisation. Il veut dire que la liturgie touche notre vie quotidienne. Trois degrés constituent le fondement liturgique : la pâque historique de Jésus, le perpétuel qui entre dans le présent et la réalité historique. Notre liturgie a un sens lorsque le passé, le présent et l’avenir s’interprètent et touchent l’éternité.

Au deuxième chapitre, Le lieu sacré : la signification du bâtiment de l’Église, il est question de montrer comment l’espace de la maison de Dieu chrétien s’est élaboré dans une parfaite continuité avec celui de la synagogue, tout en développant sa nouveauté spécifiquement chrétienne. Ratzinger commence par une description de la synagogue, car, dit-il, « les éléments essentiels de l’espace du culte chrétien s’y trouvent déjà réunis »[5]. On parlerait de la continuité et du renouveau spirituel. Trois innovations ont été portées par la foi chrétienne. D’abord, le temple n’est plus considéré comme une présence terrestre de Dieu. On tourne le regard vers l’Orient, vers le soleil levant. L’Orient devient le lieu de la shekinah. Ensuite, l’autel sur lequel est célébré le sacrifice eucharistique se trouve dans l’abside, adossé au mur oriental. Il est  le point focal de la liturgie puisque l’Eucharistie nous donne accès à la liturgie céleste. Enfin, le tabernacle de la Parole garde sa place comme dans la synagogue mais les rouleaux de la Torah s’accompagnent maintenant des Evangiles permettant de la comprendre.

Dans le troisième chapitre, l’autel et l’orientation de la prière, Ratzinger montre que malgré toutes les transformations faites, une chose est restée claire à l’esprit de toute la chrétienté : la prière vers l’Orient est de tradition depuis l’origine du christianisme. Elle exprime la spécificité de la synthèse chrétienne. Mais pour les chrétiens, convaincus que Dieu est partout, il n’est plus question de se tourner vers l’Orient. Le signe cosmique du soleil levant symbolise l’universalité de Dieu qui est au delà de tout lieu et manifeste le caractère concret de la Révélation. La nouveauté du  XXème siècle est la célébration eucharistique versus populum, où l’autel est placé de façon que le prêtre et l’assemblée se regardent ; ce qui constitue l’unité et la participation active dans la prière.

Dans le chapitre sur la réserve eucharistique, Joseph Ratzinger commence par préciser que l´Eglise primitive a connu « la tente sacrée » ; en référence au judaïsme, l´autel était surmonté et un rideau le dissimulait, c´est là qu´était exposé la Parole de Dieu. Ce n´est qu´au IIe millénaire le tabernacle fit son entré, mais non sans gêne. En effet, deux groupe se formèrent ; les « partisans » et les « non-partisans ». Les premiers y voient ici un signe de décadence, une déviation de la piété médiévale. D´où l´origine du fameux slogan « les dons eucharistiques sont là pour être mangés et non pour être regardés ». L´autre partie, y voyaient dans l´adoration Eucharistique une expression d´action de grâce et de louange. Selon le cardinal Ratzinger, s´appuyant sur les textes de St Paul, de saint Jean, des Pères de l´Eglise et des docteurs de l´Eglise, rappelle l´effectivité de la transsubstantiation eucharistique. Il affirme lui aussi que l´Eucharistie se donne à manger, mais cela ne s´oppose nullement à l´adoration, les deux vont même de pair : « Manger le Christ, c´est en même temps l´adorer »[6]. De plus, dit-il, une église sans présence eucharistique, est un simple lieu de prière, « elle comme morte ». C´est l´Eucharistie, présente dans l´église qui la vivifie et lui donne son sens le plus profond.

Quant au chapitre sur le temps sacré, il s´agit de présenter l´auteur de présenter les deux périodes liturgiques fortes de l´Eglise, comme des fêtes qui ont une origine historique mais qui sont liés aux cycles astraux. La pâque a comme origine, une fête nomade. Seulement, dans le judaïsme, elle est liée à un fait historique : la sortie de l´Egypte ; la pâque est donc pour le juif un moment d´action de grâce. Chez les chrétiens, la pâque revêt un caractère autre ; le dernier ennemi étant la mort, par sa mort et sa résurrection, le Christ nous libère du pouvoir de la mort. Mais que ce soit dans le judaïsme comme dans le christianisme, cette fête est liée au cycle lunaire. Les juifs et les chrétiens orientaux la célèbre le 14 Nisan. L´Eglise d´occident la célèbre le premier dimanche suivant la pleine lune.

Par ailleurs, la fête de Noel se célèbre le 25 décembre, et selon Ratzinger, le choix de cette date ne correspond pas à ce qu´affirmaient les vieux mythes du culte « sol invictus », le choix est historique. En fait, tout part du 25 Mars, date de l´anniversaire de la mort de Jésus chez les chrétiens, et chez les juifs elle est considérée comme premier jour de la création. Cette date sera progressivement considérée chez les chrétiens comme date de la nouvelle création en Christ, donc jour de l´annonciation et de la conception du Seigneur dans le sein de la Vierge Marie. De cette considération, le 25 décembre, (soit 9 mois après la conception), est choisi comme jour de la naissance de Jésus. Cependant, en cette date, les « païens » célébraient la fête du dieu soleil, chez les chrétiens, la naissance du Christ est le levé du véritable soleil de l´histoire, la véritable lumière du monde. Il s´agissait pour le cardinal Ratzinger de montrer que les deux grandes fêtes liturgiques chrétiennes sont liées aux astres, sans toutefois être des évènements zodiacaux, mais des fêtes purement historiques.

3-      Troisième partie: Art et liturgie

Image et musique dans la liturgie constituent les deux chapitres de cette troisième partie. Dans la liturgie catholique, les images ont une grande importance. Dans l’Ancien Testament, elles sont des représentations qui jouent le rôle de protection du mystère, illustrations de l’histoire du salut ou encore mémoires des actes passés de Dieu. Dans le Nouveau Testament, avec les chrétiens, les images donnent la certitude que le monde à venir  n’est pas une chimère et que notre attente de l’avènement du Christ est fondée. Selon Joseph Ratzinger, les images ou les icônes ont une théologie trinitaire fondée sur le regard de la foi. A ce sujet, il dit: « elles nous aident à discerner l’image du Père dans le Christ, et c’est l’Esprit Saint qui ouvre notre regard et nous entraîne dans un mouvement vers le Père, ce regard qui apprend à voir le Christ non selon la chair mais par l’esprit, et nous donne de voir en même temps le Père [7]». C’est pourquoi le pape condamne l’iconoclasme et encourage à avoir certaines images dans des églises locales et dans des maisons familiales mais sans abus. Le Cardinal Joseph Ratzinger demande aux artistes de s’ouvrir au creator spiritus pour pouvoir faire face à la crise actuelle dans l’art.

La musique dans la liturgie, quant à elle, a une place digne d’être signalée. D’une manière concrète, le chant relate toute l’expérience humaine comme par exemple le deuil, la plainte, l’accusation, l’angoisse, l’espoir, la confiance, la reconnaissance, la joie etc.

4-      Quatrième partie : la forme de la liturgie

La quatrième partie de L’esprit de la liturgie est organisée en deux chapitres. Le premier chapitre porte sur le rite et le deuxième chapitre, quant à lui, est focalisé sur le corps dans la liturgie.

Dans le premier chapitre, Joseph Ratzinger tient à définir ce qu’est le rite et sa place dans la liturgie en passant en revue les rites existant ainsi que leurs liens réciproques. Ainsi, le rite est la « mise en règles » de la louange rendue au Christ dans le mystère pascal. Il transcende la liturgie car comprend en plus la vie spirituelle et les structures juridiques de la vie de l’Eglise. Au cours de l’histoire de l’Eglise, On a vu naître plusieurs rites en fonction des espaces et lieux de la Révélation. Quatre centres régulateurs ont eu la primauté sur les rites : Rome, Alexandrie, Antioche et Byzance. Mais tous sont attachés à la tradition apostolique et ambrassent plusieurs civilisations en créant une communauté de langues et de cultures. Ces rites ont une composante diachronique et une composante « trans-spatiale » avec pour source la Révélation. C’est pourquoi Joseph Ratzinger tient à mettre en garde contre le danger de la vision marxiste du monde qui lie créativité à « décréation », du nihilisme dans ce monde de rationalité et de technologie sans enfermer le rite dans la rigidité car Dieu continue à agir dans l’histoire des hommes.

Dans le chapitre sur le corps dans la liturgie, Joseph Ratzinger développe les points suivants : participation active, le signe de la croix, agenouillement et inclinaison, station debout et assise, les gestes, parole et silence, les habits liturgiques et la matière des sacrements.

Que sommes-nous censés faire lors de la sainte liturgie ? Telle est la question qui anime Joseph Ratzinger sur la participation active des chrétiens. La sainte liturgie est une affaire de tous. C’est la participatio actuosa. Elle trouve son centre et son fondement dans l’oratio, la prière eucharistique, le « canon ». L’oratio ouvre l’espace à l’actio de Dieu. C’est pourquoi lorsque la prière eucharistique commence, toute activité doit cesser pour laisser place à la contemplation du Seigneur et les gestes du corps doivent être disciplinés. Ainsi « il faudra, souligne Joseph Ratzinger, éviter que le drame divin se transforme en parodie. » d’où la nécessité d’une bonne formation liturgique des prêtres et des laïcs.

Le signe de la croix, quant à lui, est le geste de prière chrétien fondamental. Il exprime  corporellement notre foi dans le Christ. C’est une profession de foi, d’espérance, un oui visible et public à celui qui, dans sa chair, a manifesté jusqu’à l’extrême l’amour de Dieu. C’est aussi un signe de passion et de résurrection, de salut et de la victoire de Jésus, de bénédiction des chrétiens. Elle a une dimension à la fois historique, cosmique et trinitaire.

En outre, Joseph Ratzinger réaffirme la place de l’agenouillement dans la liturgie malgré toutes les opinions négatrices à ce propos. L’agenouillement est l’expression de notre humilité devant le Christ. C’est aussi un acte de foi en signe d’adoration à Dieu. C’est un geste non seulement chrétien mais, véritablement christologique. Alors, une liturgie qui ne connaîtrait plus l’agenouillement serait intrinsèquement malade. Il faut pour cela réapprendre à nous agenouiller et réintroduire l’agenouillement partout où il a disparu.

La station debout par contre était et reste, pour les chrétiens, la position de prière durant le temps pascal, temps de la joie et de la victoire de Jésus-Christ. La position assise doit favoriser le recueillement et la détente du corps, pour que rien n’entrave notre écoute et notre  compréhension. La liturgie doit être tournée vers Dieu et non pas vers les hommes. Il faut donc éviter de faire de la célébration eucharistique un lieu de spectacle, de pantomimes et de danses.

     Joseph Ratzinger distingue d’une part le geste des bras ouverts ou levés vers le ciel et d’autre part le geste de mains jointes. Il voit dans le geste des bras ouvertes une expression de non violence. Un signe de paix et d’espérance qui nous ouvre à l’autre. Ce geste nous conduit au désir de connaitre le Dieu caché à travers la prière. Les chrétiens par la suite donneront une valeur christologique à ce geste pour signifier les bras du Crucifié dégageant la profondeur du geste dans la prière originelle. La jointure de nos mains, comme geste, symboliserait la mise de notre destin dans les mains du Seigneur.

     En plus, Joseph Ratzinger souligne que la parole joue un rôle primordial dans la liturgie, car elle est présente tout au long de cette dernière. Face au mystère infini de Dieu dont notre langage ne peut exprimer la grandeur, on est appelé à faire silence. A l’évidence, le silence appartient à la liturgie. Ainsi, le silence se présente comme geste liturgique qui n’est pas une simple absence de discours, ni d’action, mais il se veut plein, substantiel et positif, dévoilant en effet le sens de la liturgie.

Joseph Ratzinger nous montre aussi que le vêtement liturgique nous rappelle la voie nouvelle que le baptême a ouverte et que l’Eucharistie parachève. Voie qui conduit le monde à venir et dont les méandres se dessinent déjà dans notre vie quotidienne au moyen des Sacrements. De surcroit, l’habit liturgique est donc à la fois l’essence et l’anticipation de ce nouveau vêtement, c’est-à-dire, le corps ressuscité de Jésus, notre demeure éternelle.

     Ratzinger rappelle que la liturgie catholique est à la fois liturgie du Verbe incarné et cosmique. De ce fait, la matière des Sacrements serait présentée sous la forme des éléments naturels ou matériels qui composent notre cosmos. Pour lui, les éléments tels que le feu sacré de la Vigile pascale, le cierge et bien d’autres accessoires liturgiques ne sont que les symboles qui participent au déploiement de la liturgie et que leur présence dans celle-ci est considérée comme la matière des sacrements. Poursuivant sa pensée, il relève d’autres éléments qui sont susceptibles de jouer le rôle de matière des sacrements. Il s’agit de l’eau, l’huile d’olive, du pain de froment.

III-ELABORATION CRITIQUE

 

L’esprit de la liturgie de Joseph Ratzinger est riche en intérêt. Dans le débat œcuménique provoqué par la publication de la lettre encyclique de Jean-Paul II, Ecclesia De Eucharistia, Olivier Bauer, protestant, Professeur adjoint à la Faculté de théologie et de sciences des religions à l'Université de Lausanne,  propose une lecture critique de l’ouvrage que le cardinal Joseph Ratzinger a consacrée à L’esprit de la liturgie. En théologien pratique, il montre comment le Président de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi conçoit la messe et démonte sa prétention à définir ainsi le véritable culte chrétien.

Dans cette étude critique d'Olivier Bauer : « Lettre ouverte à propos de l'esprit de la liturgie », ouvrage de celui qui est devenu notre pape Benoît XVI, le cardinal Ratzinger va répondre. Ses réponses ne sont pas sans rapport avec l'esprit du "Motu Proprio Summorum Pontificum".[8] Nonobstant les critiques faites par Olivier Bauer surtout sur l’orientation en direction de l’Orient du lieu de la prière, nous voulons ici souligner la pertinence de ce document pour la théologie,  la pastorale, la liturgie et l’anthropologie.

1-      Intérêt théologique

Le cardinal Ratzinger veut donner une signification théologique à tous les éléments qui entrent en compte dans la célébration liturgique. Il prend pour appui les données scripturales et historiques. En effet, toutes les actions liturgiques ont un fondement biblique et se sont développées au cours de l’histoire vétérotestamentaire et néotestamentaire et même dans l’histoire des religions mondaines. Il fait appel à l’Ancien Testament et au Nouveau Testament et à la sainte Tradition de l’Eglise, car la liturgie ne saurait se détacher de la sainte Tradition.

Le livre a aussi une grande portée christologique. Toute la liturgie doit être comprise en rapport avec le Christ. Ratzinger aborde les différents aspects de la christologie liturgique : disposition de l’autel, orientation de la célébration, place de la croix, gestes, participation des fidèles, langues, chants, rites, etc. A cette aune, il mesure aussi les déviations liturgiques, théoriques et pratiques, qui ont contribué à réduire la célébration des Mystères sacrés à une « auto-célébration » de l’assemblée liturgique. Ainsi, L’esprit de la liturgie est une somme de théologie liturgique pour corriger les deviations nées de la réforme liturgique catholique. En effet, la constitution conciliaire sur la liturgie Sacrosanctum Concilium, met au centre de la définition de la liturgie le Verbe fait chair et le Christ en son mystère pascal[9].

En outre, le livre a une portée trinitaire : la personne du Christ est au centre du culte chrétien. Mais ce culte se fait dans l’Esprit Saint  et est orienté vers Dieu le Père. La liturgie devient ainsi la théologie célébrée comme le stipulait déjà le Concile Vatican II. C’est pourquoi Benoit XVI cherche à redonner les fondements théologiques à la divine liturgie. C’est dans ce sens que Mgr Claude Dageno, Evêque d’Angoulême dira « Benoit XVI plaide inlassablement pour que la liturgie n’apparaisse jamais comme une fabrication humaine, mais comme cet ensemble lié à la tradition vivante de l’Eglise et qui ouvre les hommes au mystère de Dieu et à sa révélation »[10].

Joseph Ratzinger analyse les conséquences de l’application de la reforme liturgique voulue par Vatican II en 1969. Sans jamais rejeter le bien fondé de cette reforme, il en critique cependant la traduction dans les faits à partir des années 70. Devenu pape en 2005, le 22 février 2006, Benoit XVI publiait l’exhortation post synodale sur l’Eucharistie et accorde une grande place à la question de la liturgie.

2-   Intérêt pastoral et liturgique

Ce livre  se présente comme une symphonie de la beauté de l’esprit de la liturgie qui doit être ce par quoi l’homme est transporté vers « un ailleurs », « vers Dieu ». Que la liturgie soit  l’élément qui met l’homme en relation avec Dieu. Le livre nous révèle aussi l’importance du silence pour saisir et entrer dans l’esprit de la liturgie. Car si la liturgie nous fait entrer dans le mystère de Dieu qui dépasse toute parole, le silence devient l’attitude nécessaire pour vivre ce moment. Dans nos Eglises où ce sont souvent le bruit, le chant, les paroles qui rythment nos liturgies, ce rappel survient comme fondamental pour comprendre que dans toute œuvre humaine même liturgique, c’est Dieu qui est premier. Ainsi, L’esprit de la liturgie nous invite non pas à multiplier nos paroles et gestes, mais à « écouter et faire mémoire de ce que Dieu dit et réalise dans nos vies »[11]

Dans la liturgie, tout a un sens, une raison d’être. Rien n’est fait au hasard. C’est pourquoi il faut purifier la liturgie des choses inadéquates et remettre chaque chose à sa place, revaloriser ce que notre période postmoderne considère comme étant désuet, dépassé. Il y a pour cela un grand chantier à l’occurrence la formation des liturgistes et des agents pastoraux  afin  qu’ils entrent dans le mystère liturgique et soient en harmonie avec son esprit pour ne pas sombrer dans la crise liturgique. Pour Christophe Théobald en effet, « la crise contemporaine du rite en christianisme viendrait alors de la difficulté à négocier l’écart entre l’hétérotopie maximale et l’hétérotopie minimale, entre hiératisme et banalisation »[12]. C’est à ce danger que Joseph Ratzinger veut nous mettre en garde en nous invitant à entrer véritablement dans l’esprit de la liturgie.

Plusieurs années après la publication de son ouvrage, en effet, devenu pape, Benoît XVI, va publier en 2007 le motu propio Summorum Pontificum sur l’autorisation d’utiliser les livres liturgiques preconciliaires. Ainsi, il autorise de nouveau la célébration liturgique avec le missel de Pie V qui avait été interdit après la publication de celui de Paul VI. En dénonçant la montée du cléricalisme dans la liturgie, à cause de la mauvaise herméneutique de l’esprit du concile, il montre la continuité qu’il y a entre la liturgie préconciliaire et la liturgie postconciliaire. Mais il dénonce le fait qu’une mauvaise herméneutique du concile ait du  prêtre ou de l’animateur liturgique « le véritable point de référence de la célébration liturgique. Tout se rapporte à lui. Il faut le regarder, suivre ses gestes, lui répondre. C’est sa personnalité qui porte toute l’action. Il est devenu comme un ‘‘one man show’’ « Dieu, est de plus en plus absent de la scène ». les dérives sont allées dans tous les sens. S’agissant par exemple de la musique dans l’Eglise, elle doit conserver son caractère sacré et non pas devenir une « musique commerciale » qui « n’est rien d’autre, finalement qu’un culte de la banalité »[13] et la « musique rock et ses dérivés » qui sont les vecteurs de passions élémentaires. Cette banalisation de la liturgie n’a pas seulement été l’apanage des Eglises occidentales. Les pays d’Afrique dans la recherche de l’inculturation des réalités liturgiques n’ont pas aussi été à l’abri. C’est pourquoi nous trouvons pertinent ce constat de l’abbé Antoine Fouda Essomba lors d’une conférence sur « la réception de Vatican II en Afrique quarante ans après » :

Avec le temps, la composition des chants liturgiques ne sera plus l’apanage des seuls séminaristes et clercs. Mêmes les fidèles laïcs vont commencer à composer et à constituer des chorales. C’est aussi à ce niveau que l’on constatera des dérapages. Le bruit parfois assourdissant des instruments tels que le balafon et le tam-tam, le goût de l’exhibition théâtrale et de l’improvisation feront perdre petit à petit au chant son caractère sacré et donneront plutôt un sentiment de vide spirituel. Il faut donc un retour à la source qu’est la Bible et une formation liturgique non seulement des pasteurs mais aussi des fidèles. Travail qui incombe aux commissions liturgiques diocésaines et nationales.[14]

 Sacrosanctum Concilium considère que l’argument liturgique n’est pas la conclusion sur la nature du culte sur une clé juridiquement religieuse et sur la forme de son actualisation. Ce texte revient sur l’actualité de la réforme liturgique et sur sa richesse encore à explorer du concile Vatican II. Mais la liturgie doit être vue et vécue dans le contexte de la révélation dans l’histoire du salut, comme œuvre du salut continuée par l’Eglise[15]. Cette manière de voir du Vatican II fait de la liturgie une véritable tradition ou transmission du mystère du salut du Christ à travers un rite de façon toujours nouvelle et toujours adaptée à la succession des temps et des lieux.

Le concile donne la description finale de la liturgie. Elle est considérée comme l’exercice de la fonction sacerdotale de Jésus-Christ, exercice dans lequel la sanctification de l’homme est signifiée par des signes sensibles et est réalisée d’une manière propre à chacun d’eux dans lequel le culte public et intégral est exercé par le corps mystique de Jésus-Christ c’est-à-dire par le chef et ses membres.

3-      Intérêt anthropologique

L’esprit de la liturgie de Joseph Ratzinger permet à l’homme de s’interroger sur le sens de son existence en lien avec le culte rendu à Dieu. Pourquoi le culte est-il né ? Que visaient les êtres humains en l’instituant ? Et qu’est-ce que cela peut signifier aujourd’hui ? Une réflexion anthropologique s’avère encore nécessaire pour comprendre la nature sociale de la liturgie dans l’Eglise. C’est pourquoi M. D. Chenu considère alors la liturgie comme une série d’actions développées par des collectivités où chacun est acteur et non spectateur. La liturgie lui apparait nécessairement communautaire pour la raison qu’elle exprime, dans le corps mystique du Christ, la nature essentiellement sociale de l’homme[16]. A sa suite, Andrea Grillo pense qu’il faut retrouver aujourd’hui « l’interaction entre action de l’homme et action de Dieu, entre visibilité et invisibilité, entre extérieur et intérieur, entre culte et sanctification »[17], en acceptant un véritable « changement paradigmatique » pour maintenir la continuité de la foi. C’est dans ce sens que Antoine Essomba Fouda dira « le but de la reforme est donc de donner splendeur et grâce, jeunesse et beauté incisive, parfum à la prière publique de l’Eglise.»[18]

 

CONCLUSION

 

Au terme de ce travail, il était question pour nous de faire une recension du livre L’esprit de la liturgie publié en 2000 par le Cardinal Joseph Ratzinger. Notre travail nous a conduits à faire une présentation générale du livre qui est une reprise du titre du livre de Romano Guardini, parut en 1918. Après la présentation du contexte, nous avons fait le résumé du livre dans ces quatre parties : l’essence de la liturgie, le temps et l’espace dans la liturgie, art et liturgie et la forme de la liturgie. C’est seulement à la fin de la recension que nous avons abordé la partie critique où nous avons ressorti quelques intérêts que nous offre cette riche œuvre. Nous avons relevé les intérêts tant pour la théologie, la liturgie, la pastorale que pour l’anthropologie.

Plus qu’un objet de réflexion intellectuelle, la question du rapport entre foi et liturgie est au cœur de la pensée de Benoît XVI, selon l’antique adage : lex orandi, lex credendi, la loi de la prière est la loi de la foi, autrement dit, l’Église croit comme elle prie. L’Esprit de la liturgie présente la synthèse de sa pensée à propos de la liturgie. Ainsi, chef d’œuvre est une " somme " de théologies liturgiques. C'est un livre-programme qui nous met en garde contre les dérives d’une liturgie qui ne mettrait plus au centre la célébration du mystère divin comme le souhaitait la réforme liturgique du concile Vatican II. La liturgie doit conserver sa fidélité à la sainte Tradition et doit faire face à notre monde en perpétuelle mutation sans rompre avec l’esprit de la liturgie. Ne dit-on pas que l’Eglise est semper reformanda ?


BIBLIOGRAPHIE

 

RATZINGER Joseph, L’Esprit de la liturgie, ad solem, Genève, 2001.

 

CHENU M. D., « Anthropologie et liturgie », Unam Sanctam, 66, Paris, 1967, pp.159-177.

 

FOUDA ESSOMBA Antoine, « La réception de Sacrosanctum Concilium », conférences théologiques, 8, Nkolbisson, 2003, pp. 111-130.

 

GILLO Andrea, « La tradition liturgique dans le monde postmoderne. Un modèle interdisciplinaire de compréhension. » in Recherches de science religieuse, 101/1, Paris, 2013, pp.87-100

 

GRASSO Emilio, « Le ministère de la Parole et ministère de la Paroisse », cahier de réflexion, 10, 2012.

 

THEOBALD Christophe, « La liturgie après Vatican II : quelles fidélités créatrices ? », Recherches de science religieuse, 101/1, Paris, 2013.

 

VATICAN II, constitution sur la sainte liturgie Sacrosanctum Concilium, 1963.

 

http://eucharistiemisericor.free.fr

www.vatican.va/Biographie de Benoit XVI.

 

 


 

TABLE DE MATIERE

 

INTRODUCTION.. 1

I-     AUTEUR ET CONTEXTE DE PUBLICATION.. 1

1- Auteur 1

2- contexte de publication. 2

II.   STRUCTURE ET ARTICULATION DU LIVRE.. 3

II.1 Structure externe. 3

II.2 Structure interne. 3

1-    Première partie : l’essence de la liturgie. 3

2-    Deuxième partie : le temps et l’espace dans la liturgie. 4

3-    Troisième partie: Art et liturgie. 4

4-    Quatrième partie : la forme de la liturgie. 4

III-ELABORATION CRITIQUE.. 4

1- Intérêt théologique. 4

2- Intérêt pastoral et liturgique. 4

3- Intérêt anthropologique. 4

CONCLUSION.. 4

BIBLIOGRAPHIE.. 4

TABLE DE MATIERE.. 4

 

 



[1] Cf. Bibliographie de Benoit XVI sur Vatican.va

[2] Joseph Cardinal Ratzinger, L’Esprit de la liturgie, ad solem, Genève, 2001, p.9

[3] Ibidem, p.47

[4] Ibidem, p.48

[5] Ibidem, p.57

[6] Ibidem, p.77

[7] Ibidem, p.100

[8] http://eucharistiemisericor.free.fr

[9] Sacrosanctum Concilium, n°5-6

[10] http://eucharistiemisericor.free.fr

[11] Emilio Grasso, « Le ministère de la Parole et ministère de la Paroisse », cahier de réflexion, 10, 2012

[12] Christophe Théobald, « La liturgie après Vatican II : quelles fidélités créatrices ? », Recherches de science religieuse, 101/1, Paris, 2013, p.5

[13] Joseph Ratzinger, Lesprit de la liturgie, p. 119

[14] Antoine Fouda Essomba, « La réception de Sacrosanctum Concilium », conférences théologiques, 8, Nkolbisson, 2003, p. 118

[15] Sacrosanctum concilium, n°6

[16] Cf. M. D. Chenu, « Anthropologie et liturgie », Unam Sanctam, n°66, Paris, 1967, pp.159-177

[17] Andrea Grillo, « La tradition liturgique dans le monde postmoderne. Un modèle interdisciplinaire de compréhension. » in Recherches de science religieuse, 101/1, Paris, 2013, p.88

[18] Antoine Essomba Fouda, « La réception de Sacrosanctum Concilium », conférences théologiques, 8, Nkolbisson, 2003,  p.115

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24 septembre 2013 2 24 /09 /septembre /2013 21:33

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par dourweber

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24 septembre 2013 2 24 /09 /septembre /2013 21:16

INTRODUCTION

En la 20ème année de son pontificat, le 31 mai 1998, à la solennité de la Pentecôte, le pape Jean Paul II, rendit publique la lettre apostolique « Dies domini » adressée aux Evêques, aux prêtres, aux familles religieuses et aux fidèles de l’Eglise catholique sur la sanctification du dimanche. Le pape présente cette lettre apostolique riche en signification en cinq chapitres. Il commence par faire une introduction (n°1-7). Ensuite, il développe le premier chapitre : Dies Domini sur la célébration de l’œuvre du Créateur (n°8-18). Le deuxième chapitre : Dies Christi porte sur le jour du Seigneur ressuscité et du don de l’Esprit (n° 19-30). Au troisième chapitre : Dies Ecclesia, le pape présente l’assemblée eucharistique, cœur du dimanche (n°31-54). Le quatrième chapitre quant à lui : Dies Hominis porte sur le dimanche jour de joie, de repos et de solidarité (n° 55-73). Enfin, au cinquième chapitre : Dies Dierum, le dimanche, fête primordiale révélant le sens du temps (n°74-80). Et s’ensuit à la fin la conclusion (n°81-86). Cette lettre apostolique est riche d’intérêts et regorge plusieurs dimensions : cosmogonique, ecclésiologique, théologique, christologique, historique, anthropologique etc. La dimension anthropologique axée principalement sur le chapitre IV : Dies Hominis où le saint père insiste sur le dimanche, jour de joie, de repos et de solidarité fera l’objet de notre recension qui portera essentiellement sur deux parties. La première partie consistera, en effet, à faire un résumé de ce chapitre et la deuxième partie sera une évaluation critique.

 

I-                   RESUME : DIES HOMINIS

1-      La « joie complète » du Christ.

Le saint père commence, dans ce chapitre, par souligner le caractère joyeux et festif du dimanche. Depuis la période apostolique, le dimanche a été vécu par les chrétiens comme un jour de joie en mémoire du Christ ressuscité qui leur apparut en leur procurant la joie : « les disciples furent remplis de joie à la vue du Seigneur » (Jn 20, 20). Cette joie est aussi le fruit de l’Esprit Saint (Rm 14, 17 ; Ga 5, 22), un héritage du Christ à ses disciples. C’est pourquoi le chrétien, dit  le pape Jean Paul II, doit toujours être caractérisé par la joie durant toute sa vie. La joie ici n’est pas à « confondre avec de vains sentiments de satisfaction et de plaisir » (n°57) qui sont passagers  et momentanés.  La joie chrétienne est plutôt une « vertu » à cultiver. C’est une participation à la joie du Christ glorifié. C’est pourquoi elle est divine et humaine. L’eucharistie dominicale doit être alors célébrée dans un état de joie, de dignité et de festivité. Ainsi, le dimanche chrétien est un jour de Dieu donné à l’homme de faire « une fête authentique pour sa pleine croissance humaine et spirituelle (n°58).

2-      L’accomplissement du sabbat

Le dimanche chrétien s’inscrit en continuité avec la dimension de l’accomplissement du sabbat vétérotestamentaire qui célébrait l’œuvre de la création (Gn 2, 1-3 ; Ex 20, 8-11) et de l’exode (Dt 5, 12-15) mais cette fois-ci dans une perspective christocentrique. Ainsi, ce jour du repos de Dieu (Gn 2, 3) donne sens au temps de l’homme. Il devient un repère chronologique avec une portée théologique, un temps de grâce (kairoi) où l’homme est appelé en mémoire de sa création, le 6e jour et du repos de Dieu, le 7è jour, à se souvenir du jour du sabbat pour le sanctifier (Ex 20, 8). Ceci en signe de reconnaissance de « sa dépendance vitale et libératrice à l’égard du créateur, ainsi que sa vocation à collaborer à son œuvre et à accueillir sa grâce » (n°61). C’est dans ce sens que le chrétien doit sanctifier le jour du Seigneur comme le Seigneur le lui a recommandé. En se souvenant toujours que « le sabbat est fait pour l’homme, et non pas l’homme pour le sabbat » (Mc 2, 27) comme nous a enseigné le Christ, lui, le « Maître du sabbat » (Mc 2, 28).

3-      Le jour du repos.

C’est grâce à l’Edit de Constantinople au 4è siècle que le jour du Seigneur fut officiellement reconnu comme un jour de repos. Les chrétiens pouvaient désormais se donner librement à la prière commune. Aujourd’hui encore, le dimanche, jour de fête et de joie, doit avoir tout son sens de jour de repos pour tous les chrétiens même dans les pays où le dimanche n’est pas respecté comme jour du Seigneur.

En outre, le repos a un caractère « sacré » dans la vie des hommes car il est voulu par Dieu. Il permet en effet « à l’homme de se soustraire au cycle des tâches terrestres, qui est parfois bien trop absorbant et de reprendre conscience du fait que tout est œuvre de Dieu » (n °65) surtout à « notre époque où la science et la technique ont accru de manière inouïe  le pouvoir que l’homme exerce par son travail » (n°65). C’est pourquoi le travail sans repos aliène l’homme et empêche ce dernier à sanctifier le jour du Seigneur. Ainsi, à la suite du pape Léon XIII, Jean Paul II pense que l’Etat doit garantir le repos dominical pour tous les travailleurs afin que l’homme exprime sa dignité dans le repos, la détente avec les exigences religieuses, familiales,  culturelles et interpersonnelles (n°66).

 Le repos dominical permet aussi à l’homme de privilégier les valeurs spirituelles sur les choses matérielles pour s’ouvrir à l’altérité dans les rencontres et le dialogue, la redécouverte de la beauté de la nature. Le dimanche devient alors pour l’homme « jour de paix avec Dieu, avec lui-même et avec ses semblables». Il est donc un devoir pour les chrétiens « de participer à l’Eucharistie, en s’abstenant des travaux et des affaires incompatibles avec la sanctification du jour du Seigneur, avec la joie qui lui est propre et avec le repos du corps et de l’esprit qui est nécessaire » (n°67). D’où le caractère « prophétique » du dimanche.

4-      Jour de solidarité

Pour le pape Jean Paul II, le dimanche jour de solidarité doit « donner aux fidèles l’occasion de se consacrer aux œuvres de miséricorde, de charité et d’apostolat » car la joie qui découle du dimanche doit se témoigner dans l’amour comme l’a prescrit le Christ en donnant à ses disciples un commandement nouveau (Jn 15, 10-12). Cette force d’amour doit découler de l’Eucharistie dominicale pour se concrétiser dans le partage fraternel avec les plus pauvres  et les démunis de la société avec qui le Christ s’identifie. L’Eucharistie devient ainsi « le lieu où la fraternité devient une solidarité concrète » (n°71). La joie se partage alors et s’ouvre aux malades, aux personnes âgées, aux enfants, aux émigrés. L’Eucharistie devient « une grande école de charité, de justice et de paix » grâce à la présence du Christ ressuscité qui fait de nous des artisans de paix.

 

II-                ELABORATION CRITIQUE

Cette lettre apostolique est riche en intérêt comme nous l’avions su-mentionné. Ce chapitre Dies Hominis nous permet de redécouvrir la portée tant théologique qu’anthropologique du dimanche. Nous voulons souligner la pertinence du dimanche comme jour de fête et de joie, ensuite le repos du dimanche comme expression de la dignité de l’homme et enfin l’exigence de la solidarité du dimanche comme un défi pour la nouvelle évangélisation.

1-      Dimanche : jour de fête et de joie.

A la suite du pape Jean Paul II, nous convenons que le dimanche est un jour différent des autres jours de la semaine surtout pour nous les chrétiens.  C’est pourquoi nous pouvons comprendre à la lumière de cette lettre apostolique certaines pratiques liturgiques comme l’interdiction de jeûner le dimanche car nous devons revêtir la joie du Christ ressuscité et la communiquer aux autres. C’est dans cette logique que les dimanches de carême ne sont pas comptés dans les 40 jours de jeûnes précédant la fête de la Pâques de notre Seigneur.  Car c’est le jour du Fils de l’homme : « les compagnons de l’époux peuvent-ils jeûner pendant que l’époux est avec eux ? Tant qu’ils ont l’époux avec eux,  ils ne peuvent pas jeûner » (Mc 2, 19) disait Jésus aux disciples de Jean Baptiste. D’où la compréhension de la signification vétérotestamentaire du jour du sabbat comme jour de fête et de joie et non comme un jour de pénitence ou de deuil. «  Ce jour est saint pour Yahvé, votre Dieu ! Ne soyez pas tristes, ne pleurez pas » ; « allez, mangez des viandes grasses, buvez des boissons douces et faites porter sa part à qui n’a rien de prêt. Car ce jour est saint pour notre Seigneur. Ne vous affligez point : la joie de Yahvé est notre forteresse ! » (Ne 8, 9-10). Ainsi, nous sommes appelés à réexaminer notre attitude du dimanche jour de fête et de joie où nous sommes invités à nous ouvrir au monde dans ses besoins, partager notre joie et notre avoir. Nous devons fêter avec les autres et non pas nous replier sur nous-mêmes.

2-      Le dimanche : expression de la dignité de l’homme

Le saint père Jean Paul II, au vu de ce qui précède, cherche à revaloriser la dignité de l’homme. C’est pourquoi il ne manque pas de dénoncer toute forme de travail du dimanche qui bafoue et aliène l’homme dans sa dignité et sa liberté. L’homme réduit à la dimension économique ou matérielle est déshumanisé. Ainsi pour Marcus Ndongmo :

La loi du repos dominical nous enjoint d’abord de lutter contre toutes les formes d’esclavage d’où qu’elles proviennent. Non seulement, nous n’avons pas à devenir nous-mêmes des esclaves, de qui ou de quoi que ce soit, mais bien plus, nous ne devons rendre personne esclave. L’homme, quel qu’il soit n’est pas un bourreau ; il est un être libre. Après un travail bien accompli, il a droit au repos et aux loisirs.[1]

En effet, l’homme à la quête du matériel oublie souvent de trouver un temps d’arrêt pour se ‘‘re-créer’’, se ‘‘re-poser’’, se ‘‘re-faire’’. Ainsi le pape tient à dénoncer cette forme de vie où le matériel prend le dessus sur le spirituel aliénant ainsi l’homme dans sa relation avec Dieu, avec son semblable et avec la nature. Le dimanche devient « un jour de protestation contre les servitudes du travail et le culte de l’argent »[2]. En sanctifiant le dimanche, l’homme se démarque de son œuvre et se repositionne sur l’univers à l’instar de Dieu qui se reposa le 7e jour.

3-      L’exigence de la solidarité du dimanche comme un défi pour la nouvelle évangélisation

Nous vivons dans un monde enclin de matérialisme, d’individualisme où les hommes ont perdu le sens de la vie communautaire, du bien commun. Pourtant, le dimanche s’offre à nous comme un jour où l’homme est invité à redonner sens à sa vie sociale, culturelle, associative, familiale, fraternelle. C’est dans la rencontre avec l’autre que nous pourrons témoigner de l’espérance qui habite en nous (1P 3, 15). C’est le jour où tous les hommes doivent jouir par ailleurs « d’un temps de repos et de loisir suffisant qui leur permette aussi d’entretenir une vie familiale, culturelle, sociale et religieuse »[3]. Ainsi, la nouvelle évangélisation ne saurait être indifférente sur la portée anthropologique du dimanche. Le dimanche est à ré-évangéliser surtout dans notre contexte de sécularisation et de laïcité. L’homme doit reprendre le centre de la création dans une vie de solidarité. Car comme l’affirme Benoît XVI dans Africae munus: « la solidarité est garante de la justice et de la paix, de l’unité, de sorte que l’abondance des uns supplée au manque des autres » (n° 24).

CONCLUSION

       Au terme de cette analyse du chapitre IV : Dies hominis de la lettre apostolique Dies Domini du bienheureux Jean Paul II, force est de constater que le dimanche, jour du Seigneur, est aussi jour de l’homme. Car depuis la création, Dieu a mis l’homme au dessus de son œuvre créatrice en faisant de lui son image et sa ressemblance (Gn 2, 28). C’est pourquoi, ce dernier est appelé à vivre le dimanche jour du sabbat dans la joie, le repos et la solidarité en se référant toujours au Christ mort et ressuscité pour nous. Le dimanche devient ainsi un besoin inscrit au cœur de l’existence chrétienne, un besoin à faire reconnaître et valoriser dans toute la société. Car autant que nous avons besoin du travail pour vivre, autant notre vie humaine sans joie, ni repos, ni solidarité n’aura aucun sens et sans Eucharistie dominicale nous serons sans conscience bien formée comme souligne le pape Benoît XVI « Il apparaît clairement que participer à l’Eucharistie dominicale est requis par la conscience chrétienne en même temps forme celle-ci »[4].



[1] Marcus NDONGMO, A la découverte des dix commandements. Lecture contextualisée du Décalogue pour un renouveau social, presses de l’Ucac, Yaoundé, 2011, p.92

[2] Catéchisme de l’Eglise Catholique, n°2172

[3] Vatican II, Gaudium et Spes, n°67

[4] Benoît XVI, Exhortation post-synodale Africae munus, n°44, Libreria Editrice Vaticana, 2011

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